Karl Marx et Friedrich Engels

 

[1843-1850]

 

 

 

 

Le parti de classe

 

Tome IV. ActivitŽs de classe du parti

 

Introduction et notes de Roger Dangeville

 

 

 

 

 

 

Un document produit en version numŽrique par Mme Marcelle Bergeron, bŽnŽvole

Professeure ˆ la retraite de lÕƒcole Dominique-Racine de Chicoutimi, QuŽbec

Courriel : mabergeron@videotron.ca

 

Dans le cadre de : "Les classiques des sciences sociales"

Une bibliothque numŽrique fondŽe et dirigŽe par Jean-Marie Tremblay,

professeur de sociologie au CŽgep de Chicoutimi
Site web : http ://classiques.uqac.ca/

 

Une collection dŽveloppŽe en collaboration avec la Bibliothque

Paul-ƒmile-Boulet de l'UniversitŽ du QuŽbec ˆ Chicoutimi

Site web : http ://bibliotheque.uqac.ca/

 

 

 


Un document produit en version numŽrique par Mme Marcelle Bergeron, bŽnŽvole,

professeure ˆ la retraite de lÕƒcole Dominique-Racine de Chicoutimi, QuŽbec.

Courriel : mailto :mabergeron@videotron.ca

 

 

Karl Marx et Friedrich Engels [1843-1850]

 

Le parti de classe

Tome IV : ActivitŽs de classe du parti.

 

Introduction, traduction et notes de Roger Dangeville.

Paris : Franois Maspero, 1973, 180 pp. Petite collection Maspero, no 123.

 

 

 

Polices de caractres utilisŽs :

 

Pour le texte : Times New Roman, 12 points.

Pour les citations : Times New Roman 10 points.

Pour les notes de bas de page : Times New Roman, 10 points.

 

 

ƒdition Žlectronique rŽalisŽe avec le traitement de textes Microsoft Word 2003 pour Macintosh.

 

Mise en page sur papier format

LETTRE (US letter), 8.5ÕÕ x 11ÕÕ)

 

ƒdition complŽtŽe le 7 mai, 2007 ˆ Chicoutimi, Ville de Saguenay, QuŽbec.

 

 


 

 

CHEZ LE MæME ƒDITEUR

 

 

 

 

Karl marx, Friedrich engels, Le syndicalisme, 1. ThŽorie, organisation, activitŽ. — II. Contenu et portŽe des revendications syndicales. Traduction et notes de Roger Dangeville.

 

 

 

Karl Marx, Friedrich engels, Le parti de classe. Traduction et notes de Roger Dangeville.

 

Tome l. ThŽorie, activitŽ.

Tome II. ActivitŽ et organisation.

Tome III. Questions dÕorganisation.

Tome IV. ActivitŽs de classe. Index des noms citŽs dans les quatre volumes. Index analytique.


 

 

 

Table des matires

 

 

 

 

1. TACTIQUE ET PERSPECTIVES DU PARTI

 

Cadre historique de la politique et de la tactique des diffŽrents partis

CrŽation de la Ile Internationale

Parti de masse : question agraire et petite bourgeoisie

Questions de la presse

Perspectives historiques du parti

 

2. LE PARTI FACE A L'ƒVOLUTION DU MONDE

 

La situation

Situation politique de l'Europe

Caractre Ç national È du mouvement

Le socialisme en Allemagne

 

Index des noms citŽs


 

 

Le parti de classe. Tome IV. ActivitŽs de classe du parti

 

Chapitre 1

 

Tactique et perspectives
du parti

 

 

Je dois suivre le mouvement dans cinq grands pays d'Europe et quantitŽ de petits, ainsi qu'aux ƒtats-Unis. Pour cela, je reois trois quotidiens allemands, deux anglais, un italien et, depuis le 1er janvier, le quotidien de Vienne, soit sept en tout. Quant aux hebdomadaires, j'en reois deux d'Allemagne, sept d'Autriche, un de France, trois d'AmŽrique (deux en anglais, un en allemand), deux en italien, quatre autres, respectivement en polonais, en bulgare, en espagnol et en tchque, trois autres dans des langues que je suis encore en train d'assimiler peu ˆ peu. Outre cela, des visites de toutes sortes de gens... et une foule sans cesse grandissante de correspondants ‑ davantage qu'ˆ l'Žpoque de l'Internationale ! Beaucoup d'entre eux esprent recevoir de longues explications, et tous me prennent du temps [1].

 

Engels ˆ Laura Lafargue, 17 dŽcembre 1894.

 

 

 

Cadre historique de la politique
et de la tactique des diffŽrents partis

 

 

 

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C'est avec une grande joie que j'ai constatŽ que les socialistes de Roumanie s'Žtaient donnŽ un programme en accord avec les principes fondamentaux de la thŽorie qui rŽussit ˆ souder en un seul bloc presque tous les socialistes d'Europe et d'AmŽrique, je veux dire la thŽorie de mon ami Karl Marx [2]. La situation politique et sociale existant au moment de la mort de ce grand penseur et les progrs de notre parti dans tous les pays civilisŽs firent qu'il ferma les yeux dans la certitude que ses efforts en vue de rassembler les prolŽtaires des deux mondes en une seule grande armŽe et sous un seul et mme drapeau seraient couronnŽs de succs. Mais s'il voyait seulement les immenses progrs que nous avons accomplis depuis lors en AmŽrique et en Europe !

 

Ces progrs sont si considŽrables qu'une politique internationale commune est devenue possible et nŽcessaire, du moins pour le parti europŽen [3]. Ë ce point de vue aussi, je me rŽjouis de voir que vous concordez en principe avec nous et avec les socialistes de l'Occident. La traduction de mon article sur La Situation politique en Europe ainsi, que votre lettre ˆ la rŽdaction de la Neue Zeit le dŽmontrent suffisamment.

 

De fait, nous nous trouvons tous devant le mme grand obstacle qui entrave le libre dŽveloppement de l'ensemble des peuples et de chaque peuple en particulier ; sans ce libre dŽveloppement ; nous ne pouvons penser ˆ la rŽvolution sociale dans les diffŽrents pays, pas plus que nous ne pourrions la mener ˆ son terme en nous soutenant et en nous entraidant les uns les autres. Cet obstacle est la vieille Sainte-Alliance des trois assassins de la Pologne [4], qui depuis 1815 est dirigŽe par le tsarisme russe et continue de subsister jusqu'ˆ nos jours, malgrŽ toutes les dissensions internes possibles. En l'an 1815, l'Alliance fut fondŽe pour s'opposer ˆ l'esprit rŽvolutionnaire du peuple franais ; elle fut renforcŽe en 1871 gr‰ce au brigandage de l'Alsace-Lorraine, effectuŽ aux dŽpens de la France, qui fit de l'Allemagne l'esclave du tsarisme, et du tsar l'arbitre de l'Europe ; en 1888, l'Alliance subsista pour anŽantir le mouvement rŽvolutionnaire au sein des trois Empires, en ce qui concerne aussi bien les aspirations nationales que les mouvements politiques et sociaux des ouvriers. Comme la Russie dŽtient une position stratŽgique pratiquement inexpugnable, le tsarisme russe reprŽsente le noyau de cette alliance, la plus grande rŽserve de la rŽaction europŽenne.

 

Renverser le tsarisme et en finir avec ce cauchemar qui pse sur toute l'Europe est, ˆ nos yeux, la condition premire de l'Žmancipation des nations de l'Europe centrale et orientale. Ds lors que le tsarisme sera renversŽ, nous assisterons ˆ l'effondrement de cette puissance funeste, reprŽsentŽe par Bismarck, celle-ci Žtant alors privŽe de son soutien principal [5]. L'Autriche se dŽsagrŽgera, Žtant donnŽ qu'elle perdra la seule justification de son existence, ˆ savoir empcher par sa simple existence le tsarisme de s'incorporer les nations ŽparpillŽes des Carpathes et des Balkans ; la Pologne sera restaurŽe ; la Petite-Russie pourra choisir librement ses liens politiques ; les Roumains, les Magyars et les Slaves du Sud, libres de toute immixtion Žtrangre, pourront rŽgler entre eux leurs affaires et leurs problmes frontaliers ; enfin, la noble nation des Grands-Russiens ne fera plus une chasse insensŽe ˆ des conqutes qui ne profitent qu'au tsarisme, mais accomplira son authentique mission civilisatrice en Asie et, en liaison avec l'Ouest, ils dŽvelopperont leurs capacitŽs intellectuelles impressionnantes, au lieu de livrer au travail forcŽ et ˆ l'Žchafaud les meilleurs d'entre eux.

 

Au reste, il faut que les Roumains connaissent bien le tsarisme : ils ont suffisamment souffert du rglement organique de Kisselev, de la rŽpression du soulvement de 1848, du double brigandage de la Bessarabie [6], des innombrables invasions de la Roumanie qui, pour la Russie, ne reprŽsente qu'un dŽp™t d'armes et de munitions sur le chemin vers le Bosphore. Enfin, ils ne savent que trop bien que l'indŽpendance nationale de la Roumanie cessera du jour o s'accomplira le rve du tsarisme : la conqute de Constantinople. Jusque-lˆ, le tsarisme vous tiendra en haleine, en vous poussant vers la Transylvanie roumaine qui se trouve entre les mains des Magyars, mais dont prŽcisŽment le tsarisme maintient la sŽparation d'avec la Roumanie. Si demain le despotisme s'effondrait ˆ PŽtersbourg, aprs-demain il n'y aurait plus d'Autriche-Hongrie en Europe [7].

 

Ë l'heure actuelle, l'Alliance semble dissoute, et la guerre imminente. Cependant, mme si la guerre Žclatait, ce ne serait que pour remettre au pas la rŽcalcitrante Autriche et la Prusse. EspŽrons que cette guerre n'aura pas lieu : dans une telle guerre, on ne pourrait sympathiser avec aucun des belligŽrants ; au contraire, il faudrait souhaiter que tous fussent battus, si cela Žtait possible. Ce serait une guerre affreuse. Mais, quoi qu'il advienne, ce qui est sžr c'est que tout s'achvera en fin de compte au profit du mouvement socialiste et la conqute du pouvoir par la classe ouvrire en sera accŽlŽrŽe.

 

Excusez cette longue lettre sur des considŽrations aussi vastes, mais il ne m'Žtait pas possible d'Žcrire ˆ un Roumain sans lui exprimer ma conception sur ces questions bržlantes. Au reste, elle peut se rŽsumer en deux mots : une rŽvolution Žclatant en Russie ˆ l'heure actuelle Žpargnerait ˆ l'Europe le malheur d'une guerre gŽnŽrale, et serait le commencement de la rŽvolution dans le monde entier.

 

Au cas o vos liaisons avec les socialistes allemands, l'Žchange de presse, etc., ne seraient pas satisfaisants, je pourrais vous tre utile sur ce point.

 

Recevez mes salutations fraternelles.

 

 

Je vous rŽpte tout d'abord que je suis fier de savoir qu'au sein de la jeunesse russe il existe un parti qui revendique ouvertement et sans ambages les grandes thŽories Žconomiques et historiques de Marx, et a rompu Žnergiquement avec les tendances anarchistes quelles qu'elles soient, ainsi que les quelques rares traditions slavophiles qui se sont manifestŽes chez vos prŽdŽcesseurs [8]. Il s'agit lˆ d'un progrs qui sera d'une grande importance pour le mouvement rŽvolutionnaire de Russie. La thŽorie historique de Marx est, ˆ mes yeux, la condition essentielle de toute tactique rŽvolutionnaire cohŽrente et consŽquente. Pour trouver cette tactique, il suffit d'appliquer cette thŽorie aux conditions Žconomiques et politiques du pays en question.

 

Mais, pour cela, il faut conna”tre ces conditions ; et en ce qui me concerne, je connais trop peu la situation actuelle en Russie pour tre en mesure de fixer, avec compŽtence, les dŽtails de la tactique qu'il faudra appliquer le moment voulu. De plus, j'ignore compltement l'histoire interne et secrte du parti rŽvolutionnaire russe, notamment au cours de ces dernires annŽes. Mes amis parmi les narodoviks ne m'en ont jamais parlŽ. Or, c'est une condition indispensable pour se former un jugement.

 

Ce que je sais ou crois savoir de la situation en Russie m'incite ˆ penser que ce pays s'approche de son 1789. La rŽvolution doit Žclater le moment voulu : elle peut Žclater d'un jour ˆ l'autre. Dans ces conditions, le pays est comme une poudrire, dont il suffit d'allumer la mche ‑ surtout depuis le 13 mars [9]. C'est l'un des cas exceptionnels o il est possible ˆ une poignŽe d'hommes de faire une rŽvolution, c'est-ˆ-dire, gr‰ce ˆ une faible impulsion, de renverser un systme tout entier dont l'Žquilibre est instable (pour employer la mŽtaphore favorite de PlŽkhanov) et, gr‰ce ˆ un acte insignifiant, de libŽrer des forces explosives qui ds lors ne peuvent plus tre ma”trisŽes. Or donc, si jamais le blanquisme ‑ l'idŽe de rŽvolutionner une sociŽtŽ entire par l'action d'un petit groupe de conjurŽs ‑ a eu une certaine justification, c'est certainement ˆ PŽtersbourg [10]. Une fois que le feu est mis aux poudres, une fois que les forces sont libŽrŽes et l'Žnergie nationale transformŽe d'Žnergie potentielle en Žnergie cinŽtique (encore une formule favorite de PlŽkhanov, et une fort bonne) ‑ les hommes qui auront mis le feu ˆ la poudrire seront soufflŽs par l'explosion qui sera mille fois plus forte qu'eux et se cherchera l'issue qu'elle pourra, telle que les forces et les rŽsistances Žconomiques en dŽcideront.

 

Admettons que ces gens se figurent qu'ils peuvent s'emparer du pouvoir, en quoi cela peut-il tre nuisible ? S'ils ne font que percer le trou qui rompra la digue, le torrent dŽcha”nŽ dissipera lui-mme bient™t leurs illusions. Mais si leurs illusions avaient par hasard pour effet de surmultiplier leur force de volontŽ, pourquoi nous en plaindre ? Les gens qui se sont vantŽs d'avoir fait une rŽvolution se sont toujours aperu le lendemain qu'ils ne savaient pas ce qu'ils faisaient, la rŽvolution faite ne ressemblant absolument pas ˆ l'image de celle qu'ils voulaient faire. C'est ce que Hegel appelle l'ironie de l'histoire [11], ˆ laquelle peu de personnalitŽs historiques Žchappent [12]. Il suffit de prendre Bismarck, ce rŽvolutionnaire malgrŽ lui, et Gladstone, qui finalement est entrŽ en conflit avec son cher tsar.

 

Ë mon avis, l'essentiel c'est que l'impulsion soit donnŽe en Russie, que la rŽvolution Žclate. Que ce soit telle ou telle fraction qui donne le signal, que cela se passe sous telle ou telle enseigne, peu m'importe [13]. S'il s'agissait d'une rŽvolution de palais [14], ses auteurs seraient balayŽs ds le lendemain. Lˆ o la situation est si tendue, lˆ o les ŽlŽments rŽvolutionnaires se sont accumulŽs ˆ un tel degrŽ, lˆ o les conditions Žconomiques de masses Žnormes deviennent de jour en jour de plus en plus intolŽrables, lˆ o tous les niveaux du dŽveloppement de la sociŽtŽ se trouvent reprŽsentŽs, depuis les communautŽs primitives jusqu'ˆ la moderne grande industrie et la haute finance, et lˆ o toutes ces contradictions sont maintenues ensemble par un despotisme sans pareil, un despotisme toujours plus insupportable pour une jeunesse qui allie en elle l'intelligence et la dignitŽ de la nation ‑ si lˆ le 1789 a une fois commencŽ, il ne faudra pas attendre longtemps pour que se produise un 1793 [15].

 

Je vous quitte, chre citoyenne. Il est deux heures et demie du matin, et je n'aurai plus le temps d'ajouter encore quelque chose avant le dŽpart de la poste demain. Ecrivez-moi en russe, si vous le prŽfŽrez, mais je vous prie de ne pas oublier que des lettres russes Žcrites, je n'ai pas l'occasion d'en lire tous les jours.

 

 

J'en arrive enfin ˆ rŽpondre ˆ votre lettre du 8 novembre [16].

 

L'une des t‰ches vŽritables de la rŽvolution de 1848 ‑ et contrairement aux illusoires, les t‰ches vŽritables d'une rŽvolution furent toutes rŽsolues ˆ la suite de cette rŽvolution ‑, c'Žtait de restaurer les nationalitŽs opprimŽes et dŽchirŽes de l'Europe centrale, pour autant bien sžr qu'elles Žtaient douŽes de vitalitŽ et, ˆ ce moment prŽcis, mžres pour l'indŽpendance. Cette t‰che fut rŽsolue par les exŽcuteurs testamentaires de la rŽvolution, selon les circonstances du moment, pour l'Italie, la Hongrie, l'Allemagne, par les Bonaparte, Cavour et autres Bismarck. Restrent l'Irlande et la Pologne. On peut laisser de c™tŽ ici l'Irlande qui n'affecte que trs indirectement les rapports du continent. Mais la Pologne se trouve au milieu du continent, et le maintien de sa division est prŽcisŽment le lien qui ressoude ˆ chaque fois entre elles les puissances de la Sainte-Alliance. C'est la raison pour laquelle la Pologne nous intŽresse au premier chef.

 

Historiquement, il est impossible ˆ un grand peuple de discuter avec tant soit peu de sŽrieux ses questions intŽrieures aussi longtemps que l'indŽpendance nationale fait dŽfaut. Ce n'est que depuis 1861 que les rŽpublicains ont ŽpuisŽ leur t‰che [en Allemagne], et ils ont donnŽ ensuite aux socialistes les meilleurs de leurs ŽlŽments. Ce n'est qu'en l'an 1866 ‑ lorsque l'unitŽ grand-prussienne de la Petite-Allemagne fut vraiment dŽcidŽe ‑ que le parti dit d'Eisenach et les lassallŽens ont gagnŽ une importance, et ce n'est que depuis 1870, lorsque les vellŽitŽs d'immixtion de Bonaparte outre-Rhin furent dŽfinitivement ŽcartŽes, que notre cause a pris son vŽritable essor. O serait notre parti si nous avions encore la vieille Dite ! De mme en Hongrie. Ce n'est que depuis 1860 qu'elle est attirŽe dans le mouvement moderne, caractŽrisŽ par les filouteries en haut, et le socialisme en bas.

 

Un mouvement international du prolŽtariat en gŽnŽral n'est possible qu'entre nations indŽpendantes. Le petit peu d'internationalisme rŽpublicain de 1830-1848 se regroupa autour de la France qui devait libŽrer l'Europe, et accrut donc le chauvinisme franais au point que la mission de libŽration universelle de la France, et donc son droit, de par sa naissance, ˆ prendre la tte, nous est encore jetŽe ˆ travers les jambes tous les jours (sous une forme caricaturale chez les blanquistes, et trs marquŽe chez les Malon et Cie, par exemple).

 

Dans l'Internationale Žgalement, c'Žtait une opinion qui allait presque de soi chez les Franais. Ce n'est que les ŽvŽnements qui firent entrer dans leur tte ‑ ainsi que celle de quelques autres ‑ qu'une action internationale commune n'est possible qu'entre Žgaux, et qu'un premier parmi ses pairs l'est tout au plus pour une action immŽdiate. En fait, la rŽalitŽ de tous les jours est encore nŽcessaire pour ancrer cela dans les esprits.

 

Tant que la Pologne est divisŽe et asservie, il n'est donc pas possible qu'un puissant parti socialiste se dŽveloppe dans le pays, pas plus qu'il n'est possible de nouer des rapports vŽritablement internationaux entre les Polonais de l'Žmigration et les autres partis prolŽtariens d'Allemagne, etc. Tout paysan ou ouvrier polonais qui, Žmergeant du marais, s'ouvre ˆ l'idŽe de participer aux problmes d'intŽrt gŽnŽral se heurte aussit™t ˆ la rŽalitŽ de l'oppression nationale. Celle-ci surgit partout comme premier obstacle sur son chemin. Son Žlimination est la condition fondamentale de toute Žvolution saine et libre. Des socialistes polonais qui ne mettraient pas en tte de leur programme la libŽration de leur pays me feraient la mme impression que des socialistes allemands qui ne voudraient pas exiger d'abord l'abolition de la loi antisocialiste et la libertŽ d'association, de presse, etc.

 

Pour pouvoir lutter, il faut d'abord disposer d'un terrain, d'air, de lumire et de la possibilitŽ de se mouvoir. Sinon, tout reste bavardage.

 

Dans tout cela, ce qui importe ce n'est pas de savoir si la restauration de la Pologne est possible avant la prochaine rŽvolution. Notre r™le n'est en, aucun cas de dŽtourner les Polonais des efforts pour arracher de force les conditions de vie pour leur dŽveloppement ultŽrieur, ni de les persuader que l'indŽpendance nationale n'est qu'une cause secondaire du point de vue international, alors qu'elle est bien plut™t la base de toute action internationale commune.

 

Au demeurant, la guerre entre l'Allemagne et la Russie Žtait sur le point d'Žclater en 1873, pour restaurer sous n'importe quelle forme la Pologne, ce qui ežt constituŽ le noyau d'une vŽritable Pologne ˆ l'avenir. De mme, si messieurs les Russes ne mettent pas bient™t un terme ˆ leurs intrigues et ˆ leur propagande panslaviste en HerzŽgovine, ils peuvent parfaitement voir leur tomber dessus une guerre qui dŽpasserait leur volontŽ aussi bien que celle de l'Autriche et de Bismarck.

 

Les seuls qui aient intŽrt ˆ ce que les choses deviennent sŽrieuses en HerzŽgovine, ce sont le parti panslaviste russe et le tsar. Il n'y a pas lieu de se prŽoccuper davantage de la bande de brigands bosniaques que des stupides ministres et bureaucrates autrichiens qui y poursuivent leurs manigances. En consŽquence, mme sans soulvement, ˆ la suite de simples conflits europŽens, il n'est pas exclu que soit restaurŽe une Petite-Pologne indŽpendante, de la mme manire que la Petite-Allemagne prussienne inventŽe par les bourgeois n'a pas ŽtŽ rŽalisŽe par la voie rŽvolutionnaire ou parlementaire dont on rvait, mais par la guerre.

 

Je suis donc d'avis, qu'en Europe deux nations ont non seulement le droit mais le devoir d'tre nationales, avant d'tre internationales. C'est ce que les Polonais ont compris dans toutes les crises, et ils l'ont prouvŽ sur les champs de bataille de la rŽvolution. Ds lors qu'on leur enlve la perspective de restaurer la Pologne ou qu'on leur raconte que la nouvelle Pologne leur tombera bient™t toute seule dans les bras, c'en est fait de leur intŽrt ˆ la rŽvolution europŽenne.

 

Nous en particulier, nous n'avons absolument aucune raison de nous mettre en travers de la route des Polonais qui sont poussŽs irrŽsistiblement vers l'indŽpendance. Premirement, ils ont inventŽ et appliquŽ en 1863 le mode de combat que les Russes imitent maintenant avec tant de succs (cf. Berlin et PŽtersbourg, annexe 2 [17] ) ; deuximement, ils ont donnŽ ˆ la Commune de Paris les seuls capitaines militaires compŽtents et dignes de confiance.

 

 

Tactique dans les pays dŽveloppŽs
et non dŽveloppŽs

 

 

Meilleurs remerciements pour les trs intŽressantes nouvelles que vous me donnez dans votre lettre du 8.

 

Si je dois vous donner mon opinion sur la dernire action d'Žclat et d'ƒtat de Copenhague [18], dont vous tes la victime, je commencerais par un, point sur lequel je ne suis pas de votre avis.

 

Par ,principe, vous rejetez toute idŽe de faire un bout de chemin, mme momentanŽment, avec d'autres partis. Je suis assez rŽvolutionnaire pour ne pas admettre que l'on m'interdise, d'une manire absolue, ce moyen si, dans certaines circonstances, cela est avantageux ou est le biais le moins nuisible [19].

 

Mais nous sommes d'accord sur le fait que le prolŽtariat ne peut conquŽrir sans rŽvolution violente le pouvoir politique, seule porte donnant sur la sociŽtŽ nouvelle. Pour qu'au jour de la dŽcision le prolŽtariat soit assez fort pour vaincre ‑ et cela, Marx et moi nous l'avons dŽfendu depuis 1847 ‑, il est nŽcessaire qu'il se forme un parti autonome, sŽparŽ de tous les autres et opposŽ ˆ eux tous, un parti de classe conscient.

 

Cela n'exclut pas, cependant, que ce parti puisse momentanŽment utiliser ˆ ses fins d'autres partis. Cela n'exclut pas davantage qu'il puisse soutenir momentanŽment d'autres partis pour des mesures qui reprŽsentent ou bien un avantage immŽdiat pour le prolŽtariat, ou bien un progrs dans le sens du dŽveloppement Žconomique ou de la libertŽ politique. Pour ma part, je soutiendrais quiconque lutte vŽritablement en Allemagne pour l'Žlimination de la succession par ordre de primogŽniture et d'autres survivances fŽodales, de la bureaucratie, des droits de douane, des lois de rŽpression contre les socialistes, des restrictions au droit de rŽunion et d'association. Si notre parti allemand du progrs [20] ou votre Venstre danois [21] Žtaient de vŽritables partis bourgeois radicaux, et non de simples regroupements de misŽrables bavards qui, ˆ la premire menace de Bismarck ou d'Estrup, se mettent ˆ ramper, je ne serais absolument pas inconditionnellement contre tout cheminement momentanŽ avec eux pour certains buts prŽcis. Si nos parlementaires votent pour un projet qui Žmane de l'autre c™tŽ ‑ et c'est ce qu'ils sont obligŽs de faire assez souvent ‑, n'est-ce pas dŽjˆ un pas ensemble ? Mais je n'y suis favorable que lorsque l'avantage est direct pour nous, ou indubitable pour le dŽveloppement historique du pays en direction de la rŽvolution Žconomique et politique, c'est-ˆ-dire en vaut la peine, et ˆ la condition prŽalable que le caractre prolŽtarien de classe du parti n'en soit pas affectŽ. C'est ce qui est pour moi la limite absolue. Cette politique, vous la trouverez dŽveloppŽe ds 1847 dans le Manifeste communiste, et nous l'avons suivie partout, en 1848, dans l'Internationale.

 

Abstraction faite de la question de la moralitŽ ‑ il ne s'agit pas de ce point ici, et je le laisse donc de c™tŽ ‑, en tant que rŽvolutionnaire, tout moyen m'est bon pour atteindre au but, le plus violent, mais aussi le plus douillet en apparence.

 

Une telle politique rŽclame une vision aigu‘ des choses et une fermetŽ de caractre, mais peut-il y avoir une autre politique ? Elle nous menace du danger de corruption, prŽtendent les anarchistes et l'ami Morris. Cela est vrai, si la classe ouvrire est une sociŽtŽ de dŽbiles, d'idiots et de fripouilles qui se laissent acheter en un tour de main ; mais alors il ne nous reste plus qu'ˆ tout remballer sans attendre, et le prolŽtariat et nous, nous n'avons rien ˆ faire sur la scne politique. En fait, 1e parti du prolŽtariat, comme tous les autres partis, deviendra d'autant plus clairvoyant qu'il saura tirer les leons de ses propres erreurs, et nul ne peut lui Žpargner entirement ces erreurs.

 

Ë mon avis, vous avez donc tort si vous commencez par Žlever une question purement tactique au niveau des principes. Et, pour moi, il s'agit ˆ l'origine d'une pure question de tactique. Mais, dans certaines circonstances, une erreur de tactique peut aussi aboutir ˆ une violation des principes.

 

Et, sur ce plan, pour autant que je puisse en juger, vous avez raison contre la tactique du comitŽ directeur. Au Danemark, la Gauche petite-bourgeoise joue depuis des annŽes une indigne parodie d'opposition, et ne cesse d'Žtaler aux yeux du monde sa propre impuissance. L'occasion ‑ si elle s'est jamais prŽsentŽe ‑ d'affronter la violation de la constitution [22] les armes ˆ la main, elle l'a manquŽe depuis longtemps, et ‑ comme cela en a tout ˆ fait l'air ‑ une fraction toujours croissante de cette Gauche aspire ˆ une rŽconciliation avec Estrup. Il me semble qu'il soit impossible qu'un vŽritable parti prolŽtarien puisse marcher ensemble avec un tel parti sans perdre ˆ la longue son propre caractre de classe comme parti ouvrier. Dans la mesure o vous soulignez le caractre de classe du mouvement en opposition ˆ cette politique, je ne peux qu'tre d'accord avec vous.

 

En ce qui concerne la faon de procŽder du comitŽ directeur vis-ˆ-vis de vous et de vos amis, il faut remonter aux sociŽtŽs secrtes de 1840-1851 pour trouver des exclusions aussi sommaires de l'opposition dans un parti : l'organisation secrte les rend inŽvitables. En outre, il y en eut ‑ et assez frŽquemment ‑ chez les chartistes anglais partisans de la violence physique sous la dictature de O'Connor [23]. Cependant, les chartistes formaient un parti directement en vue d'un coup de force, comme l'indiquait leur nom, et Žtaient soumis de ce fait ˆ une dictature, de sorte que l'exclusion y Žtait une mesure d'ordre militaire. En temps de paix, en revanche, je n'ai connaissance d'aucune faon de procŽder aussi arbitraire, si ce n'est celle de Ç lÕorganisation ferme et rigoureuse È des lassallŽens de von Schweitzer : celui-ci en avait besoin, ˆ cause de ses frŽquentations douteuses avec la police de Berlin pour accŽlŽrer la dŽsorganisation de son Association gŽnŽrale des ouvriers allemands. Parmi les partis socialistes ouvriers actuels, il n'en est probablement pas un seul qui aurait l'idŽe de traiter d'aprs le modle danois une opposition qui se dŽvelopperait dans son sein, ˆ prŽsent que Monsieur Rosenberg vient de se liquider heureusement lui-mme en AmŽrique [24].

 

La vie et la croissance de tout parti impliquent le dŽveloppement en son sein de tendances plus modŽrŽes et plus extrmes qui se combattent, et , quiconque exclut purement et simplement la plus extrme ne fait qu'accŽlŽrer le dŽveloppement de celle-ci. Le mouvement ouvrier se fonde sur la critique la plus radicale de la sociŽtŽ existante. Cette critique est son ŽlŽment vital : comment pourrait-il, dans ces conditions, s'abstraire lui-mme de la critique et chercher ˆ interdire la discussion ? Demandons-nous donc simplement aux autres la libertŽ de parole ˆ notre profit... pour l'abolir de nouveau dans nos propres rangs ?

 

 

DŽveloppement du parti en AmŽrique

 

 

Votre grand obstacle en AmŽrique rŽside, me semble-t-il, dans la position exceptionnelle des ouvriers nŽs dans le pays. Jusqu'en 1848, on ne pouvait parler d'une classe ouvrire, indigne et permanente, qu'ˆ titre exceptionnel : les quelques ŽlŽments de ce genre dans l'Est, les villes, pouvaient toujours encore espŽrer devenir paysans ou bourgeois [25]. Une telle classe s'est dŽsormais formŽe et s'est aussi, en grande partie, organisŽe sur le plan syndical. Mais elle occupe toujours une position d'aristocratie et abandonne, autant qu'elle le peut, les emplois ordinaires et mal payŽs aux ŽmigrŽs, dont une faible partie seulement adhre aux syndicats.

 

Mais ces ŽmigrŽs sont divisŽs en une multitude de nationalitŽs ; ils ne se comprennent pas entre eux, et souvent ne parlent mme pas la langue de leur pays. Il se trouve, en outre, que votre bourgeoisie sait ‑ beaucoup mieux mme que le gouvernement autrichien ‑jouer une nationalitŽ contre l'autre : Juifs, Italiens, Bohmes, etc., contre Allemands et Irlandais, et chacun d'eux contre les autres, au point qu'ˆ New York il y a des diffŽrences de niveau de vie qui partout ailleurs para”traient invraisemblables.

 

Ë cela vient s'ajouter l'indiffŽrence totale d'une sociŽtŽ nŽe sur une base purement capitaliste et ne connaissant donc pas un arrire-plan fŽodal de savoir-vivre paisible et confortable, n'Žtant rŽgie que par la lutte pour la concurrence qui Žtouffe toute vie humaine : il y en a tant et plus de ces maudits dutchmen, Irlandais, Italiens, Juifs et Hongrois, sans parler de John Chinaman qui se profile ˆ l'horizon et les dŽpasse tous de loin pour ce qui est de sa capacitŽ de vivre de trois fois rien.

 

Dans un tel pays, il est inŽvitable que le mouvement procde par Žlans successifs, suivis de revers tout aussi certains. Seulement les Žlans deviennent nŽanmoins toujours plus gigantesques, et les rŽactions toujours moins paralysantes. En gros, la cause avance donc malgrŽ tout.

 

Mais je tiens une chose pour assurŽe : la base purement bourgeoise, dŽpourvue de tous les leurres prŽ-bourgeois, la colossale Žnergie correspondante de l'Žvolution qui se manifeste mme dans les abus insensŽs de l'actuel systme de protectionnisme douanier, tout cela suscitera un jour un tournant qui provoquera la stupŽfaction du monde entier. Le jour o les AmŽricains se mettront en branle, ce sera avec une Žnergie et une violence par rapport auxquelles nous ne serons que des enfants en Europe.

 

Avec mes meilleures salutations.

 

Ton F. E.

 

 

Quelles que soient les gaffes et l'Žtroitesse d'esprit des chefs du mouvement et mme, en partie aussi, des masses qui viennent de s'Žveiller, une chose est certaine : la classe ouvrire amŽricaine est indubitablement entrŽe en mouvement [26]. Le fait que la lutte de classe ait ŽclatŽ en AmŽrique signifie pour les bourgeois du monde entier exactement ce que signifierait l'effondrement du tsarisme russe pour les grandes monarchies militaires d'Europe : l'Žbranlement de la base sur laquelle ils Žvoluent. En effet, l'AmŽrique a, de tout temps, ŽtŽ l'idŽal de tous les bourgeois : un pays grand, riche et toujours en essor, avec des traditions purement bourgeoises, aux institutions vierges de tous vestiges fŽodaux ou de traditions monarchistes et sans un prolŽtariat permanent, de pre en fils. Ici, tout le monde pouvait devenir, sinon capitaliste, du moins, en tout cas, un homme indŽpendant qui produit ou trafique pour son propre compte avec ses moyens propres. Et comme, jusqu'ˆ prŽsent, il n'y a pas eu de classes aux intŽrts opposŽs, notre ‑ et votre ‑ bourgeois pensait que l'AmŽrique se trouvait au-dessus des antagonismes et luttes de classes.

 

Or, cette illusion est ˆ prŽsent dŽtruite. Le paradis bourgeois sur terre se transforme ˆ vue d'Ïil en un purgatoire et, comme en Europe, il ne peut tre prŽservŽ de sa transformation en un enfer que par un dŽveloppement tumultueux du prolŽtariat amŽricain dont les ailes viennent tout juste de pousser.

 

 

La manire dont il est apparu sur la scne est tout ˆ fait extraordinaire : il y a six mois. ˆ peine, personne ne s'en doutait le moins du monde, et le voilˆ qui appara”t aujourd'hui en des masses si organisŽes que toute la classe des capitalistes est saisie de terreur. J'eusse aimŽ que Marx vive encore cet ŽvŽnement !

 

 

Les btises que font les anarchistes en AmŽrique peuvent nous tre utiles [27]. II n'est pas souhaitable qu'ˆ leur actuel niveau de pensŽe, encore tout ˆ fait bourgeois, les ouvriers amŽricains obtiennent de trop rapides succs avec leurs revendications de hauts salaires et de temps de travail moindre. Cela pourrait renforcer plus qu'il ne faut l'esprit syndicaliste unilatŽral.

 

Je ne puis comprendre pourquoi Decazeville s'est effondrŽ si brusquement, d'autant plus que Paul (Lafargue), tel NapolŽon aprs l'incendie de Moscou, a cessŽ subitement de m'envoyer Le Cri du peuple juste au moment critique [28]. L'esprit parisien est-il donc absolument incapable d'enregistrer les choses dŽsagrŽables qu'on ne peut empcher d'arriver ? Une victoire ˆ Decazeville ežt ŽtŽ une trs belle chose, mais une dŽfaite, aprs tout, ne pourrait-elle pas tre en dŽfinitive encore plus utile au mouvement ? Ainsi, je crois que les btises anarchistes de Chicago seront utiles en fin de compte. Si l'actuel mouvement amŽricain (qui, dans la mesure o il n'est pas allemand, se trouve toujours encore au niveau syndicaliste) avait remportŽ une grande victoire sur le problme des huit heures, le syndicalisme y serait devenu un dogme rigide et dŽfinitif, tandis qu'un rŽsultat mitigŽ contribuera ˆ dŽmontrer qu'il faut aller au-delˆ du mot d'ordre : Ç Des salaires ŽlevŽs et une journŽe de travail plus courte [29]. È


 

 

Le parti en Angleterre

 

 

Le mouvement anglais ressemble toujours ˆ l'amŽricain, ˆ cela prs qu'il le devance un peu [30]. L'instinct de la masse des ouvriers, selon lequel ils doivent constituer un parti autonome vis-ˆ-vis des deux partis officiels, devient de plus en plus fort et s'est manifestŽ une fois de plus lors des Žlections municipales du 1er novembre. Mais il se trouve que les vieilles rŽminiscences et traditions, ainsi que le manque d'hommes capables de transformer cet instinct en action consciente et d'organiser ces forces ˆ l'Žchelle de tout le pays, contribuent ˆ les maintenir dans ce stade prŽalable de l'indŽcision de la pensŽe et de l'isolement local de l'action. Le sectarisme anglo-saxon rgne aussi dans le mouvement ouvrier. La FŽdŽration social-dŽmocrate, de mme que votre parti socialiste ouvrier allemand [d'AmŽrique] [31], a rŽussi le tour de force de transformer notre thŽorie en un dogme rigide d'une secte orthodoxe. Elle est mesquinement hermŽtique et a, en outre, gr‰ce ˆ Hyndman, une prŽsence sur la scne politique internationale, o elle cultive toutes les traditions pourries que l'on parvient de temps ˆ autre ˆ Žbranler, mais que l'on n'a pas encore extirpŽes jusqu'ici.

 

 

Ici [en Angleterre], la pagaille et le laisser-aller parmi les diffŽrentes petites fractions se poursuivent encore pour l'heure [32]. Il y a moins de chaleur dans les chamailleries, mais les intrigues dans les coulisses sont d'autant plus actives. En revanche, la poussŽe instinctive des masses vers le socialisme devient activitŽ de plus en plus vive, consciente, unitaire. Les masses, bien que moins conscientes que certains chefs, sont cependant meilleures que tous les chefs rŽunis ; seulement le procs de la prise de conscience est plus lent que partout ailleurs, parce que tous les vieux chefs ont plus ou moins intŽrt ˆ dŽvier la conscience qui est en train de lever, dans telle ou telle direction particulire, voire de la fausser. Eh bien, il faut encore avoir de la patience.

 

 

Tentative de formation du parti

 

 

Je vous ai renvoyŽ hier votre programme avec mes remarques qui vous seront peut-tre utiles [33].

 

Ce que vous dites ˆ propos des dirigeants des syndicats est tout ˆ fait juste. Depuis la crŽation de l'Internationale, nous avons dž les combattre. C'est d'eux que proviennent les Macdonald, Burts, Cremer et Howell, et leur succs sur le plan parlementaire encourage les petits chefs ˆ imiter leur exemple. Si vous pouviez parvenir ˆ ce que les syndicalistes du Nord considrent leur syndicat comme un moyen prŽcieux pour organiser les ouvriers et arracher de petites conqutes, mais cessent de faire de la formule Ç un salaire Žquitable pour une journŽe de travail Žquitable È leur but final, alors on aura coupŽ court aux menŽes des chefs [34].

 

Je tiens votre plan d'organisation pour prŽmaturŽ : il faudrait d'abord que la province se mette sŽrieusement en branle, et cela n'est pas encore le cas, et de loin. Tant qu'il n'existe pas en province une force puissante, qui pse sur Londres, les trublions londoniens ne seront pas rŽduits au silence ‑ ce qui ne peut s'opŽrer que par un vŽritable mouvement des masses londoniennes. Ë mon avis, on a manifestŽ trop d'impatience au sein de ce que l'on appelle poliment le mouvement socialiste : tenter de nouvelles expŽriences socialistes sera plus que vain tant qu'il n'y aura rien ˆ organiser. Et lorsque les masses se mettront une :bonne fois en mouvement, elles Žprouveront elles-mmes le besoin de s'organiser.

 

En ce qui concerne la League ‑ si elle maintient la rŽsolution de sa dernire confŽrence ‑, je ne vois pas comment quelqu'un pourrait en rester membre s'il veut utiliser comme moyen de propagande et d'action la machine politique existante.

 

En attendant, il faut naturellement continuer ˆ faire de la propagande, et je suis tout ˆ fait disposŽ ˆ y contribuer pour ma part. Mais les moyens ˆ cet effet doivent tre rassemblŽs et rŽpartis par un comitŽ anglais, voire un comitŽ londonien dans la mesure o cela se fait ˆ Londres.

 

Je ne connais pas d'ouvrages qui pourraient vous donner des informations sur le mouvement des luddites : ce sera un travail trs complexe que de trouver des sources dignes de foi ˆ partir des livres d'histoire et d'Žcrits datant de cette pŽriode.

 

Votre dŽvouŽ

 

Signature

 

 

Votre lettre ne peut avoir qu'une seule signification, ˆ savoir, pour autant que cela est dans vos possibilitŽs, chasser Aveling du mouvement [35]. Si vous refusez de continuer ˆ collaborer avec Aveling pour des raisons politiques, vous avez le devoir de les exhiber ouvertement, ou bien pour donner ˆ Aveling la possibilitŽ de se justifier, ou bien, en revanche, pour dŽbarrasser le mouvement d'un collaborateur indigne et dangereux. S'il n'en est pas ainsi, vous avez le devoir, ˆ mon avis, de rŽprimer vos sentiments personnels dans l'intŽrt du mouvement.

 

De tous les diffŽrents groupes socialistes d'Angleterre, le seul avec lequel je pouvais sympathiser vraiment jusqu'ici Žtait l'actuelle Ç opposition È dans la League. Mais, si l'on admet que ce groupe se dŽsagrge simplement pour des lubies et chamailleries personnelles, ou pour des racontars ou suspicions internes que l'on Žvite soigneusement de porter ˆ la lumire du jour, il Žclatera immanquablement en une multitude de petites cliques qui ne tiennent ensemble que pour des motifs personnels, mais qui, en tout cas, sont totalement inadaptŽes ˆ un r™le dirigeant dans un mouvement ˆ un niveau national. Et je ne vois pas de raisons pour sympathiser davantage avec telle de ces cliques plut™t qu'avec telle autre, avec la FŽdŽration social-dŽmocrate ou un quelconque autre organisme.

 

Je n'ai pas le droit de vous demander pourquoi vous refusez de collaborer avec Aveling. Mais, comme vous avez travaillŽ ensemble durant des annŽes, il en a le droit, et je considre qu'il est de mon devoir de vous en informer par cette lettre.

 

 

Obstacles ˆ la formation du parti

 

 

Une chose est solidement assurŽe dans notre faon de procŽder pour tous les pays et temps modernes : amener les ouvriers ˆ constituer leur propre parti indŽpendant et opposŽ ˆ tous les partis bourgeois [36]. Pour la premire fois depuis longtemps, lors des dernires Žlections, les ouvriers anglais ‑ mme si ce n'est qu'instinctivement ‑ avaient fait un premier pas dŽcisif dans cette direction sous la pression des faits. Ce pas a eu un succs surprenant et a plus contribuŽ au dŽveloppement des consciences ouvrires qu'un quelconque ŽvŽnement de ces vingt, dernires annŽes.

 

Or, quelle a ŽtŽ l'attitude des Fabians ‑ non pas de tel ou tel d'entre eux, mais de la SociŽtŽ fabienne dans son ensemble ? Ils prchrent et pratiqurent le ralliement des ouvriers aux LibŽraux, et il arriva ce qui devait arriver : les LibŽraux attriburent aux Fabians quatre siges absolument impossibles ˆ conquŽrir, et les candidats fabians furent battus avec Žclat. Le littŽrateur des paradoxes, Shaw ‑ Žcrivain au reste plein de talent et d'humour, mais absolument incapable en Žconomie et en politique, mme s'il est parfaitement honnte et dŽpourvu d'ambition ‑, Žcrivit ˆ Bebel : s'ils n'avaient pas suivi cette politique, ˆ savoir d'imposer leurs candidats aux LibŽraux, ils n'eussent rŽcoltŽ que la dŽfaite et la honte (comme si la dŽfaite n'Žtait pas, bien souvent, plus honorable que la victoire) ‑ et maintenant ils ont suivi leur politique et ont rŽcoltŽ les deux.

 

Tel est le noyau de toute la question. Au moment o, pour la premire fois depuis longtemps, les ouvriers manifestent leur indŽpendance, la SociŽtŽ fabienne leur prche de continuer ˆ former la queue des LibŽraux. Et c'est ce qu'il faut dire ouvertement aux socialistes du continent : travestir cette vŽritŽ reviendrait ˆ partager sa responsabilitŽ. Et c'est pourquoi j'ai ŽtŽ peinŽ de constater que l'article postŽrieur aux Žlections des Aveling n'ait pas ŽtŽ publiŽ [37]. Il ne s'agissait pas de rŽflexions faites aprs coup, ni d'un article b‰clŽ ˆ toute vitesse au dernier moment. L'article n'est pas complet s'il n'explique pas l'attitude de ces deux organisations socialistes au cours des Žlections ‑ et les lecteurs de la Neue Zeit Žtaient en droit de l'apprendre.

 

Je crois t'avoir dit dans ma dernire lettre que, dans la FŽdŽration social-dŽmocrate aussi bien que dans la SociŽtŽ fabienne, les membrŽs de la province Žtaient meilleurs que ceux des organisations centrales. Mais cela ne sert de rien, tant que la position des organismes centraux dŽtermine celle de la SociŽtŽ. De tous les autres fameux membres ‑ hormis Banner ‑, aucun ne m'est connu. Comme par hasard, Banner n'est plus venu me voir une seule fois depuis qu'il est entrŽ dans la SociŽtŽ fabienne. Je suppose que ce lui l'a poussŽ ˆ y adhŽrer, c'est qu'il a ŽtŽ dŽgožtŽ de la FŽdŽration social-dŽmocrate et Žprouvait le besoin d'une autre organisation, tout cela s'accompagnant de pas mal d'illusions. Mais cette hirondelle ne fait pas le printemps.

 

Il y a, ˆ bien la considŽrer, quelque chose d'inachevŽ dans la SociŽtŽ fabienne ; en revanche, ses adhŽrents sont compltement achevŽs : une clique de Ç socialistes È bourgeois de tous les calibres, depuis l'ambitieux au socialiste par instinct et philanthrope, soudŽs uniquement par leur peur de la menace croissante d'une domination ouvrire et unissant tous leurs forces ,pour briser la pointe ˆ cette menace en prenant sa direction, une direction de gens Ç cultivŽs È. Mme s'ils admettent ensuite une paire d'ouvriers dans leur Conseil central pour y jouer le r™le de l'ouvrier Albert de 1848, en Žtant constamment en minoritŽ dans les votes, cela ne devrait tromper personne.

 

Les moyens qu'emploie la SociŽtŽ fabienne sont tout ˆ fait ceux de la politique parlementariste pourrie : vŽnalitŽ, nŽpotisme, arrivisme, c'est-ˆ-dire des moyens anglais, d'aprs lesquels il va de soi que tout parti politique (ce n'est que chez les ouvriers qu'il doit en tre autrement) rŽmunre ses agents de telle ou telle faon ou les paie en leur offrant des postes. Ces gens sont enfoncŽs jusqu'au cou dans les combines avec les LibŽraux ou ont des fonctions dans le parti libŽral, comme par exemple Sidney Webb qui, en tous points, est un authentique politicien britannique. Tout ce contre quoi il faut prŽvenir les ouvriers, ces gens le pratiquent.

 

Cela Žtant, je ne te demanderais pas forcŽment de traiter ces gens en ennemis. Mais, ˆ mon avis, tu ne dois pas t'abstenir davantage de les critiquer, fais donc pour eux ce que tu ferais pour n'importe quel autre. Or, c'est le contraire que suggŽrait l'Žlimination des passages, dont je t'ai envoyŽ la copie, de l'article des Aveling [38]. Si tu dŽsires que les Aveling t'envoient un article sur l'histoire et les positions des diverses organisations socialistes d'Angleterre, il suffit que tu le dises, et je leur proposerai.

 

Ton article sur Vollmar m'a beaucoup plu. Il lui fera plus d'effet que toutes les chamailleries dans le VorwŠrts. De mme, l'Žternelle menace de le ficher dehors ne devrait pas rester plus longtemps sans effets. II s'agit lˆ de rŽminiscences ‑ aujourd'hui dŽpassŽes ‑ de l'Žpoque de dictature de la loi antisocialiste. On peut, aujourd'hui, laisser le temps aux ŽlŽments corrompus de pourrir jusqu'au point o ils tombent d'eux-mmes. Un parti groupant des millions de personnes a une tout autre discipline qu'une secte de centaines de membres. Ce que tu aurais pu expliciter davantage dans ton article, c'est comment Ç le socialisme d'ƒtat en soi È se transforme nŽcessairement dans la pratique en fiscalitŽ [39], surtout dans le seul pays o il soit pratiquement possible, en Prusse (ce que tu as fort bien dŽveloppŽ).

 

De mme, la critique que Bernstein a faite de Proudhon Žtait excellente, je me rŽjouis surtout de voir qu'il est redevenu ce qu'il Žtait [40].

 

 

Corruption des chefs ouvriers

 

 

Ce qu'Aveling vient de me communiquer oralement me confirme dans le soupon que j'avais depuis longtemps, ˆ savoir que Keir Hardie aspire en silence ˆ diriger le nouveau parti de manire dictatoriale, ˆ la manire de Parnell vis-ˆ-vis des Irlandais, tandis que ses sympathies s'orientent plut™t vers le parti conservateur que le parti libŽral [41]. N'affirme-t-il pas publiquement qu'ˆ l'occasion des prochaines Žlections il faut renouveler l'expŽrience de Parnell, afin d'amener Gladstone ˆ se plier ˆ une nouvelle politique, et qu'ˆ chaque fois qu'on ne peut prŽsenter une candidature ouvrire, il faut voter pour les Conservateurs, afin de .montrer sa force aux LibŽraux [42]. Or, c'est lˆ une politique que, dans certaines circonstances, j'ai demandŽ moi-mme aux Anglais de pratiquer, mais si, d'emblŽe, on ne considre pas cela comme un coup tactique possible, et on proclame ˆ l'avance que c'est une tactique ˆ suivre dans tous les cas, on y flaire un fort relent ˆ la Champion [43].

 

On le sent notamment lorsqu'en mme temps K. Hardie parle avec mŽpris de l'extension du suffrage universel et d'autres rŽformes, gr‰ce auxquelles seulement les votes ouvriers auront une rŽalitŽ, comme s'il s'agissait de simples choses politiques qui viennent bien aprs les revendications sociales, les huit heures, la protection ouvrire, etc. En disant cela, il laisse dŽlibŽrŽment de c™tŽ la question de savoir comment il veut obtenir ces revendications sociales, puisqu'il renonce ˆ les obtenir par la force que reprŽsentent les dŽputŽs ouvriers, et ne compte plus que sur la gr‰ce des bourgeois, voire sur la pression indirecte des voix ouvrires dŽcisives dans les Žlections. J'attire ton attention sur ce point obscur, afin que tu en tiennes compte ˆ l'occasion. Pour l'heure, je n'attribue pas une importance exagŽrŽe ˆ cette affaire, Žtant donnŽ que Keir Hardie, dans le pire des cas, fait une grossire erreur de calcul, car les ouvriers des districts industriels du nord de l'Angleterre ne sont pas des moutons que lÕon amne aux urnes pour voter en bloc sans parler de ce qu'il se heurtera ˆ une rŽsistance suffisante au comitŽ exŽcutif. Mais il ne faut pas ignorer une telle tendance.

 

 

Keir Hardie vient ici d'intervenir au Parlement en faveur des ch™meurs, en prŽsentant un amendement ˆ l'Adresse (rŽponse au discours du tr™ne) [44]. En soi, c'Žtait tout ˆ fait bien, mais il a fait deux gaffes Žnormes : 1. Si l'amendement Žtait conu comme vote direct de mŽfiance, il Žtait tout ˆ fait vain, puisque son adoption aurait forcŽ le gouvernement ˆ se retirer, et toute lÕaffaire aurait profitŽ aux Conservateurs ; 2. Il se fit seconder par le conservateur de tendance protectionniste Howard Vincent, au lieu de choisir un reprŽsentant ouvrier, ce qui en faisait compltement une manÏuvre conservatrice et le prŽsentait mme comme une marionnette entre les mains des Conservateurs. De fait aussi, 102 conservateurs et seulement 2 radicaux-libŽraux [45] ont votŽ pour lui, et pas un seul reprŽsentant ouvrier. Pour sa part, Burns faisait de l'agitation dans le Yorkshire.

 

Comme je te l'ai dŽjˆ Žcrit, depuis la ConfŽrence de Bradford, il a dŽjˆ fait plusieurs manÏuvres et dŽclarations o perce l'influence de Champion : maintenant, cela devient encore plus suspect. On ne sait d'o il tire ses moyens d'existence, et il a dŽpensŽ beaucoup d'argent ces deux dernires annŽes : quelle en est l'origine ? Au reste, les ouvriers anglais exigent de leurs dŽputŽs ou dirigeants qu'ils sacrifient tout leur temps au mouvement, mais ils ne veulent pas les payer, de sorte qu'ils sont eux-mmes responsables lorsqu'ils tirent d'autres partis l'argent qu'il leur faut pour vivre ou pour prŽparer les Žlections. Tant que cela durera, il y aura des trafics parmi les dirigeant ouvriers de ce pays.

 

 

Le Parti travailliste indŽpendant est tout ˆ fait indŽcis dans le choix de sa tactique, et son dirigeant, Keir Hardie, un ƒcossais, un super-malin, utilise des artifices dŽmagogiques auxquels on ne peut absolument pas faire confiance [46]. Bien que ce soit un pauvre diable de mineur Žcossais, il vient de crŽer un grand hebdomadaire, The Labour Leader, pour lequel il a eu besoin de pas mal d'argent. Or, cet argent lui est venu des milieux conservateurs, voire des libŽraux-unionistes, soit de ceux qui s'opposent ˆ Gladstone et ˆ sa loi sur le Home Rule. Cela ne fait absolument aucun doute, et ses liaisons littŽraires notoires de Londres, les informations directes qu'il publie, ainsi que ses positions politiques, le confirment. En consŽquence, si les Žlecteurs irlandais et radicaux le laissent tomber, il se peut fort bien qu'il perde son sige au Parlement lors des Žlections gŽnŽrales de 1895 [47], et ce serait une bonne chose, car cet homme est actuellement un trs grand obstacle. Il n'appara”t que dans les occasions dŽmagogiques au Parlement : pour faire l'important avec des discours sur les ch™meurs, sans obtenir le moindre rŽsultat, ou pour dire des sottises ˆ l'occasion de la naissance d'un prince, ce qui est un truc tout ˆ fait usŽ et bon marchŽ dans ce pays, etc.

 

 

CrŽation de la IIe Internationale

 

 

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Nous avons rŽflŽchi ˆ ta proposition, et nous pensons que le moment n'est pas encore venu de la mettre en exŽcution, mais qu'il approche [48].

 

Premirement, une nouvelle Internationale, formellement rŽorganisŽe, ne ferait que susciter de nouvelles persŽcutions en Allemagne, Autriche, Hongrie, Italie et Espagne, et ne nous laisserait finalement que le choix entre laisser tomber l'affaire bient™t ou l'entreprendre secrtement. Ce dernier procŽdŽ serait un malheur ˆ cause des inŽvitables vellŽitŽs de conspiration ou de putsch, ainsi que les inŽvitables mouchards qui s'infiltreraient dans nos rangs. Mme en France, il n'est pas impossible que la loi contre l'Internationale, qui n'a nullement ŽtŽ abolie, entre de nouveau en application.

 

Deuximement, Žtant donnŽ les actuelles chamailleries entre L'ƒgalitŽ et Le ProlŽtaire, il n'est pas possible de compter sur les Franais. Il faudrait, en effet, se dŽclarer pour l'un des partis, ce qui a aussi ses mŽchants c™tŽs. En ce qui nous concerne personnellement, nous sommes du c™tŽ de L'ƒgalitŽ, mais nous nous gardons bien d'intervenir publiquement en ce moment, ne serait-ce que, malgrŽ nos avertissements exprs, parce qu'elle fait gaffe sur gaffe sur le plan tactique.

 

Troisimement, moins que jamais on ne saurait actuellement entreprendre quelque chose avec les Anglais. Durant cinq mois, j'ai tentŽ, par le truchement du Labour Standard, dans lequel j'ai Žcrit une sŽrie d'Žditoriaux, de renouer avec le vieux mouvement chartiste et de diffuser nos idŽes, afin de voir s'il y a quelque Žcho. Absolument rien ! Cependant, comme le directeur [49] ‑ plein de bonne volontŽ, mais faible, une vŽritable savate ! ‑finit tout de mme par prendre peur des doctrines Ç hŽrŽtiques È provenant du continent que j'Žcrivais dans sa feuille, je dus renoncer.

 

Il ne resterait donc plus qu'une Internationale qui ‑ en dehors de la Belgique ‑ se limiterait ˆ la seule Žmigration, puisqu'ˆ l'exception de Genve et de ses environs on ne pourrait pas compter non plus sur les Suisses ‑ vois la Arbeiterstimme et BŸrckli.

 

Au demeurant, l'Internationale continue effectivement de subsister. La liaison entre les ouvriers rŽvolutionnaires de tous les pays, pour autant qu'elle puisse tre efficace, est lˆ. Chaque journal socialiste est un centre socialiste ; de Genve, Zurich, Londres, Paris, Bruxelles, Milan, les fils courent et se croisent dans toutes les directions, et je ne vois vraiment pas en quoi le regroupement de tous ces petits centres autour d'un grand centre principal pourrait donner une force nouvelle au mouvement, cela ne ferait qu'augmenter les frictions. NŽanmoins, lorsque le moment sera venu o il importera de rassembler les forces, pour toutes ces raisons, il ne faudra pas une longue prŽparation.

 

Les noms de tous ceux qui forment l'avant-garde militante d'un pays sont connus de tous les autres, et un manifeste dans lequel tous seraient reprŽsentŽs et que tous signeraient ferait une impression colossale, toute diffŽrente de celle que fit celui o figuraient les noms, pour la plupart inconnus, de l'ancien Conseil gŽnŽral. Mais, prŽcisŽment pour toutes ces raisons, il faut ne pas galvauder une telle manifestation tant qu'elle ne peut avoir un effet percutant, autrement dit tant que des ŽvŽnements europŽens ne la provoqueront pas. Sinon, on g‰che l'effet pour l'avenir et on ne donne qu'un coup d'ŽpŽe dans l'eau.

 

Or, de tels ŽvŽnements se prŽparent en Russie, o l'avant-garde de la rŽvolution trouvera ˆ frapper un grand coup. Cela et son contre-coup inŽvitable en Allemagne, il faut savoir l'attendre, et ‑ ˆ notre avis ‑le moment sera venu alors aussi pour une grande manifestation et la reconstitution d'une Internationale formelle, officielle, qui justement ne saurait plus tre une simple sociŽtŽ de propagande, mais un parti pour l'action. C'est pourquoi nous sommes dŽcidŽment de l'avis qu'il ne faut pas affaiblir un organe de lutte aussi remarquable, en en usant (et en abusant) ˆ une Žpoque encore relativement tranquille, mais ˆ la veille de la rŽvolution.

 

Je pense que si tu rŽflŽchis une nouvelle fois ˆ la chose, tu te rangeras ˆ notre avis. Jusque-lˆ, je vous souhaite ˆ tous deux un bon rŽtablissement, et j'espre avoir bient™t des nouvelles de toi m'annonant que tu es ˆ nouveau tout ˆ fait en forme.

 

Ton fidle F. E.

 

 

L'essentiel [dans la crŽation de la IIe Internationale], et cela a ŽtŽ pour moi le motif pour entrer dans le jeu, c'est que rŽappara”t la vieille coupure de l'Internationale, la vieille bataille de La Haye [50]. Les adversaires sont les mmes, sauf que l'enseigne anarchiste est changŽe pour l'enseigne possibiliste : commerce des principes avec la bourgeoisie contre des concessions de dŽtail, et surtout contre des postes bien payŽs pour les chefs (conseillers municipaux, bourses du travail, etc.). La tactique est tout ˆ fait la mme. Le manifeste de la Social Democratic Federation, Žvidemment Žcrit par Brousse, est une rŽŽdition de la circulaire de Sonviliers. Brousse le sait fort bien : il attaque le marxisme autoritaire, toujours avec les mmes mensonges et calomnies, et Hyndman l'imite ‑ ses sources principales concernant l'Internationale et l'action politique de Marx, ce sont les mŽcontents de l'ancien Conseil gŽnŽral, Eccarius, Jung et Cie...

 

Il m'a cožtŽ des peines infinies pour faire comprendre mme ˆ Bebel de quoi il s'agit vŽritablement, alors que les possibilistes le savent trs bien et le proclament tous les jours. Au milieu de toute cette agitation, j'avais peu d'espoir de voir les choses prendre une bonne tournure, que la raison immanente qui se dŽveloppe peu ˆ peu en conscience puisse vaincre maintenant.

 

Je me rŽjouis d'autant plus d'avoir la preuve que, tout de mme, des choses comme celles qui sont arrivŽes en 1873 et 1874 ne sont plus possibles. Les intrigants sont d'ores et dŽjˆ battus, et l'importance du congrs ‑ qu'il attire l'autre ˆ lui ou non ‑ rŽside en ce que l'unanimitŽ des partis socialistes d'Europe est manifeste aux yeux du monde entier et que quelques brouillons qui ne se soumettent pas resteront ˆ la porte, au frais.

 

Au demeurant, le congrs ne doit gure avoir d'importance. Je n'y assisterai pas naturellement ; je ne puis continuellement me relancer dans l'agitation. Mais les gens veulent maintenant recommencer ˆ jouer aux congrs et alors il vaut mieux qu'ils ne soient pas dirigŽs par Brousse et Hyndman. Il Žtait tout juste encore temps de leur mettre des b‰tons dans les roues...


 

Parti de masse :
question agraire et petite bourgeoisie

 

 

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Aprs dix-sept ans d'absence, j'ai retrouvŽ l'Allemagne totalement rŽvolutionnŽe, l'industrie a crž immensŽment par rapport ˆ ce qu'elle Žtait alors, et l'agriculture ‑ petite comme grande ‑ s'est considŽrablement amŽliorŽe [51]. Et en consŽquence de tout cela, notre mouvement est remarquablement en train. Nos gens ont dž conquŽrir eux-mmes le peu de libertŽ dont ils disposent : ils l'ont conquis notamment contre la police et l'administration de district, aprs que les lois correspondantes Žtaient dŽjˆ proclamŽes sur le papier. C'est pourquoi tu y trouves une assurance et une confiance en soi que l'on ne rencontre jamais chez les bourgeois allemands. En ce qui concerne les dŽtails, il reste, bien sžr, encore beaucoup ˆ critiquer ‑ par exemple, la presse du parti n'est pas ˆ la hauteur du parti, notamment ˆ Berlin. Mais les masses sont remarquables, et le plus souvent meilleures que les chefs ou, du moins, que bon nombre d'entre ceux qui sont parvenus ˆ une fonction dirigeante. Avec elles, tout peut tre fait ; elles ne se sentent heureuses que dans la lutte, elles ne vivent que pour la lutte et se languissent lorsque l'adversaire ne leur procure pas de travail. C'est un fait rŽel que la plupart des ouvriers salueraient une nouvelle loi antisocialiste avec un Žnorme rire de mŽpris, si ce n'est avec une joie rŽelle, car ils auraient alors ˆ faire chaque jour quelque chose de nouveau.

 

Pour rŽjouissants que soient pour moi les signes de la rŽvolution qui a transformŽ la ville de Barmen du temps de ma jeunesse, ce petit nid de philistins, en une grande citŽ industrielle, ce qui me touche le plus cependant, c'est le fait que les hommes aussi se soient considŽrablement transformŽs ˆ leur avantage. En effet, si ce n'Žtait pas le cas, Barmen serait, aujourd'hui encore, reprŽsentŽe au Reichstag par un ultra-conservateur, il n'y serait pas question d'une association social-dŽmocrate, et il serait encore moins venu ˆ l'idŽe des ouvriers de Barmen de m'honorer comme ils l'ont fait. Mais, heureusement, la rŽvolution matŽrielle dans la ville correspond aussi ˆ la rŽvolution dans la tte des ouvriers, et celle-ci recle une rŽvolution encore plus immense et radicale dans tout l'ordre social.

 

 

Il est remarquable combien toutes ces Ç couches cultivŽes È sont enfermŽes dans leur cercle social [52]. Ces bavards du centre et de la libre pensŽe. qui restent encore maintenant dans l'opposition, reprŽsentent les paysans, les petits-bourgeois, voire parfois les ouvriers. Et chez ceux-ci, la colre contre les charges fiscales croissantes ainsi que la presse vŽnale existe indubitablement. Mais cette colre populaire est transmise ˆ messieurs les reprŽsentants du peuple par le truchement des couches cultivŽes ‑ avocats, curŽs, commerants, professeurs, docteurs, etc. ‑, c'est-ˆ-dire des gens qui, en raison de leur instruction plus universelle, voient un tout petit peu plus loin que les masses du parti, ont appris suffisamment pour savoir qu'un grand conflit entre le gouvernement et nous broiera tout ce monde, ce qui explique qu'ils veulent transmettre aux gens du Reichstag une colre populaire attŽnuŽe ‑ sous forme uniquement de compromis.

 

Naturellement, ils ne voient pas que cette faon de renvoyer ˆ plus tard les conflits pousse les masses vers nous, et nous donne donc la force de mener le conflit jusqu'au bout, lorsqu'il viendra.

 

 

Assimilation de couches
non prolŽtariennes dans le parti

 

 

Les chamailleries dans le parti ne m'affligent gure il vaut mieux que ces choses arrivent de temps en temps et Žclatent carrŽment une bonne fois, plut™t que de voir les gens s'endormir [53]. C'est prŽcisŽment l'extension toujours croissante et irrŽsistible du parti qui fait que les derniers venus sont plus difficiles ˆ digŽrer que les prŽcŽdents. N'avons-nous pas dŽjˆ dans nos rangs les ouvriers des grandes villes, qui sont les plus intelligents et les plus Žveilles ? En consŽquence, ceux qui arrivent maintenant sont ou bien les ouvriers des petites villes et des districts ruraux ou bien des Žtudiants, petits employŽs, etc., ou enfin des petits-bourgeois et artisans campagnards qui luttent contre le dŽclin et possdent en propre ou en bail un petit bout de terre et, ˆ prŽsent, par-dessus le marchŽ encore, de vŽritables petits paysans.

 

Il se trouve que notre parti est le seul qui soit encore authentiquement de progrs et, en mme temps, soit assez puissant pour imposer de force le progrs, de sorte que les gros et moyens paysans endettŽs et en rŽbellion sont tentŽs de t‰ter un peu du socialisme, notamment dans des rŽgions o ils prŽdominent ˆ la campagne.

 

Ce faisant, notre parti dŽpasse sans doute largement les limites de ce que permettent les principes, et cela suscite polŽmiques, mais notre parti a une constitution assez saine pour qu'elles ne lui soient pas nŽfastes.

 

Nul n'est assez bte pour vouloir sŽrieusement se sŽparer de la grande masse du parti, et nul n'est prŽtentieux au point de croire qu'il pourrait constituer encore un petit parti privŽ, semblable ˆ celui du Parti populaire souabe [54] qui, avec beaucoup de chance, avait rŽussi ˆ rassembler sept Souabes sur onze. Toutes ces chamailleries ne feront que causer des dŽceptions aux bourgeois qui escomptent une scission depuis vingt ans dŽjˆ, mais font en mme temps tout ce qu'il faut pour nous l'Žviter. De mme, ˆ prŽsent, pour le projet de loi rŽprimant la presse socialiste, o Liebknecht a l'occasion de dŽfendre les droits du Reichstag et de la Constitution face aux menaces de coups d'ƒtat et de violation des droits. Nous faisons certainement aussi pas mal de btises, mais pour permettre ˆ de tels adversaires de nous vaincre, il faudrait vraiment que nous fassions des gaffes grosses comme des montagnes, gaffes que tout lÕor du monde ne serait pas en mesure d'acheter.

 

Au reste, ton plan de cŽder ˆ l'occasion la direction du parti ˆ la jeune gŽnŽration afin qu'elle s'aguerrisse n'est pas si mauvais. Mais elle arrivera aussi ˆ acquŽrir de l'expŽrience et ˆ dŽvelopper sa conscience sans cela.

 

 

Cher Liebknecht,

 

J'ai Žcrit ˆ Bebel, et je lui fais comprendre que, dans les dŽbats politiques, il fallait rŽflŽchir posŽment ˆ toutes les incidences possibles des questions et ne rien faire dans la h‰te, dans le premier Žlan ; il m'est ainsi arrivŽ ˆ moi-mme de me bržler les doigts ˆ plusieurs reprises [55]. En revanche, j'ai ˆ te faire ˆ ce propos une petite observation.

 

Que Bebel ait agi maladroitement au cours de la rŽunion, cela se discute, mais en substance il a tout ˆ fait raison [56]. AssurŽment, comme responsable politique de l'organe central de la presse, tu es tenu ˆ arrondir les angles, voire ˆ nier les divergences rŽelles qui peuvent survenir [57], ˆ rendre les choses acceptables pour tous les c™tŽs, ˆ agir pour l'unitŽ au sein du parti, jusqu'au jour de la scission. Du point de vue du journaliste, la manire de procŽder de Bebel peut te heurter. Mais ce qui peut tre dŽsagrŽable au rŽdacteur devrait combler d'aise le dirigeant de parti : ˆ savoir qu'il y ait des camarades ne portant pas toujours sur le nez les lunettes de service que doit absolument porter le rŽdacteur, pour rappeler au journaliste qu'en sa qualitŽ de dirigeant de parti, c'est une excellente chose qu'il enlve de temps en temps ses lunettes qui lui font voir l'harmonie pour considŽrer l'univers avec ses yeux, tout simplement.

 

Les Bavarois ont constituŽ formellement une ligue ˆ part ˆ Nuremberg [58], et se sont prŽsentŽs en tant que corps sŽparŽ devant le Congrs de Francfort. Ils y sont arrivŽs avec un ultimatum et nul ne pouvait s'y tromper. Pour complŽter le tout, Vollmar parle de marcher sŽparŽment, Grillo [59] dit : dŽcidez ce que vous voulez, nous n'obŽirons pas. Ils proclament que les Bavarois ont des droits particuliers, rŽservŽs, et dans le parti traitent leurs adversaires de Ç Prussiens È, de Ç Berlinois È [60]. Ils rŽclament que nous votions le budget et une politique paysanne allant bien au-delˆ de la droite, en direction petite-bourgeoise. Le congrs, au lieu de brandir Žnergiquement le b‰ton, comme il l'a toujours fait jusqu'ici, n'a pas osŽ prendre la moindre sanction. Si dans ces conditions, et comme l'a fait Bebel, le moment n'est pas venu de parler de pŽnŽtration d'ŽlŽments petits-bourgeois dans le parti, je me demande quand il viendra jamais.

 

Or, que fais-tu dans le VorwŠrts ? Tu t'accroches ˆ la forme de l'attaque de Bebel pour affirmer que tout cela n'est pas bien grave. NŽanmoins, tu te places, face ˆ lui, en une Ç opposition diamŽtrale È si forte que tu es contraint par les Ç malentendus È, suscitŽs inŽvitablement par cette situation chez les adversaires de Bebel, ˆ faire une dŽclaration selon laquelle ton Ç opposition diamŽtrale È ne porte que sur la forme donnŽe par Bebel ˆ sa polŽmique, et que sur le fond ‑ l'histoire du budget et la question paysanne ‑ il a raison et que tu te ranges ˆ ses c™tŽs. Je veux croire que le simple fait que tu aies ŽtŽ contraint postŽrieurement ˆ cette dŽclaration prouve ˆ tes yeux aussi que tu as fautŽ plus ˆ droite que Bebel n'a fautŽ ˆ gauche [61].

 

Dans toute la polŽmique, il ne s'agit en fin de compte que de l'action des Bavarois qui culmine dans les deux points suivants : l'opportunisme de la propagande de Vollmar en faveur de la ratification du budget afin d'attraper les petits-bourgeois, et la propagande de Vollmar ˆ la Dite en faveur de la propriŽtŽ paysanne afin d'attraper les gros et moyens paysans. Cela et la prise de position des Bavarois pour une ligue sŽparatiste reprŽsentent, en fait, les seules questions du litige, et si Bebel lance son attaque lˆ o le congrs a l‰chŽ le parti, vous devriez lui en tre reconnaissant [62]. S'il dŽcrit la situation intolŽrable crŽŽe par le congrs comme Žtant la consŽquence d'une mainmise croissante de la petite bourgeoisie sur le parti, il ne fait qu'expliquer cette question particulire par le juste point de vue gŽnŽral, et cela est encore mŽritoire et vaut d'tre saluŽ. Mme si le ton des dŽbats sur toutes ces questions a ŽtŽ forcŽ il n'a fait que son strict devoir, en Žtant prŽoccupŽ de ce que le prochain congrs juge en pleine connaissance de cause en une matire si essentielle, aprs qu'ˆ Francfort il se fut comportŽ ˆ ce, sujet comme une bourrique.

 

La menace d'une scission n'est pas du c™tŽ de Bebel qui appelle les choses par leur vŽritable nom. Elle est du c™tŽ des Bavarois qui se sont permis d'agir d'une faon inconcevable jusqu'ici dans le parti, au point que la Frankfurter Zeitung de la dŽmocratie vulgaire n'a pu dissimuler sa joie en reconnaissant les siens en Vollmar et ses partisans.

 

Tu prŽtends que Vollmar n'est pas un tra”tre. Cela se peut. Je ne pense pas non plus qu'il se considre comme tel. Mais comment appeler un homme qui se figure qu'un parti prolŽtarien garantit ˆ perpŽtuitŽ aux gros et moyens paysans de Bavire, possŽdant de 10 ˆ 30 hectares, leur condition actuelle qui reprŽsente la base de l'exploitation des domestiques de ferme et des journaliers agricoles. Un parti prolŽtarien, fondŽ spŽcialement pour perpŽtuer l'esclavage salarial ! Que cet homme soit un antisŽmite un dŽmocrate bourgeois, un particulariste bavarois ou Dieu sait quoi encore, c'est possible, mais un social-dŽmocrate, non ! Au reste, l'accroissement de l'ŽlŽment petit-bourgeois est inŽvitable dans un parti ouvrier en expansion, et cela n'est pas vraiment nuisible. Il en va de mme pour les Ç univer­sitaires È, les Žtudiants ayant ratŽ leurs examens, etc. Tout ce monde reprŽsentait une menace il y a quelques annŽes. Maintenant, nous pouvons les digŽrer. Mais encore faut-il laisser ce procs de digestion suivre son cours. Il faut pour cela des sucs digestifs. S'il n'y en a pas assez (comme on l'a constatŽ ˆ Francfort), il faut remercier Bebel s'il les y ajoute, afin que nous puissions digŽrer comme il faut les ŽlŽments non prolŽtariens.

 

C'est prŽcisŽment de la sorte qu'on rŽalise la vŽritable harmonie dans le parti, et non pas en niant ou en tuant par le silence toute controverse rŽelle qui surgit dans son sein.

 

Tu affirmes qu'il s'agit de Ç susciter l'action efficace È. Cela me fait trs plaisir, mais dis-moi quand donc l'action sera-t-elle dŽclenchŽe [63] ?

 

 

Tu trouveras ci-inclus le discours de Bebel ˆ Berlin et ses quatre articles contre Grillenberger et Vollmar [64]. Ce dernier Žpisode est des plus intŽressants. Les Bavarois (ou mieux la plupart des dirigeants et une grande partie des effectifs rŽcents), qui sont devenus trs, trs opportunistes, et constituent pratiquement dŽjˆ un parti populaire ordinaire, ont approuvŽ l'ensemble du budget ˆ la Dite bavaroise, et Vollmar notamment a lancŽ une agitation auprs des paysans pour attraper non pas les journalistes et ouvriers agricoles, mais les gros paysans possŽdant de 25 ˆ 80 acres de terre (10 ˆ 30 hectares) qui ne peuvent donc s'en tirer sans travailleurs salariŽs. Comme ils n'attendaient rien de bon du Congrs social-dŽmocrate de Francfort, ils organisrent huit jours avant sa tenue une rŽunion spŽciale du parti bavarois [65], et s'y constiturent littŽralement en ligue sŽparatiste, en dŽcidant que les dŽlŽguŽs bavarois voteraient en bloc d'aprs les rŽsolutions bavaroises, prises ˆ l'avance, sur toutes les questions concernant la Bavire. Ils arrivrent donc en dŽclarant qu'ils Žtaient tenus d'approuver l'ensemble du budget de Bavire, car il n'y avait pas autre chose ˆ faire, que c'Žtait lˆ, en outre, une question purement bavaroise, dans laquelle personne d'autre n'avait ˆ s'immiscer. En d'autres termes : si vous dŽcidez quelque chose de dŽsagrŽable pour la Bavire, vous rejetez notre ultimatum, et s'il devait alors en rŽsulter une scission, ce serait de votre faute !

 

C'est avec cette prŽtention insolite jusqu'ici dans notre parti qu'ils se sont prŽsentŽs devant les autres dŽlŽguŽs qui n'Žtaient pas prŽparŽs ˆ cette situation. Or, comme au cours de ces dernires annŽes on a poussŽ jusqu'ˆ l'extrme les criailleries pour l'unitŽ, il ne faut pas s'Žtonner que, face aux nombreux ŽlŽments qui sont venus grossir nos rangs ces derniers temps et ne sont pas encore tout ˆ fait formŽs, cette attitude inadmissible pour le parti ait pu passer sans recevoir le refus clair et net qu'elle mŽritait, et qu'il n'y ait eu aucune rŽsolution sur la question du budget.

 

Imagine-toi maintenant que les Prussiens, qui forment la majoritŽ au congrs, veuillent Žgalement tenir leur prŽ-congrs pour y dŽbattre de leur position vis-ˆ-vis des Bavarois ou pour prendre ‑quel‑que autre rŽsolution liant les dŽlŽguŽs prussiens, de sorte que tous ‑ majoritŽ aussi bien que minoritŽ ‑ votent en bloc pour ces rŽsolutions au Congrs gŽnŽral du parti : ˆ quoi servirait ds lors encore les congrs gŽnŽraux ?

 

Bref, l'affaire ne pouvait en rester lˆ, et Bebel a foncŽ dans le tas. Il a remis tout simplement la question ˆ l'ordre du jour, et on est en train d'en dŽbattre en ce moment. Bebel est de loin le plus clairvoyant et le plus profond de tous. Voilˆ quelque quinze ans que je corresponds rŽgulirement avec lui, et nous tombons presque toujours d'accord. Liebknecht, en revanche, est trs dessŽchŽ et peu permŽable aux idŽes : le vieux dŽmocrate particulariste et fŽdŽraliste du sud de l'Allemagne perce toujours encore chez lui, et ce qu'il y a de pire il ne peut supporter que Bebel ‑ qui le dŽpasse depuis longtemps ‑ l'admette volontiers ˆ ses c™tŽs, certes, mais ne veuille plus se laisser diriger par lui. En outre, il a si mal organisŽ l'organe central du VorwŠrts ‑ surtout parce qu'il est jaloux de son leadership, ce qui l'amne ˆ vouloir tout diriger et, ne dirigeant rien en rŽalitŽ, ne fait que causer du dŽsordre ‑ que ce journal, qui pourrait tre le premier ˆ Berlin, est tout juste bon ˆ procurer 50 000 marks d'excŽdents au parti, mais ne fait gagner aucune influence politique. Liebknecht veut naturellement ˆ toute force jouer ˆ l'arbitre maintenant, et s'en prend ˆ Bebel, qui pour moi finira par avoir raison. Ë Berlin, la direction ainsi que les ŽlŽments les meilleurs sont dŽjˆ de son c™tŽ, et je suis persuadŽ que s'il en appelle ˆ la masse du parti, il obtiendra la grande majoritŽ. Je voudrais aussi t'envoyer les Žlucubrations de Vollmar, etc., mais je ne dispose que d'un exemplaire pour mon usage propre.

 

 

Bebel a triomphŽ [66]. Vollmar a commencŽ par rompre la discussion aprs les articles de Bebel, puis son appel ˆ la direction a ŽtŽ repoussŽ avec Žnergie, enfin, lorsqu'il en a appelŽ ˆ la fraction (parlementaire), celle-ci, que Bebel avait dŽclarŽ incompŽtente, a reconnu son incompŽtence, de sorte que l'affaire sera inscrite ˆ l'ordre du jour du prochain congrs, o Bebel est assurŽ d'avoir une majoritŽ des deux tiers, voire les trois quarts.

 

C'est la troisime campagne de Vollmar pour conquŽrir un poste dirigeant dans le parti hors de Bavire. La premire fois, il avait demandŽ que nous apportions un soutien actif ˆ Caprivi, en devenant des socialistes de gouvernement [67]. La seconde fois, il voulait nous transformer en socialistes d'ƒtat, en secondant des expŽriences socialistes au sein de l'actuel Empire allemand [68]. Les deux fois, il fut remis ˆ sa place, comme maintenant.

 

 

Ai-je besoin de te dire que je me suis rŽjoui de l'intervention Žnergique de Bebel aprs le morne Congrs de Francfort et, de mme, que Vollmar m'ait forcŽ indirectement ˆ dire aussi mon petit mot dans l'affaire [69]. Nous avons effectivement triomphŽ sur toute la ligne. D'abord, Vollmar a arrtŽ la polŽmique aprs les quatre articles de Bebel, ce qui reprŽsente dŽjˆ un net recul ; puis il y eut le rejet, par la direction du parti et de la fraction, de sa demande pour qu'elles tranchent ˆ la place du congrs. Bref, Vollmar essuya une dŽfaite aprs l'autre dans sa malheureuse troisime campagne. Cela suffirait ˆ dŽcourager mme un ancien zouave du pape. Dans cette affaire, j'ai Žcrit deux lettres ˆ Liebknecht qui ne lui ont pas fait plaisir [70]. L'homme devient de plus en plus une gne. Il prŽtend qu'il a les nerfs les plus solides dans le parti : ils ne le sont que trop, mme son discours d'avant-hier au Reichstag a ŽtŽ mauvais [71]. On semble d'ailleurs s'en tre aperu au gouvernement : on veut manifestement le remettre en selle en le poursuivant a posteriori pour avoir insultŽ Sa MajestŽ.

 

 

Questions de la presse

 

 

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Je n'ai jamais dit que la masse de vos gens ne dŽsire pas de science vŽritable. J'ai parlŽ du parti, et, ˆ mes yeux, celui-ci est ce pour quoi il se donne dans la presse et les congrs [72]. Et lˆ, ce qui y domine, c'est maintenant la demi-science et l'ancien ouvrier qui se gonfle d'tre littŽrateur. Si, comme tu l'affirmes, ces gens ne forment qu'une infime minoritŽ, vous prenez alors tant d'Žgards vis-ˆ-vis d'eux parce que chacun d'eux vous pla”t.

 

Le dŽclin thŽorique et moral du parti date de la fusion [avec les lassallŽens], et on aurait pu l'Žviter si l'on avait fait preuve ˆ ce moment d'un peu plus de retenue et de raison. Un parti sain est capable d'exsuder pas mal de choses avec le temps, mais c'est un processus long et difficile, et ce n'est pas parce que les masses sont en bonne santŽ qu'il faut leur inoculer sans nŽcessitŽ une maladie...

 

Bref, j'en ai assez de cette confusion qu'entra”ne le lancement continuel d'affaires irrŽflŽchies et prŽcipitŽes. Je ne peux accepter la moindre offre de collaboration, ne serait-ce que parce qu'il faut que je termine une fois pour toutes les travaux les plus importants. J'achve encore l'Anti-DŸhring, et ensuite je n'Žcrirai plus que des articles que je tiendrai moi-mme pour urgents, et s'il y a une revue qui n'est pas un organe du parti, je les lui donnerai afin de n'tre pas l'objet des dŽbats d'un congrs [73]. Il faut bien admettre qu'il n'y a pas de forum dŽmocratique pour des travaux scientifiques. Cette expŽrience m'a suffi.

 

 

Je n'ai Ç pas de ressentiment È – pour employer l'expression de Heine ‑, et Engels pas davantage [74]. Tous deux nous n'attachons pas la moindre importance ˆ la popularitŽ. La preuve en est, par exemple, que, par aversion pour le culte de la personnalitŽ, du temps de l'Internationale, j'ai dŽjouŽ les nombreuses manÏuvres entreprises dans les diffŽrents pays pour me faire tomber dans les rets de la publicitŽ en m'importunant avec des Žloges, auxquels je n'ai jamais rŽpondu, sauf lorsque c'Žtait inŽvitable, par un savon. Quand nous sommes entrŽs pour la premire fois dans une sociŽtŽ secrte communiste [75], Engels et moi, nous ne l'avons fait qu'ˆ la condition que les statuts Žcartent tout ce qui pouvait encourager la foi superstitieuse en l'autoritŽ. Lassalle a agi plus tard en sens exactement inverse.

 

Or, les faits qui se sont dŽroulŽs au dernier congrs du parti [76] sont vivement exploitŽs par les ennemis du parti ˆ l'Žtranger ; en tout cas, ils nous ont obligŽs ˆ la prudence dans nos rapports avec les Ç camarades de parti È en Allemagne.

 

Au reste, mon Žtat de santŽ m'oblige ˆ utiliser le temps de travail autorisŽ mŽdicalement ˆ l'achvement de mon ouvrage. [Le Capital] ; et Engels, qui travaille ˆ divers ouvrages importants, continue d'envoyer des contributions au VorwŠrts.

 

 

Presse thŽorique

 

 

Il serait effectivement trs agrŽable de disposer d'une revue socialiste vŽritablement scientifique [77]. Elle fournirait l'occasion de critiques et d'anticritiques ; nous pourrions y dŽvelopper certains points thŽoriques, Žtaler l'ignorance absolue des professeurs et assistants, et de la sorte nous pourrions en mme temps Žclairer les esprits du public en gŽnŽral ouvriers aussi bien que bourgeois.

 

Mais la revue de Wiede [78] ne peut tre autre chose que pseudo-scientifique ; les bougres ˆ demi cultivŽs et les littŽrateurs ˆ demi savants qui hantent la Neue Welt et le VorwŠrts, etc., constituent nŽcessairement le gros de ses collaborateurs. L'absence de mŽnagements ‑ condition premire de toute critique ‑ est impossible en pareille compagnie. En outre, faire sans cesse attention ˆ ce que ce soit toujours facile ˆ comprendre, c'est Žcrire pour des ignorants. Peut-on s'imaginer une revue de chimie dont la prŽmisse fondamentale serait l'ignorance du lecteur en chimie ? Et, en faisant abstraction de tout cela, l'attitude des collaborateurs de Wiede dans l'affaire DŸhring nous incite ˆ tre prudents et ˆ nous tenir autant ˆ l'Žcart de ces messieurs que le permettent les conditions politiques du parti. Leur devise semble tre la suivante : quiconque critique son adversaire en l'engueulant a un bon tempŽrament ; quiconque engueule l'adversaire en lui faisant une vŽritable critique est une personne indigne.

 

 

Le malheur, c'est tout bonnement que les n™tres ont un si pitre adversaire en Allemagne [79]. S'il y avait simplement du c™tŽ bourgeois un seul esprit capable et formŽ en Žconomie, il aurait t™t fait de leur rŽgler leur compte et d'amener un peu de clartŽ dans leur propre confusion. Mais que peut-on attendre d'un combat o, de part et d'autre, les seules armes sont les lieux communs et les salades philistines ? Face aux Ç grands esprits È bourgeois en Allemagne se dresse et se dŽveloppe un nouveau socialisme vulgaire allemand qui se range dignement aux c™tŽs de l'ancien Ç socialisme vrai È de 1845 [80].

 

 

Je pense que je rŽpondrai, premirement, qu'il m'est impossible de collaborer ˆ une revue scientifique dont la rŽdaction est anonyme et dont les collaborateurs Žgalement ne sont pas nommŽs. Les rŽsolutions de congrs [81], si respectables soient-elles sur le terrain de l'agitation pratique, sont Žgales ˆ zŽro en science, et ne suffisent pas ˆ Žtablir le caractre scientifique d'une revue, caractre qui ne s'instaure pas par dŽcret. Une revue socialiste scientifique sans aucune orientation scientifique tout ˆ fait dŽterminŽe est une absurditŽ, et face ˆ la grande diversitŽ, voire ˆ l'indŽtermination des tendances qui fleurissent en Allemagne, il manque jusqu'ici toute garantie pour que cette orientation nous convienne.

 

 

Je te remercie vivement pour les nouvelles que tu me donnes ˆ propos de l'affaire Sorge-Dietz [82]. Comme Sorge ne m'a pas Žcrit o en sont les tractations que tu as menŽes, et qu'il faut que je le sache avant de pouvoir y intervenir moi-mme, elles m'Žtaient prŽcieuses. L'Žditeur Dietz s'oriente trop exclusivement vers les tirages de masse. S'il veut tre l'Žditeur des socialistes scientifiques, il doit prŽvoir une section o trouveront place aussi des ouvrages qui s'Žcoulent plus lentement. Sinon, il faut chercher un autre Žditeur. La littŽrature vŽritablement scientifique ne peut se vendre par tirages de dix mille, et l'Žditeur doit prendre les dispositions correspondantes...

 

Votre congrs n'a pas ŽtŽ, cette fois-ci, aussi brillant que les prŽcŽdents [83]. Les dŽbats sur la question des traitements ont pris un tour peu rŽjouissant, bien que je sois d'avis que Franais et Anglais n'eussent pas fait mieux sur ce point, ce que Louise [Kautsky] ne veut absolument pas admettre. J'en suis venu depuis longtemps ˆ la conviction que l'on se heurte ici ˆ l'une des limites qu'assignent les conditions de vie actuelles au champ de vision des ouvriers. Ceux-lˆ mmes qui ont trouvŽ tout normal que leur idole Lassalle vive de ses propres moyens comme un sybarite accusent Liebknecht qui, en tant que rŽdacteur rŽmunŽrŽ, se contente du tiers de cet argent, bien que le journal rapporte cinq ˆ six fois plus [84]. ætre dŽpendant, mme d'un parti ouvrier, est un sort pŽnible.

 

Mme en faisant abstraction de la question d'argent, pour quiconque a de l'initiative, c'est un poste stŽrile que d'tre rŽdacteur d'un journal appartenant ˆ un parti. Marx et moi, nous avons toujours ŽtŽ d'accord pour ne jamais accepter un tel emploi et pour n'avoir qu'un journal pŽcuniairement indŽpendant, mme vis-ˆ-vis du parti [85].

 

Votre Ç Žtatisation È de la presse a les plus grands inconvŽnients, lorsqu'elle est poussŽe trop loin. Dans le parti, il vous faut absolument une presse qui ne soit pas directement dŽpendante de la centrale, voire du congrs, autrement dit une presse qui soit en Žtat, sans tre brimŽe, de faire opposition, au sein du programme et de la tactique adoptŽe, ˆ certaines dŽmarches du parti, et mme qui, dans les limites des convenances de parti, puisse soumettre librement le programme et la tactique ˆ la critique.

 

En tant que direction du parti, vous devriez favoriser, voire susciter, une telle presse : dans ce cas, vous gardez toujours plus d'influence morale sur elle que si elle na”t ˆ moitiŽ contre votre volontŽ. Le parti vient de grandir dans la ferme discipline qu'il s'est imposŽ jusqu'ici : avec deux, trois millions et l'afflux d'ŽlŽments Ç cultivŽs È [86], il est nŽcessaire de laisser une marge de jeu plus grande que celle qu'il convenait de lui donner jusqu'ici et qu'il Žtait mme utile de tenir dans des limites trs Žtroites. Plus vite, vous et le parti, vous prendrez vos dispositions pour modifier la situation en ce sens, mieux cela vaudra. Et la premire mesure est une presse de parti formellement indŽpendante. Elle na”tra certainement, mais il vaut mieux que vous la fassiez na”tre, et qu'elle demeure, ds le dŽbut, sous votre influence morale, et ne surgisse pas en opposition ˆ vous [87].

 

 

Ce Quarck fait partie de cette demi-douzaine de jeune intellectuels qui gravitent dans le no man's land entre notre parti et le socialisme de chaire, en prenant bien soin d'Žviter tout risque qui les engagerait ˆ une obligation vis-ˆ-vis de notre parti, tout en comptant bien rŽcolter tous les avantages qui puissent se tirer d'une telle situation [88]. Ils font une intense propagande pour le socialisme impŽrial des Hohenzollern (que Quarck a cŽlŽbrŽ en termes dithyrambiques), pour Rodbertus contre Marx (Quarck a eu le front de m'Žcrire qu'il honorait Le Capital en le plaant ˆ c™tŽ des Ïuvres du grand Rodbertus dans sa bibliothque !), et surtout l'un pour l'autre.

 

 

Bernstein m'Žcrit qu'il a reu une lettre de Mehring, qui se plaint de ce que ni la Neue Zeit ni le VorwŠrts ne fassent la moindre mention de son article dirigŽ contre Richter, et qu'il en Žtait de mme pour le reste de la presse du parti, et d'ajouter que c'Žtait impardonnable et qu'il avait envie de se retirer de toute politique, etc. [89]. Je comprends que ces faons de procŽder social-dŽmocrates doivent avoir un effet fatal sur un auteur qui s'adonne ˆ l'art littŽraire ‑ il ne s'agit pas lˆ d'un reproche, car c'est non seulement la rgle, mais encore la condition d'existence de la presse bourgeoise, mme littŽraire ‑, bref un homme qui a grandi dans la presse qui n'est pas social-dŽmocrate.

 

Mais, sur ce point, nous pourrions tous Žlever des plaintes, car cela est dŽjˆ arrivŽ ˆ toi, ˆ moi, ˆ nous tous. Et nŽanmoins, si dŽsagrŽable que cela nous paraisse parfois, j'estime que cette superbe indiffŽrence de notre presse est cependant la marque de sa supŽrioritŽ et prŽsente les plus grands avantages. De toute faon, les travaux de Mehring seront achetŽs et lus, mme si le VorwŠrts ne leur donne pas un coup de pouce, et il vaut mieux ne faire de la publicitŽ pour rien du tout plut™t que pour toute la camelote des membres du parti qui est tout de mme envoyŽe aux quatre coins du monde. Or, si l'on mettait l'une en vedette, les fameuses convenances dŽmocratiques exigeraient ensuite pour tous les autres Ç le mme droit pour tous È. Dans ces conditions, je prŽfre encore l'ŽgalitŽ de droit dans l'absence de mention qui me frappe moi aussi.

 

Mais ce que vous pouvez faire, c'est de conclure un accord ˆ bas prix avec l'Žditeur de Mehring, afin de passer rŽgulirement et souvent des annonces. Mais lˆ on se heurte de nouveau ˆ cette incapacitŽ criante dans les affaires qui frappe les gens de notre presse.

 

Ces jours-ci, je suis tombŽ sur l'ouvrage de Mehring, La Social-dŽmocratie allemande (3e Ždition), et j'en ai relu la partie historique. Dans son Capital et Presse, il s'en est tirŽ en tout cas commodŽment en glissant sur l'Ç incident [90] È. Mais cela peut nous laisser froids ; nous n'avons pas ˆ lui faire aprs coup de reproches qu'il devrait toujours tra”ner derrire lui : c'est son affaire, et cela ne nous regarde pas. Personnellement, j'aurais reconnu en toute franchise le tournant, car, en soi, il n'y a lˆ absolument rien de bl‰mable, et l'on s'Žpargne beaucoup de chamailleries, de mauvais sang et de temps.

 

Au reste, il serait absurde qu'il envisage sŽrieusement de se retirer de la politique : il ferait simplement plaisir ˆ ceux qui sont au pouvoir et aux bourgeois. En effet, ses Žditoriaux dans la Neue Zeit sont tout ˆ fait remarquables, et nous les guettons ˆ chaque fois avec aviditŽ. Il ne faut pas laisser se rouiller un tel tranchant ou utiliser des littŽrateurs miteux...

 

 

Passage ˆ la presse quotidienne

 

 

Vous aurez, avec le temps, votre quotidien, mais l'essentiel c'est que vous le crŽiez vous-mmes [91]. Du fait de votre lŽgislation de presse, il me semble que c'est un grand pas de passer d'un hebdomadaire ˆ un quotidien ; celui-ci exige que l'on ait les reins solides, car il vous met beaucoup plus ˆ la merci du gouvernement que votre presse hebdomadaire, puisqu'il cherchera ˆ vous ruiner financirement, avec les amendes et autres charges financires. C'est une fois de plus la preuve de l'intelligence ‑ toujours trs grande lorsqu'il s'agit de points de dŽtail ‑ de votre gouvernement. Les Prussiens sont trop btes pour cela et ne font confiance qu'ˆ la force brutale. Quant ˆ vos hommes d'ƒtat, ils ne sont btes que lorsqu'ils doivent entreprendre quelque chose de grand. Je me demande si votre quotidien pourra tenir six mois envers et contre les amendes, car s'il devait cesser de para”tre, la dŽfaite serait difficile ˆ surmonter.

 

Mais, afin que j'apporte aussi ma contribution aux Autrichiens, j'ai pensŽ qu'Žtant donnŽ que mes piges pour les articles paraissant aux Žditions VorwŠrts aboutissent de toute faon immanquablement dans la caisse du parti allemand, tous les droits sur mes Žcrits publiŽs chez Dietz vous reviendront, et j'ai donnŽ mes instructions en ce sens ˆ Dietz [92].

 

Bernstein Žtait de passage ici et portait toutes sortes de lettres de K. Kautsky. Ë propos de la Neue Zeit, celui-ci ci m'a Žgalement Žcrit que je devais y mettre mon grain de sel [93]. Ë mon avis, si vous acceptez la modification proposŽe par Dietz [94], vous devez y rŽflŽchir et vous prŽparer sŽrieusement, afin de mettre les choses en train pour janvier, sinon ce serait trop prŽcipitŽ. D'un point de vue gŽnŽral, il me semble que la Neue Zeit, depuis qu'elle para”t hebdomadairement, a perdu partiellement son ancien caractre pour en prendre un nouveau qu'elle n'a pas su adopter vŽritablement. Elle est maintenant Žcrite pour un public double et ne peut satisfaire entirement ni l'un ni l'autre.

 

Si elle doit devenir une revue, en partie politique, en partie littŽraire et artistique, en partie scientifique, dans le genre de la Nation, alors vous devez la transfŽrer ˆ Berlin. En effet, la politique d'un hebdomadaire doit tre faite au centre, la veille de l'impression, sinon elle arrivera toujours trop tard. Et ceux qui collaborent ˆ la partie politique doivent tous tre dans la mme localitŽ, ˆ l'exception des correspondants. Il me semble donc que le plan d'une revue qui serait rŽdigŽe ˆ Berlin et ˆ Londres, et imprimŽe ˆ Stuttgart, est impossible. De toute faon, il y aurait une diffŽrence d'abonnements de 20 ˆ 30 %, selon que la revue serait faite ˆ Berlin ou ˆ Stuttgart. Je juge uniquement du point de vue de la diffusion, puisque je ne connais les autres points d'interfŽrence que d'une manire superficielle ou pas du tout, et je vous laisse donc le soin d'en tenir compte.

 

Mais si la Neue Zeit est transformŽe en ce sens, elle ne s'adressera plus qu'ˆ une partie de son public actuel, et devra donc s'y adapter compltement. Alors, elle ne pourra plus recevoir les articles qui lui ont donnŽ jusqu'ici sa valeur la plus grande et la plus durable, ˆ savoir ceux qui ont un caractre scientifique et sont trs longs, allant de trois ˆ six numŽros. Dans ce cas, il faudrait lui substituer une revue. mensuelle ‑ en cas de nŽcessitŽ, trimestrielle ‑ de caractre essentiellement scientifique, qui aurait alors un cercle de lecteurs restreint en consŽquence, ce qu'il faudrait compenser par un prix plus ŽlevŽ, afin qu'elle puisse tout de mme tenir.

 

D'un point de vue gŽnŽral, il me para”t nŽcessaire ‑ pour le cas o les Žditeurs du parti veuillent concentrer toujours davantage entre leurs mains toute la presse du parti, mme la scientifique ‑ de ne pas calculer tout en fonction d'une diffusion de masse, que cela s'y prte ou non. Les vŽritables Žtudes Žconomiques sont avant tout des recherches de dŽtail, et ne serait-ce que pour cette raison, ne peuvent avoir une diffusion de masse. Il en va de mme pour de vŽritables travaux historiques qui sont le rŽsultat de recherches personnelles et ne sont pas adaptŽs aux Žditions par livraisons successives. J'estime, en somme, qu'il faut introduire une division en deux dŽpartements, l'une pour une diffusion de masse, l'autre pour une distribution ordinaire en librairie, plus lente, en tirages moindres et ˆ un prix en consŽquence plus ŽlevŽ. Voici un exemple personnel qui montre ce qui arrive lorsqu'on veut forcer les limites de ce qu'impose la nature mme de la publication. Mon Anti-DŸhring est aussi populaire que possible, mais n'est pas pour autant un livre ˆ la portŽe de n'importe quel ouvrier. Or, voilˆ que Dietz extrait une partie de l'Ždition de Zurich et cherche par ce moyen ˆ forcer la vente pour vendre le truc en un clin d'Ïil au ban et ˆ l'arrire-ban ˆ des prix rŽduits. Cela ne m'est absolument pas agrŽable, et je prendrai garde ˆ l'avenir. C'est le seul grand ouvrage que j'aie Žcrit depuis 1845, et c'est, en toute occurrence, le dŽgrader que de le traiter de la sorte. N'en parle cependant pas ˆ Dietz, la chose est faite et on ne peut plus la changer ; je ne t'en ai parlŽ que pour te citer un exemple frappant d'erreur en matire de diffusion en librairie.

 

 

Relations avec la presse syndicale

 

 

Aprs avoir quelque peu revu la traduction assez scolaire, je l'ai envoyŽe ˆ Shipton pour servir d'Žditorial [95]. Or, ce brave Shipton a mal compris le texte, et le temps de me rŽclamer des explications, il Žtait de nouveau trop tard pour le faire para”tre, comme cela se passe d'habitude. Ce bougre s'est imaginŽ Dieu sait quoi par l'Ç immixtion de l'ƒtat È en faveur des travailleurs, sauf ce qui Žtait Žcrit dans l'article, alors que cette immixtion de l'ƒtat existe depuis longtemps dans la lŽgislation de fabriques en Angleterre. Pire encore, dans les mots : Ç Nous demandons une convention de Genve pour la classe ouvrire È, il a lu que vous rŽclamiez la rŽunion d'une confŽrence des dŽlŽguŽs ˆ Genve pour rŽgler l'affaire ! Il n'y a rien ˆ faire avec un tel ‰ne. J'ai saisi l'occasion pour mettre ˆ exŽcution ma dŽcision et rompre avec le Labour Standard, Žtant donnŽ que le journal empire plut™t qu'il ne s'amŽliore.

 

 

Je vous envoie les Žpreuves avec les modifications que vous dŽsirez [96]. Il me semble que vous avez mal compris le premier passage, et la seconde modification est toute formelle. Quoi qu'il en soit, je ne comprends pas quel sens peuvent bien avoir ces modifications, si vous me les demandez mardi, qu'elles me parviennent mercredi, et vous reviennent ˆ Londres jeudi... aprs la parution du journal.

 

Mais il y a encore quelque chose d'autre. Si les choses aussi modŽrŽes et inoffensives que celles de l'article de Kautsky commencent ˆ vous sembler trop fortes, je suis obligŽ d'admettre que ce sera encore plus le cas avec mes propres articles qui, en gŽnŽral, sont plus violents. Je suis donc obligŽ d'interprŽter vos remarques comme un sympt™me, et en conclure qu'il vaut mieux pour nous deux que je cesse de vous envoyer des Žditoriaux, et ne serait-ce que pour cette raison, j'en Žtais venu ˆ cette dŽcision qui devait tre mise en acte aprs le congrs des syndicats. Mais plus t™t je cesserai, mieux cela vaudra sans doute pour votre position vis-ˆ-vis de ce congrs [97].

 

Voici encore un autre point : je suis d'avis que vous auriez dž m'envoyer, avant la publication, une copie ou les Žpreuves de l'article sur les syndicats de Max Hirsch en Allemagne [98], Žtant donnŽ que, parmi vos collaborateurs, j'Žtais le seul qui soit au courant de cette question et qui aurait pu y faire les remarques indispensables. En tout cas, il m'est impossible de continuer ˆ faire partie du corps des collaborateurs d'un journal donnant la vedette ˆ des syndicats qui ne peuvent tre comparŽs qu'aux pires syndicats anglais, et admettant qu'ils se vendent carrŽment ˆ la bourgeoisie ou du moins se laissent diriger par des gens payŽs par elle.

 

Je n'ai pas besoin d'ajouter que, pour le reste, je souhaite beaucoup de succs au Labour Standard, et je vous fournirai de temps en temps des informations concernant le continent.

 

 

Perspectives historiques du parti

 

 

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Dans cette guerre, la neutralitŽ de la Belgique et de la Suisse sera la premire chose qui volera en Žclats, et si la guerre prend un tour sŽrieux, notre seule chance sera que les Russes soient battus et fassent la rŽvolution [99]. Les Franais ne pourront pas la faire tant qu'ils sont les alliŽs du tsar : ce serait une haute trahison [100] ! Cependant, si aucune rŽvolution n'interrompt la guerre, si on la laisse suivre son cours, dans ce cas, la victoire ira au camp qui se sera assurŽ le concours de l'Angleterre, ˆ condition que celle-ci entre en guerre. En effet, on pourra alors, avec l'aide de l'Angleterre, rŽduire l'autre camp ˆ la famine, en coupant l'approvisionnement en blŽs Žtrangers dont toute l'Europe occidentale a besoin dŽsormais...


 

 

Le parti de classe. Tome IV. ActivitŽs de classe du parti

 

Chapitre 2

 

Le parti face
ˆ l'Žvolution du monde

 

 

Quiconque n'est pas compltement abruti par les criailleries du moment ou n'a pas intŽrt ˆ duper le peuple allemand, doit reconna”tre que la guerre de 1870 porte tout aussi nŽcessairement dans son sein une guerre entre l'Allemagne et la Russie (alliŽe ˆ la France) que la guerre de 1870 elle-mme est nŽe de celle de 1866.

 

Je dis fatalement, sauf le cas peu probable o une rŽvolution Žclaterait auparavant en Russie.

 

MARX, Lettre au ComitŽ social-dŽmocrate de Brunswick, fin aožt-dŽbut septembre 1870 [101].

 

 

La situation

 

 

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F. Engels, dans une lettre adressŽe ˆ l'un de nous [102], a fait un exposŽ si clair et si juste de la situation qui nous est faite par les Žlections du 4 octobre, que malgrŽ son caractre privŽ nous croyons devoir la porter ˆ la connaissance de nos lecteurs.

 

Londres, le 12 octobre 1885

 

 

Je ne vois pas que le 4 octobre soit une dŽfaite, ˆ moins que vous ne vous soyez livrŽs ˆ toutes sortes d'illusions. Il s'agissait d'Žcraser les opportunistes ; ils ont ŽtŽ ŽcrasŽs. Pour les Žcraser, il fallait une pression des deux c™tŽs opposŽs, de droite et de gauche. Que la pression de droite ait ŽtŽ plus forte que l'on n'aurait cru, c'est Žvident. Mais cela rend la situation beaucoup plus rŽvolutionnaire.

 

Le bourgeois, grand et petit, a prŽfŽrŽ aux OrlŽanistes et Bonapartistes dŽguisŽs les OrlŽanistes et Bonapartistes francs, aux hommes qui veulent s'enrichir aux frais de la nation ceux qui se sont dŽjˆ enrichis en la volant, aux conservateurs de demain les conservateurs de la veille. Voilˆ tout.

 

La monarchie est impossible en France, ne fžt-ce que par la multiplicitŽ des prŽtendants. Serait-elle possible, ce serait un signe que les Bismarckiens ont raison de parler de la dŽgŽnŽrescence de la France. Mais cette dŽgŽnŽrescence n'atteint que la bourgeoisie, en Allemagne et en Angleterre aussi bien qu'en France.

 

La RŽpublique demeure toujours le gouvernement qui divise le moins les trois sectes monarchistes, qui leur permet de s'unir en parti conservateur [103]. Si la possibilitŽ d'une restauration monarchique rŽappara”t, le parti conservateur se divise dans lÕinstant en trois sectes ; tandis que les rŽpublicains sont forcŽs .de se grouper autour du seul gouvernement possible ; et, en ce moment, c'est probablement le ministre Clemenceau.

 

Clemenceau est toujours un progrs sur Ferry et Wilson. Il est trs important qu'il arrive au pouvoir, non comme bouclier de la propriŽtŽ contre les communistes, mais comme sauveur de la RŽpublique contre la monarchie. En ce cas, il sera plus ou moins forcŽ de tenir ce qu'il a promis ; autrement, il se conduirait comme les autres. qui se sont crus, ainsi que Louis-Philippe, Ç la meilleure des rŽpubliques È : ‑ nous sommes au pouvoir, la RŽpublique peut dormir tranquille ; notre prise de possession des ministres suffit, ne nous parlez donc plus des rŽformes promises.

 

Je crois que les hommes qui, le 4, ont votŽ pour les monarchistes sont dŽjˆ effrayŽs de leur propre succs et que le 18 donnera des rŽsultats plus ou moins clemenceautistes, avec un certain succs, non d'estime, mais de mŽpris pour les opportunistes [104]. Le philistin se dira : aprs tout, avec tant de royalistes et de bonapartistes, il me faut quelques opportunistes. Du reste, le 18 dŽcidera de la situation ; la France est le pays de l'imprŽvu, et je me garderai bien d'exprimer une opinion dŽfinitive.

 

Mais, dans tous les cas, il y aura en prŽsence radicaux et monarchistes. La RŽpublique courra juste le danger nŽcessaire pour forcer le petit-bourgeois ˆ se pencher un peu plus vers l'extrme-gauche, ce qu'il n'aurait fait autrement. C'est prŽcisŽment la situation qu'il nous faut, ˆ nous communistes. Jusqu'ˆ prŽsent, je ne vois pas de raisons pour croire que la marche si exceptionnellement logique du dŽveloppement politique de la France ait dŽviŽ : c'est toujours la logique de 1792‑94 ; seulement le danger que causait alors la coalition est aujourd'hui causŽ par la coalition des partis monarchiques ˆ l'intŽrieur. Ë la regarder de prs, elle est moins dangereuse que ne l'Žtait l'autre...

 

F. Engels


 

 

Au comitŽ de rŽdaction du Socialiste

 

 

 

Citoyens,

 

Dans votre numŽro du 17, vous publiez l'extrait d'une lettre privŽe que j'avais adressŽe ˆ l'un de vous. Cette lettre Žtait Žcrite ˆ la h‰te, tellement que pour ne pas manquer le courrier, je n'avais mme pas eu le temps de la relire [105]. Permettez-moi donc de qualifier [106] un passage qui n'exprime pas clairement ma pensŽe.

 

En parlant de M. Clemenceau comme porte-drapeau du radicalisme franais, je dis : Ç  Il est trs important qu'il arrive au pouvoir, non comme bouclier de la propriŽtŽ contre les communistes, mais comme sauveur de la RŽpublique contre la monarchie. En ce cas, il sera plus ou moins forcŽ de tenir ce qu'il a promis ; autrement, il se conduirait (ici il faut insŽrer : peut-tre) comme les autres qui se sont crus, ainsi que Louis-Philippe, la meilleure des rŽpubliques : nous sommes au pouvoir, la RŽpublique peut dormir tranquille ; notre prise de possession des ministres suffit, ne nous .parlez donc plus des rŽformes promises. È

 

D'abord je n'ai aucun droit d'affirmer que M. Clemenceau, s'il arrivait au pouvoir par la voie routinire des gouvernements parlementaires, agirait infailliblement Ç comme les autres È. Puis, je ne suis pas de ceux qui expliquent les actions des gouvernements par leur simple volontŽ, bonne ou mauvaise ; cette volontŽ elle-mme est dŽterminŽe par des causes indŽpendantes, par la situation gŽnŽrale. Ce n'est donc pas la volontŽ, bonne ou mauvaise, de M. Clemenceau dont il s'agit ici. Ce dont il s'agit, dans l'intŽrt du parti ouvrier, c'est que les radicaux arrivent au pouvoir dans une situation telle que la mise en pratique de leur programme leur soit imposŽe comme seul moyen de se maintenir. Cette situation, espŽrons que les 200 monarchistes de la Chambre suffiront ˆ la crŽer.

 

Londres, le 21 octobre 1885.

 

F. Engels

 

 

Situation politique de l'Europe

 

 

 

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(L'affaire orientale est un peu longue [107], il me faut entrer dans un tas de dŽtails, vu les btises absurdes que la presse franaise, y compris Le Cri, a rŽpandues sur ce sujet, sous l'influence russo-patriotique.) [108]

 

Au mois de mars 1879, Disraeli envoya quatre vaisseaux cuirassŽs dans le Bosphore ; leur seule prŽsence suffit pour arrter la marche triomphale des Russes sur Constantinople, et pour dŽchirer le traitŽ de San Stefano. La paix de Berlin rŽgla, pour quelque temps, la situation en Orient [109]. Bismarck rŽussit ˆ Žtablir un accord entre le gouvernement russe et le gouvernement autrichien. L'Autriche dominerait en sous-main la Serbie ; tandis que la Bulgarie et la RoumŽlie seraient abandonnŽes ˆ l'influence prŽpondŽrante de la Russie. Cela laissait deviner que si plus tard Bismarck permettait aux Russes de prendre Constantinople, il rŽservait ˆ l'Autriche Salonique et la MacŽdoine.

 

Mais, en outre, on donna la Bosnie ˆ l'Autriche, comme, en 1794, la Russie avait abandonnŽ, pour la reprendre en 1814, la plus grande partie de la Pologne proprement dite aux Prussiens et aux Autrichiens. La Bosnie Žtait la cause d'une saignŽe perpŽtuelle pour l'Autriche, une pomme de discorde entre la Hongrie et l'Autriche occidentale, et surtout la preuve pour la Turquie que les Autrichiens, ainsi que les Russes [110], lui prŽparaient le sort de la Pologne. DŽsormais la Turquie ne pouvait avoir confiance en l'Autriche : victoire importante de la politique du gouvernement russe.

 

La Serbie avait des tendances slavophiles, partant russophiles, mais depuis son Žmancipation elle puise tous ses moyens de dŽveloppement bourgeois en Autriche. Les jeunes gens vont Žtudier dans les universitŽs autrichiennes ; le systme bureaucratique, le code, la procŽdure des tribunaux, les Žcoles, tout a ŽtŽ copiŽ des modles autrichiens. C'Žtait naturel. Mais la Russie devait empcher cette imitation en Bulgarie ; elle ne voulait pas tirer les marrons du feu pour l'Autriche. Donc la Bulgarie fut organisŽe en satrapie russe. L'administration, les officiers et les sous-officiers, le personnel, tout le systme enfin furent russes : le Battemberg qui lui fut octroyŽ Žtait cousin d'Alexandre III.

 

La domination, d'abord directe ; puis indirecte du gouvernement russe suffit pour Žtouffer en moins de quatre ans toutes les sympathies bulgares pour la Russie ; elles avaient pourtant ŽtŽ grandes et enthousiastes. La population regimbait de plus en plus contre l'insolence des Ç libŽrateurs È ; et mme le Battemberg, homme sans idŽes politiques, d'un caractre mou et qui ne demandait pas mieux que de servir le tsar, mais qui rŽclamait des Žgards, devint de plus en plus indocile.

 

Pendant ce temps, les choses marchaient en Russie. Le gouvernement, ˆ force de sŽvŽritŽs, rŽussit ˆ disperser et ˆ dŽsorganiser les nihilistes pour quelque temps. Mais cela n'Žtait pas suffisant, il lui fallait un appui dans l'opinion publique. Il lui fallait dŽtourner les esprits de la contemplation des misres sociales et politiques toujours croissantes de l'intŽrieur ; enfin il lui fallait un peu de fantasmagorie patriotique [111]. Sous NapolŽon III, la rive gauche du Rhin avait servi ˆ dŽtourner vers l'extŽrieur les passions rŽvolutionnaires ; de mme le gouvernement russe montra au peuple inquiet et remuant la conqute de Constantinople, la Ç dŽlivrance È des Slaves opprimŽs par les Turcs et leur rŽunion en une grande fŽdŽration sous la prŽsidence de la Russie. Mais il ne suffisait pas d'Žvoquer cette fantasmagorie, il fallait faire quelque chose pour la rŽaliser.

 

Les circonstances Žtaient favorables. L'annexion de l'Alsace-Lorraine avait semŽ entre la France et l'Allemagne des ferments de discorde, qui semblaient devoir neutraliser ces deux puissances. L'Autriche, ˆ elle seule, ne pouvait lutter contre la Russie, puisque son arme offensive la plus efficace, l'appel aux Polonais, serait toujours retenue dans le fourreau de la Prusse. Et l'occupation ‑ le vol ‑ de la Bosnie Žtait une Alsace entre l'Autriche et la Turquie [112]. L'Italie Žtait au plus offrant, c'est-ˆ-dire ˆ la Russie, qui lui offrait le Tretin et l'Istrie, avec la Dalmatie et Tripoli [113]. Et l'Angleterre ? Le pacifique russophile Gladstone avait ŽcoutŽ les paroles tentantes de la Russie : il avait occupŽ l'ƒgypte, en pleine paix, ce qui assurait non seulement ˆ l'Angleterre une querelle perpŽtuelle avec la France, mais bien plus : l'impossibilitŽ d'une alliance des Turcs avec les Anglais, qui venaient de les spolier en s'appropriant un fief turc, l'ƒgypte. En outre, les prŽparatifs russes en Asie Žtaient assez avancŽs pour donner aux Anglais bien de la besogne aux Indes en cas de guerre. Jamais autant de chances ne s'Žtaient prŽsentŽes aux Russes : leur diplomatie triomphait sur toute la ligne.

 

La rŽbellion des Bulgares contre le despotisme russe fournit l'occasion d'entrer en campagne. Ë l'ŽtŽ 1885, on fit miroiter devant les yeux des Bulgares et des RoumŽliotes [114] la possibilitŽ .de cette union promise par la paix de San Stefano et dŽtruite par le traitŽ de Berlin. On leur dit que s'ils se jetaient de nouveau dans les bras de la Russie libŽratrice, le gouvernement russe remplirait sa mission en accomplissant cette union ; mais que pour cela les Bulgares devaient commencer par chasser le Battemberg. Celui-ci fut prŽvenu ˆ temps ; contre son habitude, il agit avec promptitude et Žnergie : il accomplit, mais pour lui [115], cette union que la Russie voulait faire contre lui. Ds ce moment, guerre implacable entre lui et le tsar.

 

Cette guerre fut menŽe d'abord sournoisement et indirectement. On rŽŽdita, pour les petits ƒtats des Balkans, la belle doctrine de Louis Bonaparte, suivant laquelle ; quand un peuple jusque-lˆ Žpars, disons l'Italie ou l'Allemagne, se rŽunit et se constitue en nation, les autres ƒtats, disons la France, ont droit ˆ des compensations territoriales. La Serbie avala l'amorce, et dŽclara la guerre aux Bulgares ; la Russie remporta ce triomphe que cette guerre, dŽclenchŽe dans son intŽrt, se fit aux yeux du monde sous les auspices de l'Autriche, qui n'osa l'empcher de peur de voir le parti russe arriver au pouvoir en Serbie. De son c™tŽ, la Russie dŽsorganisa l'armŽe bulgare en rappelant tous les officiers russes, c'est-ˆ-dire tout l'Žtat-major et tous les officiers supŽrieurs, y compris les chefs de bataillon de l'armŽe bulgare.

 

Mais, contre toute attente, les Bulgares, sans officiers russes et ˆ deux contre trois, battent les Serbes ˆ plate couture et conquirent le respect et l'admiration de l'Europe ŽtonnŽe. Ces victoires ont deux causes. D'abord Alexandre de Battemberg, bien que faible comme homme politique, est bon soldat ; il fit la guerre telle qu'il l'avait apprise ‑ˆ l'Žcole prussienne, tandis que les Serbes suivaient la stratŽgie et la tactique de leurs modles autrichiens. Ce fut donc une deuxime Ždition de la campagne de 1866 en Bohme. Et puis les Serbes avaient vŽcu depuis soixante ans sous ce rŽgime bureaucratique autrichien qui, sans leur donner une puissante bourgeoisie et une paysannerie indŽpendante (les paysans ont dŽjˆ tous des hypothques), avait ruinŽ et dŽsorganisŽ les restes du collectivisme gentilice qui avait ŽtŽ leur force dans leurs luttes contre les Turcs : ce qui explique leur bravoure supŽrieure.

 

Donc, nouvel Žchec pour la Russie ; c'Žtait ˆ recommencer. Le chauvinisme slavophile, chauffŽ comme contrepoids de l'ŽlŽment rŽvolutionnaire, grandissait de jour en jour et devenait dŽjˆ menaant pour le gouvernement. Le tsar se rend en CrimŽe, et les journaux russes annoncent qu'il fera quelque chose de grand ; il cherche ˆ attirer dans ses filets le sultan pour l'engager ˆ une alliance en lui montrant ses anciens alliŽs ‑ l'Autriche et l'Angleterre ‑ le trahissant et le spoliant, et la France ˆ la remorque et ˆ la merci de la Russie. Mais le sultan fait la sourde oreille et les Žnormes armements de la Russie occidentale et mŽridionale restent, pour le moment, sans emploi.

 

Le tsar revient de CrimŽe (juin dernier). Mais en attendant, la marŽe chauvine monte et le gouvernement, incapable de rŽprimer ce mouvement envahissant, est de plus en plus entra”nŽ par lui ; si bien qu'il faut permettre au maire de Moscou de parler hautement, dans son allocution au tsar, de la conqute de Constantinople. La presse, sous l'influence et la protection des gŽnŽraux, dit ouvertement qu'elle attend du tsar une action Žnergique contre l'Autriche et l'Allemagne, qui l'entravent, et le gouvernement n'a pas le courage de lui imposer silence. Le chauvinisme slavophile est plus puissant que le tsar, il faut qu'il cde de peur d'une rŽvolution, les slavophiles s'allieraient aux constitutionnels, aux nihilistes, enfin ˆ tous les mŽcontents [116].

 

La dŽtresse financire complique la situation. Personne ne veut prter ˆ ce gouvernement qui, de 1870 ˆ 1875, a empruntŽ 1 milliard 750 000 francs ˆ Londres et qui menace la paix europŽenne. Il y a deux ou trois ans, Bismarck lui facilita, en Allemagne, un emprunt de 375 millions de francs, mais il est mangŽ depuis longtemps, et sans la signature de Bismarck, les Allemands ne donneront pas un sou. Cependant cette signature ne s'obtient plus sans des conditions humiliantes. La fabrique des assignats de l'intŽrieur en a trop produit, le rouble argent vaut 4 F, et le rouble papier 2,20 F. Les armements cožtent un argent fou.

 

Enfin, il faut agir. Un succs du c™tŽ de Constantinople ou la rŽvolution ‑ l'ambassadeur russe, Giers, alla trouver Bismarck, et lui exposa la situation, qu'il comprit fort bien. Il aurait bien voulu, par Žgard pour l'Autriche, retenir le gouvernement du tsar, dont l'instabilitŽ l'inquite. Mais la rŽvolution en Russie signifie la chute du rŽgime bismarckien. Sans la Russie ‑ la grande armŽe de rŽserve de la rŽaction ‑ la domination des hobereaux en Prusse ne durerait pas un jour. La rŽvolution en Russie changerait immŽdiatement la situation en Allemagne ; elle dŽtruirait d'un coup cette foi aveugle en la toute-puissance de Bismarck, qui lui assure le concours des classes rŽgnantes ; elle mžrirait la rŽvolution en Allemagne.

 

Bismarck, sachant fort bien que l'existence du tsarisme est la base de tout son systme, se rendit en toute h‰te ˆ Vienne, pour informer ses amis que, en prŽsence d'un tel danger, il n'est plus temps de s'arrter aux questions d'amour-propre ; qu'il faut permettre au tsar quelque semblant de triomphe, et que, dans leur intŽrt bien entendu, l'Autriche et l'Allemagne doivent s'incliner devant la Russie. D'ailleurs, si messieurs les Autrichiens insistent pour se mler des affaires de Bulgarie, il s'en lavera les mains : ils verront ce qui arrivera. Kalnoky cde, Alexandre Battemberg est sacrifiŽ, et Bismarck court porter en personne la nouvelle ˆ Giers.

 

Par malheur, les Bulgares dŽployrent une capacitŽ politique et une Žnergie inattendues et intolŽrables chez une nation slave Ç dŽlivrŽe par la sainte Russie È. Le Battemberg fut arrtŽ nuitamment, mais les Bulgares arrtent les conspirateurs, nomment un gouvernement capable, Žnergique et incorruptible, qualitŽs parfaitement intolŽrables chez une nation ˆ peine ŽmancipŽe ; ils rappellent le Battemberg ; celui-ci Žtale toute sa mollesse et prend la fuite. Mais les Bulgares sont incorrigibles. Avec ou sans Battemberg, ils rŽsistent aux ordres souverains du tsar et obligent l'hŽro•que Kaulbars ˆ se rendre ridicule devant toute l'Europe.

 

Imaginez la fureur du tsar. Aprs avoir courbŽ Bismarck, brisŽ la rŽsistance autrichienne, se voir arrtŽ par ce petit peuple qui date d'hier, qui doit ˆ lui ou ˆ son pre son Ç indŽpendance È, et qui ne veut pas comprendre que cette indŽpendance ne signifie qu'obŽissance aveugle aux ordres du Ç libŽrateur È. Les Grecs et les Serbes ont ŽtŽ (pas mal [117] ) ingrats, mais les Bulgares dŽpassent la limite ! Prendre leur indŽpendance au sŽrieux ! Quel crime !

 

Pour se sauver de la rŽvolution, le pauvre tsar est obligŽ de faire un nouveau pas en avant. Mais chaque pas devient plus dangereux ; car il ne se fait qu'au risque d'une guerre europŽenne, ce que la diplomatie russe a toujours cherchŽ ˆ Žviter. Il est certain que s'il y a intervention directe du gouvernement russe en Bulgarie et qu'elle amne des complications ultŽrieures, il arrivera un moment o l'hostilitŽ des intŽrts russes et autrichiens Žclatera ouvertement. Il sera alors impossible de localiser la guerre, elle deviendra gŽnŽrale. ƒtant donnŽ l'honntetŽ des fripons qui gouvernent l'Europe, il est impossible de prŽvoir comment se grouperont les deux camps. Bismarck est capable de se ranger du c™tŽ des Russes contre l'Autriche, s'il ne peut retarder autrement la rŽvolution en Russie. Mais il est plus probable que si la guerre Žclate entre la Russie et l'Autriche, l'Allemagne viendra au secours de cette dernire pour empcher son complet Žcrasement.

 

En attendant le printemps, car avant avril les Russes ne pourront s'engager dans une grande campagne d'hiver sur le Danube, le tsar travaille ˆ attirer les Turcs dans ses filets, et la trahison de l'Autriche et de l'Angleterre envers la Turquie lui facilite la t‰che. Son but est d'occuper les Dardanelles et de transformer ainsi la mer Noire en lac russe, d'en faire un abri inabordable pour l'organisation de flottes puissantes qui en sortiraient pour dominer ce que NapolŽon appelait un Ç lac franais È ‑ la MŽditerranŽe. Mais il n'y est pas encore parvenu, bien que ses partisans de Sofia aient trahi sa secrte pensŽe.

 

Voilˆ la situation. Afin d'Žchapper ˆ une rŽvolution en Russie, il faut au tsar Constantinople ; Bismarck hŽsite, il voudrait le moyen d'Žviter l'une et l'autre ŽventualitŽ.

 

Et la France ?

 

Les Franais patriotes, qui depuis seize ans rvent de revanche, croient qu'il n'y a rien de plus naturel que de saisir l'occasion qui peut-tre s'offrira. Mais, pour notre parti, la question n'est pas aussi simple ; elle ne l'est pas mme [118] pour messieurs les chauvins. Une guerre de revanche, faite avec l'alliance et sous l'Žgide de la Russie, pourrait amener une rŽvolution ou une contre-rŽvolution en France.

 

Au cas o une rŽvolution porterait les socialistes au pouvoir, l'alliance russe croulerait. D'abord les Russes feraient immŽdiatement la paix avec Bismarck pour se ruer avec les Allemands sur la France rŽvolutionnaire. Ensuite, la France ne porterait pas les socialistes au pouvoir en vue d'empcher par une guerre une rŽvolution en Russie. Mais cette ŽventualitŽ n'est gure probable.

 

La contre-rŽvolution monarchique l'est davantage. Le tsar dŽsire la restauration des OrlŽans, ses amis intimes, le seul gouvernement qui lui offre les conditions d'une bonne et solide alliance. Une fois la guerre commencŽe, on fera bon usage des officiers monarchistes pour la prŽparer. Ë la moindre dŽfaite partielle ‑ et il y en aura ‑, on criera que c'est la faute de la RŽpublique, que pour avoir des victoires et obtenir la coopŽration sans arrire-pensŽe de la Russie, il faut un gouvernement stable, monarchique, Philippe VII enfin. Les gŽnŽraux monarchistes agiront mollement afin de pouvoir mettre leur manque de succs sur le compte du gouvernement rŽpublicain ‑ et vlan, voici la monarchie rŽtablie. Philippe VII restaurŽ, ces rois et empereurs s'entendront immŽdiatement et, au lieu de s'entredŽvorer, ils se partageront l'Europe en avalant les petits ƒtats. La RŽpublique franaise tuŽe, on tiendra un nouveau Congrs de Vienne o, peut-tre, on prendra les pŽchŽs rŽpublicains et socialistes de la France comme prŽtexte pour lui refuser l'Alsace-Lorraine en totalitŽ ou en partie ; et les princes se moqueront des rŽpublicains assez na•fs pour avoir cru ˆ la possibilitŽ d'une alliance sincre entre le tsarisme et l'anarchie [119].

 

Du reste, est-il vrai que le gŽnŽral Boulanger dit ˆ qui veut l'Žcouter : Ç Il faut une guerre pour empcher la rŽvolution sociale È ? Si c'est vrai, que cela serve d'avis au parti socialiste. Ce bon Boulanger a des allures fanfaronnes que l'on peut pardonner ˆ un militaire, mais qui donnent une mince idŽe de son esprit politique. Ce n'est pas lui qui sauverait la RŽpublique. Entre les socialistes et les OrlŽans, il est possible qu'il s'arrange avec ces derniers, s'ils lui assurent l'alliance russe. Dans tous les cas, les rŽpublicains bourgeois de France sont dans la mme situation que le tsar : ils voient se dresser devant eux le spectre de la rŽvolution sociale et ils ne connaissent qu'un moyen de salut : la guerre.

 

En France, en Russie et en Allemagne, les ŽvŽnements tournent si bien ˆ notre profit que, pour le moment, nous ne pouvons dŽsirer que la continuation du statu quo. Si la rŽvolution Žclatait en Russie, elle crŽerait un ensemble de conditions des plus favorables. Une guerre gŽnŽrale, au contraire, nous rejetterait dans le domaine de l'imprŽvu (et des ŽvŽnements incalculables). La rŽvolution en Russie et en France serait retardŽe ; notre parti subirait le sort de la Commune de 1871. Sans doute, les ŽvŽnements finiront par tourner en notre faveur ; mais quelle perte de temps, quels sacrifices, quels nouveaux obstacles ˆ surmonter !

 

La force qui, en Europe, pousse ˆ une guerre est grande. Le systme militaire prussien, adoptŽ partout, demande douze ˆ seize ans pour son dŽveloppement complet ; aprs ce laps de temps, les cadres de rŽserve sont remplis d'hommes rompus au maniement des armes. Ces douze ˆ seize ans sont partout ŽcoulŽs ; partout on a douze ˆ seize classes annuelles qui ont passŽ par l'armŽe. On est donc prt partout, et les Allemands n'ont pas d'avantage spŽcial de ce c™tŽ. C'est dire que cette guerre qui nous menace jetterait dix millions de soldats sur le champ de bataille [120]. Et puis le vieux Guillaume va probablement mourir [121]. Bismarck verra sa situation plus ou moins ŽbranlŽe et peut-tre poussera-t-il ˆ la guerre comme moyen de se maintenir [122]. En effet, la Bourse croit partout ˆ la guerre, ds que le vieux [l'empereur d'Allemagne] fermera les yeux.

 

Si guerre il y a, elle ne se fera que dans le but d'empcher la rŽvolution [123] : en Russie, pour prŽvenir l'action commune de tous les mŽcontents, slavophiles, constitutionnels, nihilistes, paysans ; en Allemagne, pour maintenir Bismarck ; en France, pour refouler le mouvement victorieux des socialistes et pour rŽtablir la monarchie.

 

Entre socialistes franais et socialistes allemands, il n'existe pas de question alsacienne. Les socialistes allemands ne savent que trop que les annexions de 1871, contre lesquelles ils ont toujours protestŽ, ont ŽtŽ le point d'appui de la politique rŽactionnaire de Bismarck, tant ˆ l'intŽrieur qu'ˆ l'extŽrieur. Les socialistes des deux pays sont Žgalement intŽressŽs au maintien de la paix ; c'est eux qui paieraient les frais de la guerre.

 

 

Caractre Ç national È
du mouvement

 

 

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Votre proclamation fera son effet en France, je l'espre, et j'espre tout autant qu'elle passera inaperue en Allemagne. Voici pourquoi : ce ne sont pas des choses sŽrieuses, mais je crois devoir y appeler votre attention, pour vous engager ˆ les Žviter la prochaine fois [124].

 

Je ne veux pas parler de l'usage du mot patriote. Ce mot a un sens Žtroit ‑ ou bien si indŽterminŽ, c'est selon ‑ que moi je n'oserai jamais m'appliquer cette qualification. J'ai parlŽ aux non-Allemands comme Allemand, de mme que je parle aux Allemands comme simple international [125] ; je crois que vous auriez pu atteindre un plus grand effet si vous vous Žtiez dŽclarŽ simple Franais ‑ ce qui exprime un FAIT, un fait y compris les consŽquences logiques qui en dŽcoulent [126]. Mais passons, c'est affaire de style.

 

Vous avez encore parfaitement raison en vous glorifiant du passŽ rŽvolutionnaire de la France, et de croire que ce passŽ rŽvolutionnaire rŽpondra de son avenir socialiste. Mais il me ‑para”t que, arrivŽs lˆ, vous donnez un peu trop dans le blanquisme, c'est-ˆ-dire dans la thŽorie que la France est destinŽe ˆ jouer dans la rŽvolution prolŽtarienne le mme r™le (initiateur non seulement, mais aussi directeur[127] qu'elle a jouŽ dans la rŽvolution bourgeoise de 1789-98. Cela est contraire aux faits Žconomiques et politiques d'aujourd'hui. Le dŽveloppement industriel de la France est restŽ infŽrieur ˆ celui de l'Angleterre ; il est infŽrieur en ce moment ˆ celui de l'Allemagne qui a fait des pas de gŽant depuis 1860 ; le mouvement ouvrier en France aujourd'hui ne peut se comparer ˆ celui de l'Allemagne. Mais ni Franais, ni Allemands, ni Anglais n'auront, ˆ eux seuls, la gloire d'avoir ŽcrasŽ le capitalisme ; si la France ‑ PEUT-æTRE ‑ donne le signal [128], ce sera en Allemagne, le pays le plus profondŽment travaillŽ par le socialisme et o la thŽorie a le plus profondŽment pŽnŽtrŽ les masses, que la lutte se dŽcidera, et encore ni la France, ni l'Allemagne n'auront dŽfinitivement assurŽ la victoire tant que l'Angleterre restera aux mains de la bourgeoisie.

 

L'Žmancipation prolŽtarienne ne peut tre qu'un fait international, si vous t‰chez d'en faire un fait simplement franais, vous la rendez impossible.

 

La direction exclusivement franaise de la rŽvolution bourgeoise ‑ bien qu'elle fžt inŽvitable, gr‰ce ˆ la btise et ˆ la l‰chetŽ des autres nations ‑ a menŽ, vous savez o ? Ë NapolŽon, ˆ la conqute, ˆ l'invasion de la Sainte-Alliance. Vouloir attribuer ˆ la France dans l'avenir le mme r™le, c'est dŽnaturer le mouvement prolŽtarien international, c'est mme, comme le font les blanquistes, rendre la France ridicule, car au-delˆ de vos frontires on se moque de ses prŽtentions.

 

Mais voyez o a mne. Vous parlez de ce que Ç la France relevait en 1889, dans son immortel Congrs de Paris, le drapeau etc. È. Comme vous ririez, ˆ Paris, si les Belges voulaient dire que la Belgique, dans SON immortel Congrs de Bruxelles de 1891, ou la Suisse dans SON immortel Congrs de Zurich... De plus, les actes de ces congrs sont des actes, non pas franais, belges ou suisses, mais internationaux.

 

Et puis vous dites : le parti ouvrier franais ne fait qu'un avec la social-dŽmocratie allemande contre l'empire d'Allemagne, avec le parti ouvrier belge contre la monarchie des Cobourg, avec les Italiens contre la monarchie de Savoie, etc.

 

Ë tout cela, il n'y aurait rien ˆ redire, si vous aviez ajoutŽ : et tous ces partis ne font qu'un avec nous contre la RŽpublique bourgeoise qui nous opprime, nous panamise et nous lie au tsar russe. Votre RŽpublique, aprs tout, a ŽtŽ faite par le vieux Guillaume et Bismarck [129], elle est tout aussi bourgeoise que tous nos gouvernements monarchiques, et il ne faut pas croire qu'avec le cri de Ç vive la RŽpublique È, le lendemain de Panama, vous trouveriez un seul adhŽrent dans toute l'Europe. La forme rŽpublicaine n'est plus que la simple nŽgation ‑de la monarchie ‑ et le bouleversement de la monarchie s'accomplira comme simple corollaire de la rŽvolution ; en Allemagne, les partis bourgeois sont si achevŽs que nous devrons passer immŽdiatement de la monarchie ˆ la rŽpublique sociale. Vous ne pouvez donc plus opposer votre rŽpublique bourgeoise aux monarchies comme une chose ˆ laquelle les autres nations auraient ˆ aspirer. Votre rŽpublique et nos monarchies, c'est tout un vis-ˆ-vis du prolŽtariat ; si vous nous aidez contre nos bourgeois monarchiques, nous vous aiderons contre vos bourgeois rŽpublicains. C'est le cas de rŽciprocitŽ, nullement de dŽlivrance des pauvres monarchiques par les gŽnŽreux rŽpublicains franais : cela ne cadre pas avec l'idŽe internationale et encore moins la situation historique qui ont mis votre rŽpublique au pied du tsar. N'oubliez pas que, si la France fait la guerre ˆ l'Allemagne dans l'intŽrt et avec l'aide du tsar, c'est l'Allemagne qui sera le centre rŽvolutionnaire.

 

Mais il y a encore une autre histoire trs malencontreuse. Vous tes Ç un avec la social-dŽmocratie allemande contre l'Empire d'Allemagne È. Cela a ŽtŽ traduit dans la presse bourgeoise : Ç gegen das deutsche Reich È. Et c'est ce que tout le monde y verrait. Car Ç Empire È signifie Ç Reich È aussi bien que Ç Kaisertum È (rŽgime impŽrial) ; mais dans Ç Reich È l'accent est mis sur le pouvoir central comme reprŽsentant de l'unitŽ nationale, et pour celle-ci, la condition politique de leur existence, les socialistes allemands se battraient ˆ outrance. Jamais nous ne voudrions rŽduire l'Allemagne ˆ l'Žtat de division et d'impuissance d'avant 1866 [130]. Si vous aviez dit contre l'empereur, ou contre le rŽgime impŽrial, on n'aurait pu dire grand-chose, bien que ce pauvre Guillaume ne soit pas de taille ˆ mŽriter d'tre honorŽ de la sorte ; c'est la classe possŽdante, foncire et capitaliste qui est l'ennemi ; et c'est si bien compris en Allemagne que nos ouvriers ne comprendraient pas le sens de votre offre de les aider ˆ vaincre le toquŽ de Berlin.

 

J'ai donc priŽ Liebknecht de ne pas parler de votre proclamation (dans la presse), tant que les feuilles bourgeoises n'en parlaient pas ; mais si, en se fondant sur cette malheureuse expression, on attaquait nos hommes comme des tra”tres, cela donnerait lieu ˆ un dŽbat assez pŽnible.

 

En rŽsumŽ : un .peu plus de rŽciprocitŽ ne pourrait pas nuire ‑ l'ŽgalitŽ entre nations est aussi nŽcessaire que celle entre individus.

 

De l'autre c™tŽ, votre faon de parler de la rŽpublique comme d'une chose dŽsirable en elle-mme pour le prolŽtariat, et de la France comme du peuple Žlu, vous empche de parler du fait ‑ dŽsagrŽable, mais irrŽfutable ‑ de l'alliance russe ou plut™t du vasselage russe (auquel est soumise la RŽpublique franaise).

 

Eh bien, c'est assez, je crois. J'espre vous avoir convaincu que dans la premire chaleur de votre patriotisme renaissant vous avez un peu dŽpassŽ le but.


 

 

Le socialisme en Allemagne

 

 

I

 

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Le socialisme allemand est entrŽ en scne bien avant 1848. Il y eut alors deux courants indŽpendants. D'abord, un mouvement ouvrier, succursale du mouvement ouvrier franais, mouvement qui a produit, comme une de ses phases, le communisme utopique de Weitling. Puis, un mouvement thŽorique, issu de la dŽb‰cle de la philosophie hŽgŽlienne ; ce mouvement, ds son origine, est dominŽ par le nom de Marx. Le Manifeste communiste de janvier 1848 marque la fusion de ces deux courants, fusion achevŽe et voulue irrŽvocable dans la fournaise de la rŽvolution, o tous, ouvriers et philosophes, payrent Žgalement de leur personne [131].

 

Aprs la dŽfaite de la rŽvolution europŽenne en 1849, le socialisme Žtait rŽduit, en Allemagne, ˆ une existence occulte. Ce ne fut qu'en 1862 que Lassalle, condisciple de Marx, arbora de nouveau le drapeau socialiste. Mais ce n'Žtait plus le socialisme hardi du Manifeste : ce que Lassalle demandait dans l'intŽrt de la classe ouvrire, c'Žtait la production coopŽrative assistŽe par le crŽdit de l'ƒtat, reproduction du programme des ouvriers parisiens affiliŽs, avant 1848, au National de Marrast, soit le programme opposŽ par les rŽpublicains purs ˆ l'organisation du travail de Louis Blanc. Le socialisme lassallŽen, on le voit, Žtait bien modeste. NŽanmoins, son apparition sur la scne marque le point de dŽpart de la deuxime phase du socialisme en Allemagne, car le talent, la fougue, l'Žnergie indomptable de Lassalle rŽussirent ˆ crŽer un mouvement ouvrier, auquel se rattache, par des liens positifs ou nŽgatifs, amicaux ou hostiles, tout ce qui pendant dix ans a remuŽ le prolŽtariat allemand [132].

 

En effet, le lassallŽanisme pur pouvait-il, ˆ lui seul, suffire aux aspirations socialistes de la nation qui avait produit le Manifeste ? C'Žtait impossible. Aussi, gr‰ce surtout aux efforts de Liebknecht et de Bebel, il se forma bient™t un parti ouvrier qui proclama hautement les principes de 1848. Puis, en 1867, trois ans aprs la mort de Lassalle, parut Le Capital de Marx. De ce jour date le dŽclin du lassallŽanisme spŽcifique. Les thŽories du Capital devinrent de plus en plus la propriŽtŽ commune de tous les socialistes allemands, lassallŽens et autres. Plus d'une fois, des groupes entiers de lassallŽens passrent en masse, tambour et drapeaux dŽployŽs, au nouveau parti de Bebel et de Liebknecht, appelŽ le parti d'Eisenach [133]. Comme ce parti ne cessa pas de cro”tre en force, il y eut bient™t hostilitŽ ˆ outrance entre les lassallŽens et leurs rivaux ; on se battait mme ˆ coups de gourdins, juste au moment o il n'y avait plus de diffŽrend rŽel entre les combattants, o les principes, les arguments et mme les moyens de lutte des uns Žtaient, pour tous les points essentiels, identiques avec ceux des autres.

 

C'est alors que la prŽsence au Reichstag de dŽputŽs des deux fractions socialistes [134] leur imposa la nŽcessitŽ d'une action commune. Vis-ˆ-vis des dŽputŽs bourgeois [135] le ridicule de cette hostilitŽ traditionnelle sauta aux yeux. La situation devint insupportable. Alors, en 1875, la fusion se fit. Depuis, les frres ennemis n'ont pas cessŽ de former une famille cordialement unie. S'il y avait eu la moindre chance de division, Bismarck lui-mme se chargea de l'Žcarter, lorsqu'en 1878, par sa fameuse loi d'exception, il mit le socialisme allemand hors du droit commun. Les coups de marteau de la persŽcution commune achevrent de forger en une masse homogne, lassallŽens et eisenachiens. Aujourd'hui, tandis que le parti socialiste publie une Ždition officielle des Ïuvres de Lassalle, il Žcarte du programme, les anciens lassallŽens, donc les dernires traces du lassallŽanisme spŽcifique.

 

Ai-je besoin de raconter en dŽtail les pŽripŽties, les luttes, les revers, les triomphes qui ont marquŽ la carrire du parti allemand ? ReprŽsentŽ par deux dŽputŽs [136] et cent mille Žlecteurs ds que le suffrage universel en 1866 lui ouvrit les portes du Reichstag, il y compte aujourd'hui 36 dŽputŽs et un million et demi d'Žlecteurs, chiffre qu'aucun des autres partis n'a atteint aux Žlections de 1890. Onze ans de mise hors la loi et d'Žtat de sige ont abouti ˆ quadrupler ses forces et ˆ le rendre le plus fort de l'Allemagne. En 1867, les dŽputŽs bourgeois [137] pouvaient prendre leurs collgues socialistes pour des tres Žtranges, arrivŽs d'une autre plante ; aujourd'hui, qu'ils le veuillent ou non, ils doivent les regarder comme l'avant-garde du pouvoir ˆ venir. Le parti socialiste qui a renversŽ Bismarck, le parti qui, aprs onze ans de lutte, a brisŽ la loi contre les socialistes, le parti socialiste qui comme une marŽe montante dŽborde toutes les digues, envahit villes et campagnes, mme dans les VendŽes [138] les plus rŽactionnaires ‑ ce parti, aujourd'hui, est arrivŽ au point o, par un calcul presque mathŽmatique, il peut fixer l'Žpoque de son avnement au pouvoir [139].

 

Le nombre des votes socialistes fut :

 

En 1871.................................... 101 927

En 1874.................................... 351 670

En 1877.................................... 493 447

En 1884.................................... 549 999

En 1887.................................... 763 128

En 1890....................................... 1 427 298

 

Depuis les dernires Žlections, le gouvernement a fait de son mieux pour pousser les masses populaires vers le socialisme ; il a poursuivi les coalitions et les grves ; il a maintenu, mme pendant la disette actuelle, les droits d'entrŽe qui renchŽrissent le pain et la viande du pauvre au bŽnŽfice des grands propriŽtaires fonciers. Aux Žlections de 1895, nous pouvons donc compter sur deux millions et demi de voix au moins, qui atteindront, vers 1900, de trois et demi ˆ quatre millions, sur dix millions d'Žlecteurs inscrits, ce qui para”tra dr™lement Ç fin de sicle È ˆ nos bourgeois.

 

Vis-ˆ-vis de cette masse compacte et toujours croissant de socialistes, il n'y a que les partis bourgeois divisŽs. En 1890, les conservateurs (deux fractions additionnŽes) eurent 1 737 417 voix, les nationaux-libŽraux 1 177 807, les progressistes (radicaux) 1 159 915, le centre catholique 1 342 113. Voilˆ une situation o un parti solide comptant deux millions et demi de voix suffira pour faire capituler tout gouvernement.

 

Mais les voix des Žlecteurs sont loin de constituer la force principale du socialisme allemand. Chez nous, on n'est Žlecteur qu'ˆ l'‰ge de vingt-cinq ans, mais ˆ vingt ans on est soldat. Or, comme c'est prŽcisŽment la jeune gŽnŽration qui fournit au parti ses conscrits les plus nombreux, il s'ensuit que l'armŽe allemande devient de plus en plus infectŽe de socialisme. Aujourd'hui, nous avons un soldat sur cinq, dans quelques annŽes nous en aurons un sur trois ; vers 1900, l'armŽe, jadis l'ŽlŽment prussien par excellence en Allemagne, sera socialiste dans sa majoritŽ. Cela s'impose comme une fatalitŽ. Le gouvernement de Berlin la voit arriver tout aussi bien que nous, mais il est impuissant. L'armŽe lui Žchappe [140].

 

Combien de .fois les bourgeois ne nous ont-ils pas sommŽs de renoncer ˆ tout jamais ˆ l'emploi des moyens rŽvolutionnaires, de rester dans la lŽgalitŽ, maintenant que la lŽgislation exceptionnelle est tombŽe et que le droit commun est rŽtabli pour tous, y compris les socialistes !

 

Malheureusement, nous ne sommes pas dans le cas de faire plaisir ˆ messieurs les bourgeois. Ce qui n'empche pas que, pour le moment, ce n'est pas nous que la lŽgalitŽ tue. Elle travaille si bien pour nous que nous serions fous d'en sortir tant que cela dure. Reste ˆ savoir si ce ne sera pas les bourgeois et leur gouvernement qui en sortiront les premiers pour nous Žcraser par la violence. C'est ce que nous attendrons. Tirez les premiers, messieurs les bourgeois !

 

Nul doute, ils tireront les premiers. Un beau jour, les bourgeois allemands et leur gouvernement, dŽgožtŽs d'assister, les bras croisŽs, aux dŽbordements toujours croissants du socialisme, auront recours ˆ l'illŽgalitŽ et ˆ la violence. Ë quoi bon ! La force peut Žcraser une petite secte, du moins sur un terrain limitŽ ; mais il n'y a pas de force qui puisse extirper un parti de deux millions d'hommes rŽpandus sur toute la surface d'un grand Empire. La violence contre-rŽvolutionnaire [141] pourra retarder de quelques annŽes le triomphe du socialisme, mais ce sera pour le rendre d'autant plus complet.

 

 

II

 

 

Tout ce qui prŽcde a ŽtŽ dit sous la rŽserve que l'Allemagne pourra suivre en paix son dŽveloppement Žconomique et politique. Une guerre changerait tout cela. Et la guerre peut Žclater d'un moment ˆ l'autre.

 

La guerre aujourd'hui, tout le monde sait ce que cela signifie. Ce serait la Russie et la France d'un c™tŽ, l'Allemagne, l'Autriche, peut-tre l'Italie, de l'autre. Les socialistes de tous ces pays, enr™lŽs bon grŽ mal grŽ, seraient forcŽs de se battre les uns contre les autres : que fera, que deviendra en pareil cas le parti socialiste allemand ?

 

L'Empire allemand est une monarchie aux forces semi-fŽodales, mais dominŽe, en dernier lieu, par les intŽrts Žconomiques de la bourgeoisie. Gr‰ce ˆ Bismarck, cet empire a commis d'Žnormes fautes. Sa politique intŽrieure, policire, tracassire, mesquine, indigne du gouvernement d'une grande nation, lui a valu le mŽpris de tous les pays bourgeoisement libŽraux ; sa politique extŽrieure a suscitŽ la mŽfiance, sinon la haine, des nations voisines. Par l'annexion violente de l'Alsace-Lorraine, le gouvernement allemand a rendu impossible, pour longtemps, toute rŽconciliation avec la France, sans gagner aucun avantage rŽel pour lui-mme ; il a rendu la Russie l'arbitre de l'Europe. Cela est si Žvident que, ds le lendemain de Sedan, le Conseil gŽnŽral de l'Internationale a pu prŽdire la situation europŽenne d'aujourd'hui. Dans son Adresse du 9 septembre 1870, il a dit :

 

Ç Les patriotes teutons s'imaginent-ils en rŽalitŽ qu'ils vont assurer la libertŽ et la paix en jetant la France dans les bras de la Russie ? Si l'Allemagne, emportŽe par la fortune des armes, l'arrogance de la victoire, l'intrigue dynastique, commettait une spoliation territoriale sur la France, de deux choses l'une : ou elle devrait se faire ouvertement l'instrument de la politique conquŽrante de la Russie, ou bien, aprs un court armistice, elle aurait ˆ braver une nouvelle guerre dŽfensive, une guerre qui au lieu de ressembler ˆ ces guerres "localisŽes" d'invention moderne, serait une guerre contre les races slave et romane combinŽes [142]. È

 

Sans aucun doute : vis-ˆ-vis de cet Empire allemand, la RŽpublique franaise, telle qu'elle est, reprŽsente la rŽvolution bourgeoise, il est vrai, mais toujours la rŽvolution. Mais ds que cette rŽpublique se place sous les ordres du tsarisme russe, ce n'est plus la mme chose. Le tsarisme russe, c'est l'ennemi de tous les peuples occidentaux, mme des bourgeois de tous ces peuples ! Les hordes czariennes, en envahissant l'Allemagne, y porteraient l'esclavage au lieu de la libertŽ, la destruction au lieu du dŽveloppement, l'abrutissement au lieu du progrs. Bras dessus, bras dessous avec le tsar, la France ne peut apporter ˆ l'Allemagne aucune idŽe libŽratrice ; le gŽnŽral franais qui parlerait aux Allemands de rŽpublique ferait rire l'Europe et l'AmŽrique. Ce serait l'abdication du r™le rŽvolutionnaire de la France ; ce serait permettre ˆ l'empire bismarckien de se poser comme le reprŽsentant du progrs occidental contre la barbarie de l'Orient.

 

Mais, derrire l'Allemagne, il y a le parti socialiste allemand, et l'avenir prochain du pays. Ds que ce parti arrivera au pouvoir, il ne pourra s'y maintenir sans rŽparer les injustices commises par ses prŽdŽcesseurs envers d'autres nationalitŽs. Il devra prŽparer la restauration de la Pologne, trahie aujourd'hui si honteusement par la bourgeoisie franaise ; il devra faire appel au Schleswig du Nord et ˆ l'Alsace-Lorraine pour dŽcider librement de leur avenir politique. Toutes ces questions se rŽsoudront donc sans effort et dans un avenir prochain, si on laisse l'Allemagne ˆ elle-mme. Entre une France et une Allemagne socialistes, il ne peut y avoir de question d'Alsace-Lorraine : le cas sera vidŽ en un clin d'Ïil. Il s'agit donc d'attendre une dizaine d'annŽes. Le prolŽtariat franais, anglais, allemand attend encore sa dŽlivrance ; les patriotes alsaciens-lorrains ne sauraient-ils pas attendre ? Y a-t-il lˆ matire ˆ dŽvaster tout un continent et ˆ le soumettre, en fin de compte, au knout tsarien ? Le jeu en vaut-il la chandelle ?

 

En cas de guerre, l'Allemagne d'abord, la France ensuite en seront le thŽ‰tre principal ; ces deux pays surtout en payeront les frais sous forme de dŽvastation. Il y a plus. Cette guerre, ds l'abord, se distinguera par une sŽrie de trahisons entre alliŽs comme mme les annales de la tra”tresse diplomatie ne nous en ont pas fourni de pareilles jusqu'ici ; la France ou l'Allemagne, ou toutes les deux, en seront les principales victimes. Il est donc presque sžr que ni l'un ni l'autre de ces deux pays, en vue des risques ˆ courir, ne provoquera la lutte ouverte [143]. Mais la Russie, protŽgŽe par sa position gŽographique et par sa situation Žconomique contre les suites les plus funestes d'une sŽrie de dŽfaites, la Russie officielle seule peut trouver son intŽrt ˆ faire Žclater une si terrible guerre : c'est elle qui y poussera. Dans tous les cas, Žtant donnŽ la situation politique actuelle, il y a dix contre un ˆ parier qu'au premier coup de canon sur la Vistule, les armŽes franaises marcheront sur le Rhin.

 

Alors, l'Allemagne combat pour son existence mme. Victorieuse, elle ne trouve rien ˆ annexer. Ë l'Est comme ˆ l'Ouest, elle ne trouve que des provinces de langue Žtrangre ; de celles-lˆ, elle n'en a dŽjˆ que trop. Battue, ŽcrasŽe entre le marteau franais et l'enclume russe, elle devra cŽder ˆ la Russie l'ancienne Prusse et les provinces polonaises, au Danemark le Schleswig, ˆ la France toute la rive gauche du Rhin, Mme si la France s'y refusait, son alliŽe lui imposerait cette conqute ; ce qu'il faut avant tout ˆ la Russie, c'est une cause d'inimitiŽ permanente entre la France et l'Allemagne. RŽconciliez ces deux grands pays, et c'en est fait de la suprŽmatie russe en Europe. DŽmembrŽe de cette sorte, l'Allemagne serait incapable de remplir sa part dans la mission civilisatrice europŽenne [144] ; rŽduite au r™le que lui avait imposŽ NapolŽon aprs Tilsit, elle ne pourrait vivre qu'en prŽparant une nouvelle guerre de rŽhabilitation nationale ; mais en attendant, elle serait l'humble instrument du tsar qui ne manquerait pas de s'en servir ‑ contre la France.

 

Que deviendrait en pareille circonstance le parti socialiste allemand ? Il va sans dire que ni le tsar ni les rŽpublicains bourgeois franais, ni le gouvernement allemand lui-mme ne laisseraient passer une si bonne occasion pour Žcraser le seul parti qui est, pour eux tous, l'ennemi. Nous avons vu comment Thiers et Bismarck se sont donnŽ la main sur les ruines du Paris de la Commune ; nous verrions alors le tsar, Constans, Caprivi (ou leurs successeurs quelconques) s'embrasser sur le cadavre du socialisme allemand.

 

Mais le parti socialiste allemand, gr‰ce aux efforts et aux sacrifices ininterrompus de trente ans, a conquis une position qu'aucun des autres partis socialistes n'occupe, une position qui lui assure l'ŽchŽance, ˆ bref dŽlai, du pouvoir politique. L'Allemagne socialiste occupe dans le mouvement ouvrier international le poste le plus avancŽ, le plus honorable, le plus responsable ; elle a le devoir de maintenir ce poste envers et contre tous.

 

Maintenant, si la victoire des Russes sur l'Allemagne signifie l'Žcrasement du socialisme dans ce pays, quel sera le devoir des socialistes allemands dans cette ŽventualitŽ ? Devront-ils subir passivement les ŽvŽnements qui les menacent d'extinction, abandonner sans rŽsistance le poste conquis, dont ils rŽpondent devant le prolŽtariat du monde entier ?

 

ƒvidemment non. Dans l'intŽrt de la rŽvolution europŽenne, ils sont tenus de dŽfendre toutes les positions acquises, de ne pas capituler, pas plus devant l'ennemi du dehors que devant l'ennemi du dedans ; et cela, ils ne peuvent l'accomplir qu'en combattant ˆ outrance la Russie et ses alliŽs, quels qu'ils soient. Si la RŽpublique franaise se mettait au service de Sa MajestŽ le tsar et autocrate de toutes les Russies, les socialistes allemands la combattraient ˆ regret, mais ils la combattraient tout de mme. La RŽpublique franaise peut reprŽsenter, vis-ˆ-vis de l'Empire allemand, la rŽvolution bourgeoise. Mais vis-ˆ-vis de la rŽpublique des Constans, des Rouvier, et mme des Clemenceau, surtout de la rŽpublique qui travaille pour le tsar russe, le socialisme allemand reprŽsente la rŽvolution prolŽtarienne.

 

Une guerre o Russes et Franais envahiraient l'Allemagne serait pour celle-ci une guerre ˆ mort o, pour assurer son existence nationale, elle devrait avoir recours aux moyens les plus rŽvolutionnaires. Le gouvernement actuel certainement ne dŽcha”nerait pas la rŽvolution, ˆ moins qu'on ne l'y for‰t. Mais il y a un parti fort, qui l'y forcerait ou, en cas de besoin, l'y remplacerait : le parti socialiste.

 

Nous n'avons pas oubliŽ le grandiose exemple que la France nous a donnŽ en 1793. Le centenaire de quatre-vingt-treize approche. Si la soif de conqute du tsar et l'impatience chauvine de la bourgeoisie franaise arrtent la marche victorieuse mais paisible des socialistes allemands, ces derniers sont prts, soyez-en sžrs, ˆ prouver que les prolŽtaires allemands d'aujourd'hui ne sont pas indignes des sans-culottes franais d'y il y a cent ans, et que 1893 vaudra bien 1793. Et alors les soldats de Constans, en mettant le pied sur le sol allemand, seront saluŽs du chant de :

 

Quoi, ces cohortes Žtrangres

Feraient la loi dans nos foyers ?

 

RŽsumons. La paix assure la victoire du parti socialiste allemand dans une dizaine d'annŽes ; la guerre lui offre ou la victoire dans deux ou trois ans, ou la ruine complte, au moins pour quinze ˆ vingt ans. Dans cette position, les socialistes allemands devraient tre fous pour prŽfŽrer le va-tout de la guerre au triomphe assurŽ que leur promet la paix. Il y a plus. Aucun socialiste, de n'importe quel pays, ne peut dŽsirer le triomphe guerrier, soit du gouvernement allemand actuel, soit de la rŽpublique bourgeoise franaise ; encore moins celui du tsar, qui Žquivaudrait ˆ la subjugation de l'Europe [145]. Voilˆ pourquoi les socialistes demandent partout que la paix soit maintenue. Mais si nŽanmoins la guerre doit Žclater, une chose est certaine. Cette guerre, o quinze ˆ vingt millions d'hommes armŽs s'entrŽgorgeraient et dŽvasteraient l'Europe comme jamais elle n'a ŽtŽ dŽvastŽe, cette guerre ou bien amnerait le triomphe immŽdiat du socialisme, ou bien elle bouleverserait tellement l'ancien ordre des choses, elle laisserait partout aprs elle un tel monceau de ruines que la vieille sociŽtŽ capitaliste deviendrait plus impossible que jamais, et que la rŽvolution sociale, retardŽe de dix ˆ quinze ans, n'en serait que plus radicale et plus rapidement parcourue.

 

Ainsi s'achve l'article l'Almanach ouvrier franais [146]. Il a ŽtŽ Žcrit ˆ la fin de l'ŽtŽ, alors que l'ivresse du champagne de Cronstadt [147] Žchauffait encore la tte de la bourgeoisie franaise et que l'enthousiasme patriotique atteignait son paroxysme avec les grandes manÏuvres sur les champs de bataille de 1814 entre Seine et Marne. Ë ce moment-lˆ, la France ‑ celle qui trouve son expression dans la grande presse et la majoritŽ de la Chambre ‑ Žtait effectivement mžre pour faire assez de grosses btises au service de la Russie, et la possibilitŽ Žtait grande que la guerre passe ˆ l'avant-scne. Et pour que, si elle se rŽalise, il ne surgisse pas de malentendu entre les socialistes franais et allemands, j'ai tenu pour nŽcessaire de clarifier pour les premiers quelle devait tre, d'aprs ma conviction, l'attitude que ces derniers devaient adopter face ˆ une telle guerre.

 

Dans l'intervalle cependant, les provocateurs de guerre russes ont dž en rabattre considŽrablement. La disette en Russie, qui laisse prŽsager une famine, a d'abord ŽtŽ connue. Puis vint l'Žchec de l'emprunt russe ˆ Paris, qui signifie l'effondrement dŽfinitif du crŽdit de l'ƒtat russe...

 

En un mot : en Russie, nous n'assistons pas ˆ une disette unique, occasionnelle, mais ˆ une gigantesque crise Žconomique prŽparŽe par une trs longue et silencieuse rŽvolution Žconomique et rendue simplement aigu‘ par une mauvaise rŽcolte. Mais cette crise aigu‘ prend ˆ son tour pour sa part une forme chronique et menace de durer des annŽes. Du point de vue Žconomique, elle accŽlre la dissolution de la commune agraire de communisme archa•que, l'enrichissement et la transformation en grands propriŽtaires fonciers des koulaks, et en gŽnŽral le transfert de la propriŽtŽ nobiliaire et agraire dans les mains de la nouvelle bourgeoisie.

 

Pour l'Europe, elle signifie pour le moment la paix. Les clameurs de guerre russes s'Žteindront pour une sŽrie d'annŽes. Des millions de paysans russes meurent de faim au lieu que des millions de soldats tombent sur les champs de bataille. Attendons encore un peu ce qui va en rŽsulter pour le despotisme russe.


 

 

 

Le parti de classe. Tome IV. ActivitŽs de classe du parti

 

Index des noms citŽs

 

 

 

 

 

 

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ADAM : ouvrier franais ; blanquiste, membre de la SociŽtŽ universelle des communistes rŽvolutionnaires, fondŽe sous la monarchie de Juillet ; en 1850, l'un des dirigeants de l'Association des ŽmigrŽs blanquistes de Londres.

 

ADLER Georg, 1863-1908 Žconomiste bourgeois, publiciste ; socialiste de la chaire, auteur de divers ouvrages traitant de questions politiques et sociales.

 

ADLER Victor, 1852-1918 : mŽdecin, participa ˆ la fondation du parti social-dŽmocrate autrichien, dont il fut l'un des dirigeants les plus marquants ; entretint une correspondance suivie avec Engels, de 1889 ˆ 1895 ; dŽlŽguŽ au congrs de 1889 de l'Internationale ouvrire socialiste ; rŽdacteur de la Gleichheit et de la Arbeiter-Zeitung ˆ Vienne ; plus tard, fit partie de l'aile opportuniste du parti social-dŽmocrate autrichien et de la IIe Internationale.

 

ALBERT Alexandre (Martin, nom de famille vŽritable), 1815-1895 : ouvrier franais, socialiste ; membre de l'organisation secrte blanquiste, crŽŽe sous la monarchie de Juillet ; membre du gouvernement provisoire en 1848.

 

ALERINI Charles (nŽ vers 1842) : anarchiste franais, nŽ en Corse ; membre de la Section marseillaise de

l'A. I.T., organisa la Commune ˆ Marseille en avril 1871 ; aprs son Žcrasement, Žmigra en Italie, puis en Espagne, o il propagea l'anarchisme ; rŽdacteur du journal SolidaritŽ rŽvolutionnaire ˆ Barcelone ; en 1872, dŽlŽguŽ au congrs de La Haye de l'A.I.T. ; fut exclu le 30 mai 1873 par dŽcision du Conseil gŽnŽral.

 

ALONZO : dirigeant ouvrier anglais.

 

AMOUROUX : communard, membre du comitŽ central de la Commune.

 

ANNECKE Friedrich, vers 1818-1872 : officier d'artillerie prussien, chassŽ de l'armŽe prussienne en 1846 pour activitŽ rŽvolutionnaire ; membre de la Commune de Cologne, de la Ligue des communistes ; fondateur et secrŽtaire de l'Union ouvrire de Cologne en 1848 ; commandant de l'artillerie dans l'armŽe rŽvolutionnaire durant le soulvement de 1849 de Bade et du Palatinat ; colonel durant la guerre civile aux ƒtats-Unis (1861-1865) dans l'armŽe nordiste.

 

APPLEGARTH Robert, 1833-1925 charpentier, l'un des dirigeants rŽformistes des syndicats anglais ; secrŽtaire gŽnŽral de la confŽdŽration des charpentiers et menuisiers de 1862 ˆ 1871 ; membre du Conseil des syndicats de Londres, ainsi que du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. en 1865, 1868-1872 ; dŽlŽguŽ au congrs de B‰le de l'A.I.T. de 1869 ; dirigeant de la Ligue pour la RŽforme ; en 1871, il refusa de signer l'Adresse du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. sur la Guerre civile en France ; cessa plus tard toute activitŽ dans le mouvement.

 

ASSI Adolphe-Alphonse, 1841-1886 : ouvrier mŽcanicien ; proudhonien de gauche, membre de la section parisienne de l'A.I.T., poursuivi lors du troisime procs de l'Internationale. Il organisa les rŽsistances ouvrires au Creusot en 1870. Membre du comitŽ central de la Garde nationale et de la Commune de Paris pour le XIe arrondissement ; aprs la chute de la Commune, dŽportŽ en Nouvelle-CalŽdonie o il mourut.

 

AUER Ignace, 1846-1907 : sellier, publiciste ; adhŽra ds 1869 au parti ouvrier social-dŽmocrate allemand ; secrŽtaire de l'exŽcutif du parti en 1874 ; de 1875 ˆ 1877, l'un des deux secrŽtaires du parti ouvrier socialiste d'Allemagne ; rŽdacteur de la Berliner Freie Presse en 1877 ; dŽputŽ au Reichstag (1877-1878, 1880-1881, 1884-1887 et 1890-1907) ; jusqu'en 1893, il soutint surtout Bebel dans les polŽmiques intŽrieures du parti, puis il glissa de plus en plus vers l'opportunisme.

 

AVELING Edward, 1851-1898 : biologiste et auteur dramatique ; traduisit, avec Samuel Moore, le premier livre du Capital ; compagnon de la fille de Marx Eleanor ; milite ˆ la Social Democratic Federation ; en 1884, participe ˆ la fondation de la Socialist League, dont il se retira lorsque celle-ci vira ˆ l'anarchisme ; avec sa compagne, organisa le mouvement de masse et les syndicats des ouvriers non qualifiŽs dans les annŽes 1880 ; dŽlŽguŽ au congrs de l'Internationale ouvrire socialiste de 1889.

 

AVRIAL Augustin, 1840 : ouvrier mŽcanicien ; proudhonien de gauche, membre du Conseil fŽdŽral de la section parisienne de lÕA.I.T. ; membre de la Commune, condamnŽ ˆ mort, il parvint ˆ se rŽfugier en Alsace, puis ˆ Žmigrer en Angleterre, o il participa durant quelque temps ˆ la Section franaise de 1871.

 

 

BABEUF Franois-No‘l (Gracchus), 1760-1797 : rŽvolutionnaire franais, fondateur du premier Ç parti communiste rŽellement agissant È (Marx) ; dirigea avec Buonarroti et DarthŽ, la conjuration des ƒgaux en 1796 ; exŽcutŽ en 1797.

 

BAKOUNINE Micha•l Alexandrovitch, 1814-1876, nŽ ˆ Torjok en Russie Žmigra en France o il se lia avec George Sand, Proudhon et les dirigeants de l'Žmigration polonaise ; participa ˆ l'insurrection de Dresde en 1849 ; influena idŽologiquement le mouvement populiste ; adhŽra ˆ la Ire Internationale et mena une lutte acharnŽe contre le Conseil central de Londres et Marx ; fut exclu de l'Internationale en 1872 au congrs de La Haye.

 

BANGYA Jean, 1817-1868 : journaliste et officier hongrois ; participa en 1848-1849 ˆ la rŽvolution de Hongrie ; aprs la dŽfaite, devint l'Žmissaire de Kossuth ˆ l'Žtranger, en mme temps qu'il servit la police ; entra dans l'armŽe turque sous le nom de Mohamed Bey ; fut l'agent de la Turquie au Caucase lors de la guerre de Tchercassie contre la Russie, de 1855 ˆ 1858.

 

BARBéS Armand, 1809-1870, nŽ ˆ Pointe-ˆ-Pitre en Guadeloupe : l'un des chefs de la sociŽtŽ secrte des Saisons sous la monarchie de Juillet ; condamnŽ ˆ mort aprs le mouvement du 12 mai 1839, sa peine fut commuŽe en dŽtention perpŽtuelle ; libŽrŽ de prison en 1848, fut Žlu dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe constituante o il soutint la politique de Ledru-Rollin. Il participa au mouvement du 15 mai 1849, fut emprisonnŽ ˆ Belle-Ile-en-Mer ; amnistiŽ en 1854 par NapolŽon III, se condamna ˆ un exil volontaire ; cessa peu aprs de toute activitŽ politique.

 

BARRY Maltman, 1842-1909 : journaliste anglais, socialiste ;

membre de l'A.I.T., fut dŽlŽguŽ au congrs de La Haye en 1872 ; entra au Conseil gŽnŽral en 1872 et au Conseil fŽdŽral britannique jusqu'en 1873 ; il soutint Marx-Engels dans leur lutte contre les partisans de Bakounine et les dirigeants rŽformistes anglais des syndicats ; continua son activitŽ militante aprs la dissolution de l'Internationale. Journaliste au conservateur Standard, il soutint la prŽtendue Ç aile socialiste È des conservateurs dans les annŽes 1890.

 

BARTHƒLƒMY Emmanuel, nŽ vers 1820-1855 : ouvrier franais,

blanquiste ; membre de sociŽtŽs secrtes rŽvolutionnaires sous la monarchie de Juillet ; participa au soulvement de juin 1848 ˆ Paris, puis Žmigra en Angleterre. L'un des dirigeants de l'association des ŽmigrŽs blanquistes de Londres, se joignit en 1850 ˆ la fraction petite-bourgeoise Willich-Schapper de la Ligue des communistes ; fut exŽcutŽ en 1855 ˆ Londres.

 

BASTELICA AndrŽ, 1845-1884 : typographe, milita dans le mouvement ouvrier franais et espagnol ; membre de l'A.I.T., participa aux actions rŽvolutionnaires de Marseille (octobre-novembre 1870) ; membre de la Commune de Paris ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1871), dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871) ; prit parti pour Bakounine contre Marx.

 

BASTIDE Jules, 1800-1879 : homme politique franais, publiciste ; rŽpublicain bourgeois, directeur du journal Le National (1836 ˆ 1846) ; dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale constituante, devint ministre des Affaires extŽrieures du gouvernement provisoire aprs fŽvrier 1848.

 

BAUER Edgar, 1820-1886 : publiciste allemand, jeune hŽgŽlien ; Žmigra en Angleterre aprs la rŽvolution de 1848-1849 ; devint fonctionnaire prussien aprs l'amnistie de 1861 ; frre de Bruno Bauer.

 

BAUER Heinrich : cordonnier, originaire de Franconie, l'un des dirigeants de la Ligue des Justes et de l'Association allemande de formation des ouvriers de Londres ; membre du Conseil central de la Ligue des communistes, dont il fut lÕŽmissaire en Allemagne d'avril ˆ mai 1850. Il Žmigra en Australie en 1851.

 

BEALES Edmond, 1803-1881 : juriste anglais, radical bourgeois ; prŽsident de la British National League for the Independence of Poland, l'un des dirigeants de la Emancipation Society, qui pr™na l'abolition de l'esclavage des noirs et soutint les ƒtats du Nord durant la guerre civile aux ƒtats-Unis (1861-1865) ; prŽsident de la Reform League (1865 ˆ 1869).

 

BEAULIEU, LEHARDY DE, Jean-Charles-Marie-Joseph, 1802-1871 Žconomiste belge, partisan du libre-Žchange.

 

BEBEL August, 1840-1913 : tourneur, l'un des dirigeants les plus marquants du mouvement ouvrier allemand et international ; ami et disciple de Marx-Engels ; ds 1863, organisa la fŽdŽration des unions ouvrires allemandes dont il fut le prŽsident en 1867 ; membre de l'A.I.T. en 1866 ; l'un des principaux fondateurs du parti ouvrier social-dŽmocrate allemand en 1869 ; dŽputŽ du Reichstag de l'Allemagne du Nord (1867-1870) et du Reichstag allemand (1871-1881 et 1883-1913) ; il vota contre les crŽdits de guerre au moment de la guerre franco-prussienne de 1870 ; il s'opposa avec vigueur aux desseins annexionnistes de Bismarck et soutint courageusement la Commune de Paris ; pr™nait une unification de l'Allemagne par la voie rŽvolutionnaire et dŽmocratique. De 1878 ˆ 1890, dirigea la social-dŽmocratie allemande ; fort des conseils d'Engels, remporta la lutte contre la loi antisocialiste.

 

BECKER August, 1814-1871 : publiciste, collabora ˆ La Gazette rhŽnane (1842) et au VorwŠrts (1844) ; membre de la Ligue des Justes en Suisse ; partisan de Weitling ; il participa ˆ la rŽvolution allemande de 1848-1849, et Žmigra dans les annŽes 1850 aux ƒtats-Unis, o il collabora ˆ divers journaux dŽmocratiques.

 

BECKER B. : ŽmigrŽ allemand aux ƒtats-Unis ; membre de la SociŽtŽ des gymnastes allemands vers les annŽes 1850 en AmŽrique.

 

BECKER Bernhard, 1826-1882 : Žcrivain et journaliste allemand ; dŽlŽguŽ de l'Association de formation des ouvriers de Francfort au congrs de fondation de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands qu'il prŽsida sans Žclat de 1864 ˆ 1865. En 1870, adhŽra au parti social-dŽmocrate ouvrier ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye de l'A.I.T., en 1872, se dŽtourna de l'activitŽ au sein du mouvement ouvrier en 1874, et publia en 1879 un pamphlet contre la Commune.

 

BECKER Hermann Heinrich, Ç Becker le Rouge È, 1820-1885 juge supplŽant et publiciste ; membre de la SociŽtŽ dŽmocratique de Cologne en 1848 et membre du comitŽ directeur de la SociŽtŽ pour les ouvriers et les employeurs ; il fut Žlu au comitŽ de district rhŽnan des dŽmocrates et au comitŽ de sžretŽ de Cologne ; journaliste ˆ la Westdeutsche Zeitung, de mai 1849 ˆ juillet 1850 ; membre de la Ligue des communistes en 1850, fut condamnŽ ˆ cinq ans de forteresse lors du procs des communistes ; fut plus tard national-libŽral ; dŽputŽ du Parti du progrs ˆ la Dite prussienne ˆ partir de 1862 ; membre du Reichstag de l'Allemagne du Nord et du Reichstag allemand, de 1867 ˆ 1874 ; maire de Dortmund de 1875-1885, puis de Cologne.

 

BECKER Johann Philipp, 1809-1886 : brossier, originaire du Palatinat ; de la dŽmocratie bourgeoise passa au socialisme ; prit la parole ˆ la fte dŽmocratique de Hambach en 1830 ; commandant en chef de la milice populaire de Bade en 1849, il fut Ç le seul gŽnŽral de la rŽvolution allemande È (Engels) ; ˆ partir de 1860, devint l'ami et le compagnon de lutte de Marx-Engels ; en 1864 fut l'un des fondateurs de la section genevoise de l'A.I.T. ; en 1865 prŽsident de la section allemande du comitŽ central de l'A.I.T. pour la Suisse, et de 1866 ˆ 1871, prŽsident de la section regroupant les membres de langue allemande de l'A.I.T. Directeur et journaliste du Vorbote, il fut dŽlŽguŽ ˆ toutes les confŽrences et ˆ tous les congrs de l'A.I.T. Jusqu'ˆ la fin de sa vie resta infatigablement ˆ la tte du mouvement ouvrier suisse et se dŽvoua ˆ la cause internationale.

 

BEESLY Edward Spencer, 1831-1915 : historien et homme politique anglais ; radical de tendance bourgeoise et positiviste ; professeur ˆ l'universitŽ de Londres ; il prŽsida l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. du 28 septembre 1864 ˆ St Martin's Hall ; en 1870-1871, intervint dans la presse anglaise en faveur de l'Internationale et de la Commune de Paris ; se lia d'amitiŽ avec Marx.

 

BERENDS Julius : propriŽtaire d'une imprimerie ˆ Berlin ; dŽmocrate petit-bourgeois ; chef de l'union des artisans berlinois et dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale prussienne (aile gauche) ; Žmigra en AmŽrique en 1853.

 

BERNSTEIN Eduard, 1850-1932 : rŽdacteur et publiciste ; adhŽra au parti social-dŽmocrate ouvrier allemand en 1872 ; comme secrŽtaire littŽraire de Karl Hšchberg, s'installa ˆ Zurich en 1878 ; lia connaissance avec Marx-Engels en dŽcembre 1880, et depuis entretint une ample correspondance, notamment avec Engels. Il passa graduellement au marxisme sous cette influence ; rŽdacteur au Sozial-demokrat (1881-1890) ; prit ouvertement une position opportuniste ˆ partir de 1896, et Ç donna une expression caractŽristique au rŽvisionnisme È (LŽnine) ; il devint l'un des chefs de l'aile droite de la social-dŽmocratie allemande et de la IIe Internationale.

 

BERTRAND F.I. : militant du mouvement ouvrier amŽricain, cigarier de souche allemande ; secrŽtaire-correspondant de la section 6 de l'A.I.T. ˆ New York ; membre du conseil fŽdŽral des sections nord-amŽricaines et rŽdacteur de la Arbeiter-Zeitung ; Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye.

 

BESLAY Charles, 1795-1878 : entrepreneur de travaux publics, banquier, publiciste et homme politique ; membre de l'A.I.T., proudhonien ; membre de la Commune (VIe arrondissement) et de la Commission des finances ; dŽlŽguŽ de la Commune ˆ la Banque de France ; il s'opposa ˆ la nationalisation de la banque et ˆ l'immixtion dans ses affaires (ce que Marx critiqua) ; aprs l'Žcrasement de la Commune, Žmigra en Suisse.

 

BISKAMP Elard : journaliste et dŽmocrate petit-bourgeois ; participa ˆ la rŽvolution allemande de 1848-1849, et Žmigra ˆ Londres aprs la dŽfaite de la rŽvolution.

 

BISMARCK Otto, prince de, 1815-1898 : homme d'ƒtat et diplomate prussien ; reprŽsentant des intŽrts des hobereaux prussiens ; prŽsident du Conseil prussien (1873 ˆ 1890) et chancelier d'Empire (1871 ˆ 1890) ; rŽalisa l'unitŽ de l'Allemagne par le haut, de manire mi-rŽvolutionnaire, mi-contre-rŽvolutionnaire, au moyen de guerres dynastiques (en 1866, contre l'Autriche et ses alliŽs, les petits ƒtats de l'Allemagne mŽridionale ; en 1870-1871, contre la France bonapartiste) ; en politique intŽrieure, assura l'alliance entre la grande bourgeoisie et les hobereaux, renforant ainsi la bureaucratie et le militarisme prussiens ; ennemi acharnŽ du mouvement ouvrier, il promulgua en 1878 la loi antisocialiste qui fut abrogŽe en 1890 gr‰ce ˆ la lutte ouvrire, ‑ ce qui dŽtermina, en fin de compte, sa chute.

 

BLANC Jean-Joseph-Louis, 1811-1882 : socialiste petit-bourgeois, journaliste et historien ; participa au gouvernement provisoire et prŽsida la commission du Luxembourg en 1848 ; dŽfendit une politique de conciliation entre les classes et de pactisation avec la bourgeoisie ; en aožt 1848, Žmigra en Angleterre, ou il devint le chef de l'Žmigration petite-bourgeoise ; dŽputŽ de l'AssemblŽe nationale en 1871, prit position contre la Commune.

 

BLANQUI Louis-Auguste, 1805-1881 : rŽvolutionnaire franais d'un courage et dune fermetŽ exceptionnels ; organisateur de multiples sociŽtŽs secrtes et de plusieurs conjurations cŽlbres (soulvement des Quatre Saisons, le 13 mai 1840) ; au cours de la rŽvolution de 1848, fut ˆ l'extrme-gauche du mouvement dŽmocratique et prolŽtarien ; fut l'un des chefs du soulvement du 31 octobre 1870, qui prŽluda ˆ la Commune ; condamnŽ ˆ mort le 9 mars 1871 par un conseil de guerre pour sa participation ˆ la journŽe du 31 octobre, il fut arrtŽ ˆ la veille du 18 mars ; Žlu membre de la Commune (XVIIIe et XIXe arrondissements), il fut dŽtenu au fort du Taureau pendant la Commune. Dans l'Adresse sur la Commune, Marx Žcrit que Thiers l'avait fait emprisonner prŽventivement, car Ç il savait qu'avec Blanqui il donnerait une tte ˆ la Commune È ; dŽputŽ en 1879 ˆ Bordeaux, son Žlection fut invalidŽe ; libŽrŽ de la prison de Clairvaux le 10 juin 1879, il avait passŽ trente-six ans de sa vie en prison.

 

BLEICHROEDER Gerson von, 1822-1893 : directeur d'une grande banque berlinoise et banquier privŽ de Bismarck, dont il fut le conseiller officieux en matire financire, en mme temps que l'intermŽdiaire dans diffŽrentes opŽrations en Bourse.

 

BLIND Karl, 1826-1907 : Žcrivain et journaliste ; dŽmocrate petit-bourgeois ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 en Bade et entra au gouvernement provisoire de ce pays en 1849 ; l'un des chefs de l'Žmigration petite-bourgeoise allemande au cours des annŽes 1850 ˆ Londres ; devint national-libŽral, puis partisan de Bismarck.

 

Blos Wilhelm, 1849-1927 : journaliste et historien allemand ; membre du parti social-dŽmocrate ouvrier, de 1872 ˆ 1874 ; fit la connaissance de Marx en 1874, collabora ˆ la Neue Zeit et ˆ la Neue Welt ; membre du Reichstag, fit partie de l'aile droite, devint social-chauvin en 1914 ; aprs la rŽvolution de novembre 1918, prŽsida le gouvernement provisoire et devint prŽsident de l'ƒtat du Wurtemberg de 1919 ˆ 1920.

 

BOBCZINSKI Constantin : prit part ˆ l'insurrection polonaise de 1863 ; Žmigra ensuite ˆ Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1865-1868) ; secrŽtaire-correspondant pour la Pologne (ˆ partir de mai 1866) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865) ; alla s'installer ˆ Birmingham en 1866.

 

BOLTE Friedrich : cigarier, de souche allemande : ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier amŽricain ; secrŽtaire gŽnŽral du Conseil fŽdŽral des sections nord-amŽricaines de l'A.I.T. en 1872, et membre de la rŽdaction de la Arbeiter-Zeitung ; fut Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye ; exclu de l'A.I.T. pour avoir dŽfendu une position erronŽe en 1874 dans la Arbeiter-Zeitung.

 

BORN Stefan (Simon Buttermilch), 1824-1898 : typographe, membre de la Ligue des communistes, travailla ˆ la fois comme typographe et journaliste ˆ la Deutsche BrŸsseler Zeitung ; organisa et dirigea la FraternitŽ ouvrire, de 1848 ˆ 1849, puis se retira du mouvement pour se fixer en Suisse comme professeur de littŽrature et publiciste dŽmocrate.

 

BORNSTEDT Adalbert von, 1808-1851 : ancien officier prussien, publiciste et dŽmocrate petit-bourgeois ; Žditeur et rŽdacteur de la Deutsche BrŸsseler Zeitung (1847-1848) ; membre de la Ligue des communistes, en fut exclu en mars 1848 ; critiquŽ par Marx, il organisa ˆ Paris une lŽgion allemande qui devait faire la rŽvolution en Allemagne ; participa au soulvement de Bade en avril 1848 ; agent du gouvernement prussien depuis les annŽes 1840.

 

B…RNSTEIN Heinrich, 1805-1892 : dŽmocrate allemand, fondateur du VorwŠrts de Paris, auquel Marx collabora en 1844 ; aprs 1848, Žmigra aux ƒtats-Unis et participa ˆ la guerre civile (1861-1865).

 

BOUGEART Alfred, 1815-1882 : publiciste franais de gauche,

auteur de nombreux textes sur la rŽvolution franaise.

 

BOUSQUET Abel, anarchiste franais, fut exclu de l'A.I.T. comme mouchard de police.

 

BOWRING Sir John, 1792-1872 : homme politique anglais, littŽrateur et spŽcialiste des langues ; disciple de Bentham et partisan du libre-Žchange ; joua un r™le primordial dans la colonisation de l'Extrme-Orient par l'Angleterre.

 

BRACKE Wilhelm, 1842-1880 : Žditeur et libraire ; participa ˆ la fondation du parti social-dŽmocrate ouvrier allemand, il y dŽfendit les conceptions marxistes. En 1865, il fonda la commune de Brunswick de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands, dont il devint le trŽsorier gŽnŽral en 1867 ; il y mena l'opposition dans le sens de Bebel-Liebknecht en vue de la formation d'un parti marxiste. Il fut Žlu au comitŽ directeur lors du congrs d'Eisenach ; arrtŽ avec les autres membres du comitŽ en septembre 1870 pour avoir dŽfendu le manifeste de Marx stigmatisant les visŽes impŽrialistes et annexionnistes de Bismarck, condamnŽ au procs de Brunswick pour haute trahison. Il fut Žlu au Reichstag en 1877 ; ses Žcrits contriburent ˆ mettre en pices le lassallŽanisme et ˆ introduire le marxisme en Allemagne. Ce fut l'un des proches de Marx et d'Engels.

 

BRAY John Francis, 1809-1895 : typographe, socialiste utopique anglo-amŽricain, disciple d'Owen en Žconomie ; trŽsorier de la Leed's Working Men's Association crŽŽe par lui en 1837 ; revint en AmŽrique en 1842.

 

BRENTANO Lorenz Peter, 1813-1891 : juriste de Mannheim, dŽmocrate petit-bourgeois ; en 1848, membre de la gauche ˆ l'AssemblŽe nationale de Francfort ; en 1849, prŽsident du gouvernement provisoire de Bade ; Žmigra ensuite en Suisse, puis en AmŽrique.

 

BRENTANO Lujo (Ludwig Joseph), 1844-1931 : Žconomiste de

la jeune Žcole historique allemande, socialiste de la chaire ; cofondateur d'une sociŽtŽ pour la politique sociale, en 1872.

 

BRIGHT John, 1811-1889 : fabricant anglais, reprŽsentant en vue du libre-Žchange, cofondateur de la Ligue anticŽrŽalire ; au dŽbut des annŽes 1860, chef de l'aile gauche du parti libŽral, fut plusieurs fois ministre dans les cabinets libŽraux.

 

BRISBANE Albert (Henry dans La Nouvelle Gazette rhŽnane), 1809-1890 : journaliste amŽricain, rŽdacteur de la New York Daily Tribune, partisan de Fourier.

 

BUCHEZ Philippe-Joseph-Benjamin (1796-1865) : homme politique franais, historien, rŽpublicain bourgeois ; lÕun des idŽologues du socialisme catholique, disciple de Saint-Simon ; il prŽsida le gouvernement provisoire en 1848.

 

B†CHNER Georg, 1813-1837 : pote allemand, dŽmocrate rŽvolutionnaire, porte-parole littŽraire de la lutte contre la rŽaction absolutiste et fŽodale, Žditeur des Hessische Landbote, auteur du pamphlet Ç Paix dans les chaumires ! Guerre aux palais ! È ; dut quitter l'Allemagne en 1834 sous la pression policire.

 

BUCKLEY James : syndicaliste anglais, membre de l'A.I.T. (novembre 1864-1869) et membre de la Ligue pour la RŽforme.

 

B†RGERS Heinrich, 1820-1878 : publiciste de tendance radicale ; collabora ˆ La Gazette rhŽnane de 1842 ˆ 1843 ; membre de la commune de Cologne de la Ligue des communistes ; collabora ˆ La Nouvelle Gazette rhŽnane en 1848-1849 et adhŽra ˆ l'Union ouvrire de Cologne ainsi qu'au comitŽ de sžretŽ. Il entra en 1850 au Conseil central de la Ligue des communistes et fut condamnŽ ˆ six ans de prison au procs de Cologne, comme Žtant l'une des ttes de la Ligue des communistes ; devint plus tard national-libŽral.

 

BURNS John, 1858-1943 : ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier anglais ; l'un des dirigeants du nouveau syndicalisme dans les annŽes 1880, organisa la grve des dockers de Londres en 1889 ; passa au syndicalisme libŽral dans les annŽes 1890 ; entra au Parlement en 1892, et devint ministre pour les Affaires communales (1905-1914) et pour le Commerce (1914).

 

BURNS Lydia (Lizzy, Lizzie), 1827-1878 : ouvrire irlandaise, compagne de Fr. Engels, participa ˆ la lutte nationale irlandaise.

 

BURT Thomas, 1837‑1922 : mineur anglais, syndicaliste, secrŽtaire du syndicat des mineurs de Northumberland ; membre du Parlement (1874-1918) ; il dŽfendit la politique du parti libŽral.

 

BUTT Isaac, 1813-1879 : juriste et homme politique irlandais ; membre du Parlement, se dŽvoua ˆ la cause des Fenians incarcŽrŽs dans les annŽes 1860 ; en 1873, chef de la Home Rule League qui lutta pour un gouvernement autonome en Irlande.

 

 

CABET Etienne, 1788-1856 : socialiste utopique, reprŽsenta une phase progressive du mouvement ouvrier franais ; attaqua violemment le rŽgime de Louis-Philippe, notamment dans son journal le Populaire de 1841 ; en 1842, publia son Voyage en Icarie, contribution importante au dŽveloppement des idŽes communistes en France ; il ne joua plus qu'un r™le effacŽ lors de la prŽparation immŽdiate de la rŽvolution de 1848 ; tenta de rŽaliser ses thŽories au Texas, puis en Illinois.

 

CAMELINAT Zephyrin, 1840-1892 : ouvrier du bronze ; reprŽsentant du mouvement ouvrier italien et franais ; durant sa correspondance avec Engels (1871), appliqua la ligne du Conseil gŽnŽral en Italie ; aprs 1872, devint l'un des dirigeants des organisations anarchistes italiennes ; ˆ la fin des annŽes 1870, il se dŽtourna de l'anarchisme. En 1879, il fit un bref rŽsumŽ du premier livre du Capital en langue italienne.

 

CAPRIVI Leo, comte de, 1831-1899 : homme d'ƒtat et gŽnŽral prussien chancelier ˆ la suite de la chute de Bismarck (1890-1894).

 

CARL Conrad, mort en 1890 : tailleur, d'origine allemande, Žmigra aux ƒtats-Unis vers 1851 et participa activement au mouvement amŽricain ; membre du comitŽ central de la fŽdŽration nord-amŽricaine de l'A. 1. T. et rŽdacteur ˆ la Arbeiter-Zeitung ; fut Žlu au Conseil central par le congrs de La Haye ; fut exclu du Conseil gŽnŽral pour activitŽ dŽsorganisatrice.

 

CARLYLE Thomas 1795-1881 : Žcrivain anglais ; historien et philosophe idŽaliste ; pr™nait le culte du hŽros et critiquait la bourgeoisie anglaise du point de vue du romantisme rŽactionnaire ; rejoignit les rangs des conservateurs ; ennemi dŽclarŽ du mouvement ouvrier aprs 1848.

 

CARTER James : ouvrier anglais, parfumeur ; participa activement au mouvement ouvrier ; membre de la Reform League et du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (octobre 1864-1867). Il fut secrŽtaire-correspondant pour l'Italie (1866-1867) ; participa ˆ la confŽrence de Londres (1865), au congrs de Genve et de Lausanne de

l'A.I.T.

 

CETTI : dŽlŽguŽ amŽricain, Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye.

 

CHALAIN Louis-Denis : ouvrier du bronze ; proudhonien, participa ˆ la Commune, membre de la commission de la SžretŽ publique ainsi que de la commission du Travail et de l'ƒchange ; condamnŽ ˆ mort par contumace, Žmigra en Angleterre aprs la chute de la Commune ; fut Žlu membre du Conseil gŽnŽral (sept.-nov. 1871) ; appartint ˆ la Section franaise de 1871 durant quelque temps, puis rejoignit les anarchistes.

 

CHAMPION Henry Hyde, 1857-1928 : Žditeur et publiciste anglais ; membre de la Social Democratic Federation jusqu'en 1887 appartint ensuite ˆ la direction de la Labour Electoral Association des syndicats de Londres ; rŽdacteur et Žditeur du Labour Elector, entretint passagrement des relations secrtes avec les conservateurs ; en 1894, il Žmigra en Australie o il participa activement au mouvement ouvrier australien.

 

CHEMALƒ FŽlix-Eugne, nŽ vers 1839 : architecte franais, proudhonien de gauche ; dŽlŽguŽ au congrs de Genve, de Lausanne et de B‰le de l'A.I.T.

 

CLAFLIN Tenessee, 1845-1923 : fŽministe bourgeoise des ƒtats-Unis ; avec sa sÏur Victoria Woodhull publia Woodhull and Clajlin's Weekly ; chercha ˆ utiliser lÕInternationale ˆ ses fins.

 

CLEMENCE : membre de la Commune.

 

CLUSERET Gustave-Paul, 1823-1900 : dŽmocrate franais petit-bourgeois ; en juin 1848, combattit dans la Garde nationale les ouvriers parisiens ; en 1859, aide de camp de Garibaldi ; durant la guerre civile amŽricaine, aide de camp ˆ lÕŽtat-major de Mac Clellan ; prit part au mouvement des Fenians irlandais ; adhŽra ˆ l'Internationale et se mla aux intrigues des bakouninistes ; il participa aux soulvements rŽvolutionnaires de Lyon et de Marseille (1870) ; membre de la Commune, il en fut le dŽlŽguŽ ˆ la guerre en avril 1871. Aprs l'Žcrasement de la Commune, Žmigra en Belgique ; aprs l'amnistie, il revint en France et fut Žlu dŽputŽ en 1888 ; il fut dŽlŽguŽ au congrs de l'Internationale socialiste en 1889.

 

CLuss Adolf : ingŽnieur, membre de la Ligue des communistes ; en 1848, secrŽtaire de l'Association pour la formation des ouvriers ˆ Mayence ; Žmigra en 1859 aux ƒtats-Unis et resta en correspondance avec Marx-Engels ; collabora ˆ diffŽrents journaux dŽmocratiques des ƒtats-Unis, d'Allemagne et d'Angleterre.

 

COBDEN Richard, 1804-1865 : fabricant de Manchester ; partisan du libre-Žchange ; participa ˆ la fondation de la Ligue anticŽrŽalire ; membre du Parlement.

 

COENEN Philippe : cordonnier, reprŽsentant du mouvement ouvrier belge ; secrŽtaire de rŽdaction du journal ouvrier d'Anvers De Werker ; membre de lÕA.I. T., dŽlŽguŽ au congrs de Bruxelles (1868), ˆ la confŽrence de Londres (1871), au congrs de La Haye (1872), o il soutint les bakouninistes ; il participa plus tard ˆ la fondation du parti socialiste belge.

 

COHN (ou Cohen) James : cigarier anglais, participa activement au mouvement ouvrier anglais et danois ; fut prŽsident du syndicat des cigariers de Londres et membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1870-1871) ; fut secrŽtaire-correspondant pour le Danemark ; dŽlŽguŽ au congrs de Bruxelles (1868) et ˆ la confŽrence de Londres (1871) de lÕA.I.T.

 

COMBAULT AmŽdŽe-Benjamin, vers 1838-1885 : ouvrier bijoutier ; ŽmigrŽ ˆ Londres, il adhŽra ˆ l'A.I.T. et devint membre du Conseil gŽnŽral (1866-1867) ; prit ensuite une part active ˆ l'organisation de l'Internationale ˆ Paris, poursuivi au 2e procs (1868) et au 3e (1870) de l'A.I.T. et condamnŽ ˆ un an de prison ; il participa ˆ la Commune de Paris et fut dŽlŽguŽ ˆ l'Enregistrement.

 

CREMER Willian Randall, 1838-1908 : membre actif des syndicats et du mouvement pacifiste de tendance rŽformiste ; lÕun des fondateurs et dirigeants de la fŽdŽration syndicale des charpentiers et menuisiers ; membre du Conseil fŽdŽral des syndicats de Londres, de la Ligue nationale anglaise pour lÕindŽpendance de la Pologne, de la Land and Labour League. Il fut membre du Conseil central de l'A.I.T. et son secrŽtaire gŽnŽral (1864-1866) ; participa ˆ la confŽrence de Londres (1865), au congrs de Genve (1866) ; il fit partie de la Reform League ; s'opposa bient™t ˆ la tactique rŽvolutionnaire du Conseil gŽnŽral et pactisa avec la bourgeoisie lors de l'agitation pour la rŽforme Žlectorale ; adhŽra finalement au parti libŽral et fut Žlu au Parlement (1885-1895 ; 1900-1908).

 

CRESPELLE : membre de la section franaise de l'A.I.T. ˆ Londres ; il y dŽfendit les positions du Conseil gŽnŽral, dont il devint membre (1866-1867).

 

 

DANIELS Dr Roland, 1819-1855 : mŽdecin ˆ Cologne ; membre du Conseil central de la Ligue des communistes, fut lÕun des accusŽs du procs des communistes de 1852 ; fut acquittŽ.

 

DANTE Alighieri, 1265-1321 : sans doute le plus grand pote d'Italie ; dans La Divine ComŽdie, il dŽcrit le monde et l'homme du Moyen åge.

 

DAVID Edouard : reprŽsentant du mouvement ouvrier amŽricain, de souche franaise, fut Žlu par le congrs de La Haye au Conseil gŽnŽral, mais il dŽclina cette fonction.

 

DELAHAYE Pierre-Louis, nŽ en 1820 : ingŽnieur franais ; membre de l'A.I.T. ds 1864 ; participa ˆ la Commune ; Žmigra en Angleterre, aprs la chute de la Commune ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1871-1872), dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871).

 

DELL William : tapissier, membre de la Ligue nationale pour l'indŽpendance de la Pologne ; participa ˆ l'assemblŽe inaugurale de lÕA.I.T. en septembre 1864 ; membre du Conseil gŽnŽral (1864-1869), et trŽsorier (1865-1866-1867) ; participa ˆ la confŽrence de Londres de 1865, l'un des dirigeants de la Ligue pour la RŽforme.

 

DE PAEPE CŽsar, 1842-1890 : typographe, puis mŽdecin ; ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier belge et international ; membre de l'Association fŽdŽrative gŽnŽrale de Belgique, participa ˆ la fondation de la section belge de l'A.I.T. Ds 1865, en relation Žpistolaire avec Marx, rvait de concilier Marx et Bakounine ; membre du Conseil fŽdŽral belge ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865 et 1871), aux congrs de Lausanne (1867), de Bruxelles (1868) et de B‰le (1869) ; aprs le congrs de La Haye, soutint pendant un certain temps les bakouninistes ; en 1885, participa ˆ la fondation du Parti ouvrier belge.

 

DEREURE Simon, 1838-1900 : cordonnier, partisan de Blanqui ; ŽlŽment actif du mouvement ouvrier franais et international ; adhŽra ˆ la section parisienne de lÕA.I.T. et fit partie de la rŽdaction du journal La Marseillaise ; dŽlŽguŽ au congrs de B‰le (1869) ; membre de la Commune, Žmigra ensuite aux ƒtats-Unis ; assista comme dŽlŽguŽ amŽricain au congrs de La Haye, qui l'Žlut au Conseil gŽnŽral ; adhŽra en 1882 au parti ouvrier franais.

 

DEROSSI Charles, 1844-1910 : chapelier, journaliste ; membre (en 1869) et secrŽtaire (de 1871 ˆ 1875) de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands ; de 1875 ˆ 1878, secrŽtaire du parti socialiste ouvrier d'Allemagne ; contribua ˆ la diffusion illŽgale du Sozial-demokrat en Suisse aprs l'interdiction du parti social-dŽmocrate par Bismarck ; dans les annŽes 1880, Žmigra en AmŽrique ou il collabora ˆ diffŽrents journaux ouvriers de langue allemande.

 

D1ETZ Johann Heinrich Wilhelm, 1843-1922 : typographe et imprimeur, social-dŽmocrate ; fondateur de la maison d'Ždition J. H. W. Dietz, qui Ždita plus tard les textes du parti social-dŽmocrate ˆ Stuttgart ; dŽputŽ au Reichstag (1881-1918) ; ˆ la fin de sa vie, prit une attitude de conciliation vis-ˆ-vis du rŽvisionnisme et de l'opportunisme.

 

DRONKE Ernst, 1822-1891 : publiciste et Žcrivain ; d'abord Ç vrai È socialiste, puis adhŽra ˆ la Ligue des communistes au dŽbut de 1848 ; collabora ˆ La Nouvelle Gazette rhŽnane ; Žmigra en France aprs la rŽvolution ; en juillet 1850, ˆ la demande de Marx-Engels, fut chargŽ de rŽorganiser la Ligue des communistes en Suisse ; resta aux c™tŽs de Marx-Engels aprs la scission de la Ligue ; Žmigra en Angleterre en avril 1852, afin d'aider Marx-Engels ˆ dŽnoncer les intrigues policires dans le procs des communistes de Cologne ; aprs la dissolution de la Ligue en novembre 1852, se retira du mouvement.

 

D†HRING Eugen Karl, 1833-1921 idŽologue du socialisme petit-bourgeois rŽactionnaire ; matŽrialiste vulgaire, fut nommŽ professeur ˆ l'universitŽ de Berlin en 1853 ; sanctionnŽ en 1877, pour opposition au gouvernement ; exera une grande influence sur la social-dŽmocratie allemande ; Marx-Engels durent finalement intervenir pour dŽnoncer lÕaction de ses idŽes Žclectiques en matire philosophique et Žconomique avec l'ouvrage connu sous le titre Anti-DŸhring.

 

DUPLEIX Franois : relieur, Žmigra en Suisse ; fut l'un des fondateurs et le prŽsident de la section de l'A.I.T. genevoise ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865), aux congrs de Genve (1866) et de Lausanne (1867).

 

DUPONT Eugne, vers 1831-1881 : ouvrier et fabricant d'instruments de musique ; figure Žminente du mouvement ouvrier international ; prit part au soulvement de juin 1848 ˆ Paris ; vŽcut jusqu'en 1862 ˆ Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (novembre 1864-1872) ; secrŽtaire-correspondant pour la France ; participa ˆ la confŽrence de Londres (1865) et au congrs de Genve (1866), prŽsida le congrs de Lausanne (1867) ; dŽlŽguŽ au congrs de Bruxelles (1868), ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au congrs de La Haye (1872) ; il suivit la ligne de Marx ; s'installa ˆ Manchester en 1870, o il fonda une section de

l'A.I.T. ; membre du Conseil fŽdŽral de l'A.I.T. (1872-1873), Žmigra aux ƒtats-Unis en 1874.

 

DURAND Gustave-Paul-Emile, nŽ en 1835 : ouvrier-joaillier ; aprs tre chute de la Commune, vŽcut ˆ Londres en prŽtendant tre rŽfugiŽ de la Commune ; secrŽtaire de la Section franaise de 1871 ; dŽmasquŽ comme mouchard, fut expulsŽ de l'A.I.T.

 

DUVAL Emile-Victor, 1841-1871 : ouvrier fondeur ; ŽlŽment actif du mouvement ouvrier franais, de tendance blanquiste, adhŽra ˆ l'A.I.T. ; secrŽtaire du Conseil fŽdŽral parisien de l'Internationale ; fut poursuivi au 3e procs de l'Internationale (1870) ; fut Žlu au comitŽ central de la Garde nationale et ˆ la Commune (XIIIe arrondissement) ; gŽnŽral de la Garde nationale de la Commune ; fait prisonnier le 4 avril 1871, fusillŽ par les Versaillais.

 

 

ECCARIUS Johann Georg, 1818-1889 : tailleur originaire de Thuringe, publiciste ; ŽmigrŽ ˆ Londres, adhŽra ˆ la Ligue des Justes, puis des communistes ; l'un des dirigeants de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. ds 1864 ; travailla en collaboration avec Marx ; secrŽtaire gŽnŽral du Conseil (1867-1871) ; secrŽtaire-correspondant pour l'AmŽrique (1870-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ toutes les confŽrences et ˆ tous les congrs de l'A.I.T. ; rejoignit plus tard l'aile rŽformiste des syndicats.

 

EHRHARD Johann Ludwig Albert, nŽ en 1820 : vendeur ˆ Cologne, membre de la Ligue des communistes ; figura parmi les accusŽs du procs de Cologne, acquittŽ par les jurŽs.

 

EICHHOFF Karl Wilhelm, 1833-1895 : nŽgociant, journaliste et Žcrivain socialiste ; en 1859, dŽnona la corruption de la police prussienne et dŽcouvrit surtout l'activitŽ de mouchard de Stieber, ce qui lui valut d'tre condamnŽ ˆ la prison ; ˆ partir de 1859, correspondit avec Marx, ainsi qu'avec Engels, qu'il connut durant son sŽjour ˆ Londres (1861-1866) ; fut trs actif dans le mouvement ouvrier allemand ˆ partir de 1868 ; membre et correspondant de

l'A.I.T., rŽdigea, sous la direction de Marx et avec les documents fournis par celui-ci, une histoire de l'Internationale ; adhŽra en 1869 au parti social-dŽmocrate ouvrier et collabora activement ˆ la presse socialiste.

 

EISENMANN Gottfried, 1795-1867 : mŽdecin et publiciste ; en 1848, membre du prŽparlement et de l'AssemblŽe nationale de Francfort (centre, plus tard, aile gauche).

 

ELSNER Karl Friedrich Moritz, 1809-1894 : publiciste et homme politique silŽsien de tendance radicale ; en 1848, siŽgea ˆ gauche dans l'AssemblŽe nationale prussienne ; au cours des annŽes 1850 rŽdacteur de la Neue-Oder-Zeitung ˆ laquelle Marx collabora en 1855.

 

ESSER Christian Josef : tonnelier de Cologne ; en 1848, prŽsident de la filiale de Cologne de l'Union ouvrire ; en 1849, rŽdacteur du journal Freiheit, BrŸderlichkeit, Arbeit.

 

D'ESTER Karl Ludwig Johann, 1811-1859 : mŽdecin ˆ Cologne, membre de la commune de Cologne de la Ligue des communistes ; en 1848, membre du prŽparlement et l'un des dirigeants de la Gauche ˆ l'AssemblŽe nationale prussienne ; participa au second congrs dŽmocrate d'octobre 1848 ˆ Berlin, o il fut Žlu au comitŽ central des dŽmocrates d'Allemagne ; en 1849, dŽputŽ ˆ la seconde Chambre (extrme-gauche) ; joua un r™le important dans le soulvement de Bade et du Palatinat en 1849 ; aprs la dŽfaite, Žmigra en Suisse.

 

 

ESTRUP Jacob Bršnnum Scavenius, 1825-1913 : homme d'ƒtat danois, ministre de l'IntŽrieur (1865-1869), prŽsident du Conseil et ministre de Finances (1875-1894), conservateur.

 

EWALD Georg Heinrich August, 1803-1875 : orientaliste, exŽgte et critique de la Bible.

 

EWERBECK August Hermann, 1816-1860 : mŽdecin et Žcrivain, dirigea la Ligue des Justes, plus tard la Ligue des communistes qu'il quitta en 1850.

 

 

FAVRE Gabriel-Claude, 1809-1880 : homme politique et avocat, l'un des chefs des rŽpublicains bourgeois modŽrŽs ; sous-secrŽtaire d'ƒtat aux Affaires Žtrangres en 1848 ; dŽputŽ ˆ la Constituante et ˆ la LŽgislative de 1848 ˆ 1851 ; dŽputŽ du Corps lŽgislatif en 1863 ; ministre des Affaires Žtrangres au gouvernement de la DŽfense nationale et de Thiers ; prŽpara aussit™t, avec Bismarck, la capitulation de Paris ; nŽgocia, avec Thiers, le traitŽ de Francfort ; ennemi forcenŽ de la Commune, sollicita l'aide prussienne ; aprs l'Žcrasement de la Commune, mit tout en Ïuvre pour obtenir l'extradition des communards rŽfugiŽs ˆ l'Žtranger.

 

FERRƒ Charles-ThŽophile, 1845-1871 : rŽvolutionnaire franais de tendance blanquiste ; prit une part active au mouvement rŽpublicain dans les annŽes 1860 ; membre de la Commune et de la commission de la SžretŽ publique, fusillŽ par les Versaillais.

 

FLEROVSKY (BERWI), Vasili Wasilevitch, 1829-1918 : Žconomiste et sociologue russe ; dŽmocrate et reprŽsentant du socialisme populiste.

 

FLEURY Charles (KRAUSE Carl Friedrich August) nŽ en 1824 nŽgociant allemand installŽ ˆ Londres, espion prussien.

 

FLOCON Ferdinand, 1800-1866 : publiciste et homme politique franais, de tendance dŽmocratique ; intervint ˆ plusieurs reprises en faveur de Marx ; rŽdacteur du journal La RŽforme ; en 1848, membre du gouvernement provisoire, ministre de l'Agriculture et du Commerce. ExpulsŽ aprs le coup d'ƒtat de 1851, se rŽfugia en Suisse.

 

FLOURENS Gustave, 1838-1871 : professeur de physiologie, rŽvolutionnaire de tendance blanquiste, collabora ˆ La Marseillaise de Rochefort et prit part ˆ la manifestation de Neuilly, lors de l'enterrement de Victor Noir en fŽvrier 1870, ainsi qu'au soulvement des 31 octobre 1870 et 22 janvier 1871 ; membre de la Commune (XIXe arrondissement) et de la commission de la Guerre ; assassinŽ en avril 1871 par les Versaillais.

 

FONTAINE LŽon : journaliste belge, prit une part active au mouvement dŽmocratique ; rŽdacteur de l'Ždition franaise du Kolokol d'Alexandre Herzen (1862-1865) ; secrŽtaire-correspondant provisoire du Conseil central de l'A.I.T. pour la Belgique en 1865 ; dŽlŽguŽ au congrs de Bruxelles (1868).

 

FONTANA Giuseppe : participa ˆ la rŽvolution de 1848 en Italie, puis Žmigra et devint l'un des dirigeants de l'Associazione di Mutuo Progresso, organisation des ouvriers italiens de Londres de tendance mazzinienne ; membre du Conseil central de l'A.I.T. (1864-1865) et secrŽtaire-correspondant pour l'Italie (1865).

 

FORNACCIERI : ŽlŽment actif du mouvement ouvrier amŽricain, de souche italienne ; participa en 1876 au congrs de La Haye qui l'Žlut au Conseil gŽnŽral de l'A.I.T.

 

FOURIER Franois-Marie-Charles, 1772-1837 : socialiste utopique franais, remarquable critique du systme capitaliste.

 

FRANKEL : ouvrier allemand, rŽfugiŽ ˆ Londres ; adhŽra en 1847 ˆ la Ligue des communistes et ˆ l'Association pour la formation des ouvriers allemands ; membre du Conseil central de la Ligue des communistes, de 1849 ˆ 1850 ; lors de la scission, se joignit ˆ la fraction Willich-Schapper.

 

FRANKEL Leo, 1844-1896 : orfvre, figure Žminente du mouvement ouvrier hongrois et international ; fut impliquŽ dans le 3e procs de l'Internationale ˆ Paris ; membre de la Commune et commissaire au Travail sous la Commune ; membre du Conseil gŽnŽral (1871-1872) et correspondant pour l'Autriche-Hongrie ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au congrs de La Haye (1872). Revenu en Hongrie en 1876, participa ˆ la crŽation du parti social-dŽmocrate de Hongrie ; revint ˆ Paris en 1889 ; dŽlŽguŽ aux diffŽrents congrs de la IIe Internationale.

 

FREILIGRATH Ferdinand, 1810-1876 : pote dŽmocrate bourgeois de la rŽvolution de 1848-1849 ; ami de longue date de Marx-Engels ; collabora ˆ La Nouvelle Gazette rhŽnane ˆ partir d'octobre 1848 ; membre de la Ligue des communistes ; Žmigra ˆ Londres, 1851-1868 ; se retira progressivement du mouvement rŽvolutionnaire.

 

FRIBOURG E. E. : graveur, puis marchand ; proudhonien de droite, participa ˆ la fondation de l'A.I.T. ; fut lÕun des dirigeants de la section parisienne de l'A.I.T. ; en 1865, dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres et en 1866 au congrs de Genve ; publia en 1871 l'ouvrage dŽnonant l'Internationale et la Commune, L'Association internationale des travailleurs.

 

FRITZSCHE Friedrich Wilhelm, 1825-1905 : cigarier ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849, cofondateur de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands en 1863 et de l'Association gŽnŽrale des cigariers allemands, prŽsident du syndicat des cigariers jusqu'en 1878 ; dŽlŽguŽ au congrs d'Eisenach en 1869 et au congrs d'unification de Gotha de 1875 ; membre du Reichstag de l'Allemagne du Nord (1868-1871) et du Reichstag allemand (1877-1881) ; Žmigra aux ƒtats-Unis en 1881, et se retira ensuite du mouvement ouvrier.

 

 

GAMBETTA LŽon, 1838-1882 : avocat et homme d'ƒtat ; rŽpublicain bourgeois, membre du gouvernement de la DŽfense nationale (1870-1871), dirigea la dŽlŽgation de Tours et dŽmissionna le 6 fŽvrier 1871 ˆ Bordeaux ; sŽjourna en Espagne durant la Commune ; fonda en 1871 le journal la RŽpublique franaise ; prŽsident de la Chambre des dŽputŽs en 1879 ; prŽsident du Conseil et ministre des Affaires Žtran­gres (1881‑1882) ; pratiqua la politique opportuniste de la petite bourgeoisie franaise.

 

GAMBUZZI Carlo, 1837-1902 avocat italien ; partisan de Mazzini dans les annŽes 1860, puis anarchiste ; fut l'un des dirigeants de l'Alliance secrte de la DŽmocratie socialiste et d'autres organisations anarchistes en Italie.

 

GARIBALDI Giuseppe, 1807-1882 : rŽvolutionnaire italien, nŽ ˆ Nice ; dirigea le mouvement de libŽration et d'unification de l'Italie ; en 1848, combattit ˆ la tte d'un corps franc aux c™tŽs de l'armŽe du PiŽmont contre l'Autriche. D'avril ˆ juin 1849, organisa la dŽfense de la RŽpublique romaine, mais fut submergŽ par les Napolitains, les Franais et les Autrichiens ; en 1859, reprit la lutte contre les Autrichiens, ˆ la tte des chasseurs des Alpes, puis avec les Ç Mille È libŽra la Sicile et le Sud de l'Italie de la tyrannie des Bourbons (1859-1860) ; s'effora ˆ deux reprises de libŽrer Rome de la domination papale (1862 et 1867) ; participa, du c™tŽ franais, ˆ la guerre contre la Prusse en 1870 en commandant l'armŽe des Vosges qui se composait de sections de la Garde nationale ainsi que de volontaires franais et Žtrangers ; prit ensuite la dŽfense de la Commune, et salua la formation de sections de l'A.I.T. en Italie.

 

GEBERT August : ŽbŽniste ;  membre de la Ligue des communistes en Suisse, puis ˆ Londres ; lors de la scission de 1850, se joignit ˆ la fraction Willich-Schapper.

 

GEIB August, 1842-1879 libraire ˆ Hambourg ; social-dŽmocrate et membre de l'Association GŽnŽrale des Ouvriers Allemands ; participa au congrs d'Eisenach de 1869, et contribua ˆ la crŽation du parti social-dŽmocrate ; trŽsorier du parti (1872-1878), Žlu au Reichstag (1874-1876).

 

GEISER Bruno, 1846-1898 : journaliste ; adhŽra en 1869 au parti social-dŽmocrate ouvrier ; fit de l'agitation en SilŽsie en 1872 ; membre de l'A.I.T. ; rŽdacteur du Volksstaat en 1875 de la Neue Welt (1877-1886) ; dŽputŽ au Reichstag (1881-1887) ; reprŽsentant de l'aile droite de la fraction social-dŽmocrate au Reichstag ; dŽchargŽ de toute fonction dans le parti au congrs de Saint-Gallien de 1887.

 

GIGOT Philippe, 1820-1860 : reprŽsentant du mouvement dŽmocratique et ouvrier belge ; membre de la Ligue des communistes ; proche de Marx-Engels dans les annŽes 1840, participa activement au comitŽ de correspondance communiste, crŽŽ au printemps 1846 ˆ Bruxelles.

 

GLADSTONE William Ewart, 1809-1898 : homme d'ƒtat anglais, conservateur, puis pŽŽliste ; au cours de la seconde moitiŽ du XIXe sicle, chef du parti libŽral ; chancelier de l'ƒchiquier (1852-1855 et 1859-1866) et Premier ministre (1868-1874, 1880-1885, 1886 et 1892-1894).

 

GOEGG Amand 1820-1897 : journaliste, dŽmocrate petit-bourgeois ; en 1849, membre du gouvernement provisoire de Bade, Žmigra aprs la dŽfaite de la rŽvolution ; rejoignit la social-dŽmocratie allemande dans les annŽes 1870.

 

GORTCHAKOF Alexandre Michailovitch, prince de, 1798-1883 homme d'ƒtat et diplomate russe, ministre des Affaires Žtrangres (l856-1882).

 

GOTTSCHALK Andreas, 1815-1849 : mŽdecin, membre de la commune de Cologne de la Ligue des communistes ; prŽsident de l'Union ouvrire de Cologne (avril-juin 1848) ; reprŽsenta la tendance ouvriŽriste et sectaire, et s'opposa ˆ la stratŽgie dŽfendue par Marx-Engels dans la rŽvolution allemande de 1848-1849.

 

GRILLENBERGER Karl, 1848-1897 journaliste et Žditeur ; adhŽra au parti social-dŽmocrate en 1869 ; Žditeur et rŽdacteur de nombreux journaux locaux de la social-dŽmocratie ; fut l'un des organisateurs de la diffusion illŽgale du Sozial-demokrat en Allemagne du Sud sous le rŽgime de la loi antisocialiste de Bismarck ; porte-parole de l'aile droite de la fraction parlementaire de la social-dŽmocratie.

 

GR†N Karl (Ernst von der Haide), 1817-1887 : publiciste petit-bourgeois ; vers 1845, fut l'un des porte-parole les plus influents du Ç vrai socialisme È ; dŽfendit le point de vue dŽmocrate petit-bourgeois au cours de la rŽvolution de 1848-1849 ; dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de Prusse (aile gauche) en 1848 ; Žmigra aprs la rŽvolution et s'installa ˆ Bruxelles, de 1850 ˆ 1861 ; professeur ˆ Francfort-sur-le-Mein de 1862 ˆ 1865, et ˆ Vienne aprs 1870 ; participa au congrs de la Paix et de la LibertŽ ˆ Genve en 1867.

 

GUESDE Jules (Mathieu Bazile), 1845-1922 : dirigeant marquant du mouvement ouvrier franais et international ; d'abord rŽpublicain bourgeois ; emprisonnŽ sous l'Empire, il dŽfendit la Commune dans son journal les Droits de l'Homme (Montpellier) ; contraint de se rŽfugier en Suisse, il y frŽquenta les milieux anarchistes jusqu'en 1875. Il se rallia ensuite aux conceptions de Marx et fonda L'EgalitŽ en 1878. CrŽateur avec P. Lafargue du Parti ouvrier franais, proposa au congrs du Havre le programme qu'il avait prŽparŽ ˆ Londres avec Marx en mai 1880. Dans le parti ouvrier franais, il fut d'abord le reprŽsentant intransigeant de la tendance collectiviste ; l'un des premiers propagandistes des idŽes marxistes en France et, durant plusieurs annŽes, l'un des dirigeants de l'aile rŽvolutionnaire du mouvement ouvrier franais ; aprs avoir luttŽ contre l'opportunisme, il acceptera de participer au gouvernement Viviani en 1914 et passera, durant la Premire Guerre mondiale, aux positions du social-chauvinisme.

 

GUILLAUME James, 1844-1916 : instituteur suisse ; anarchiste et partisan de Bakounine, fut l'un des organisateurs de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste ; dŽlŽguŽ aux congrs de l'A.I.T. de Genve (1866), de Lausanne (1867), de B‰le (1869) et de La Haye (1872) ; rŽdacteur des journaux Le Progrs, La SolidaritŽ et du Bulletin de la FŽdŽration jurassienne ; fut exclu, en mme temps que Bakounine, de l'A.I.T. par le congrs de La Haye.

 

GUTZKOW Karl Ferdinand, 1811-1878 : Žcrivain, porte-parole de la Jeune Allemagne ; rŽdacteur de la revue Telegraph fŸr Deutschland (1838-1843) ; dramaturge au thŽ‰tre de la cour de Dresde (1847-1850).

 

 

HALES John, nŽ en 1839 tisserand, l'un des dirigeants des syndicats anglais ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1866-1872) dont il fut le secrŽtaire (mai 1871-juillet 1872) ; membre du comitŽ exŽcutif de la Ligue pour la RŽforme ainsi que de la direction de la Ligue de la Terre et du Travail ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au congrs de La Haye (1872) ; ds le dŽbut de 1872, ˆ la pointe de l'aile rŽformiste du Conseil gŽnŽral britannique ; combattit Marx et ses partisans, et fut exclu de l'A.I.T. par dŽcision du Conseil gŽnŽral (30 mai 1873) ; fut l'artisan de la scission dans le Conseil fŽdŽral britannique.

 

HANSEMANN David Justus, 1790-1864 : grand capitaliste et banquier ; l'un des reprŽsentants principaux de la bourgeoisie libŽrale rhŽnane ; ministre des Finances de Prusse, de mars ˆ septembre 1848 ; mena une politique de conciliation avec les forces de la contre-rŽvolution.

 

HARDIE James Keir, 1856-1915 : mineur Žcossais, par la suite publiciste ; ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier anglais ; secrŽtaire du syndicat des mineurs d'Ayrshire ; ˆ l'origine, libŽral ; fondateur et dirigeant du Labour Party Žcossais (1888), puis de l'IndŽpendent Labour Party (1893) ; plus tard l'un des dirigeants les plus actifs du Labour Party ; dŽputŽ de 1892 ˆ 1895. En 1906, chef du groupe travailliste aux Communes. Eut une position ferme contre la guerre en 1914.

 

HARNEY George Julian, 1817-1897 reprŽsentant Žminent du mouvement ouvrier anglais des annŽes 1840 et 1850, l'un des chefs de l'aile gauche du chartisme ; publiciste rŽvolutionnaire, Ždita le Northern Star, l'hebdomadaire The Red Republican ainsi que d'autres pŽriodiques chartistes plus ŽphŽmres ; membre de la Ligue des communistes et du comitŽ de correspondance communiste de Bruxelles ; cofondateur des Fraternal Democrats et trs liŽ avec Marx-Engels jusqu'au dŽbut des annŽes 1850 ; noua ensuite des contacts avec des cercles petits-bourgeois et cessa d'agir dans un sens rŽvolutionnaire ; vŽcut de 1863 ˆ 1888 aux ƒtats-Unis ; fut membre de l'Internationale.

 

HASENCLEVER Wilhelm, 1837-1889 : tanneur, journaliste de tendance lassallŽenne ; ˆ partir de 1864, membre, en 1866, secrŽtaire, en 1870, trŽsorier, et en 1871 prŽsident de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands ; rŽdacteur du Social-demokrat ˆ partir de 1870 ; dŽlŽguŽ au congrs d'unification de Gotha (1875), l'un des deux prŽsidents du parti socialiste ouvrier de 1875 ˆ 1876 ; dirigea le VorwŠrts avec Liebknecht de 1876 ˆ 1878 ; dŽputŽ au Reichstag d'Allemagne du Nord (1869-1871) et du Reichstag allemand (1874-1878 et 1879-1888) ; fit partie de l'aile non marxiste de la fraction parlementaire de la social-dŽmocratie.

 

HASSELMANN Wilhelm, nŽ en 1844 : rŽdacteur et dirigeant de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands ; rŽdacteur du Neue Social-democrat de 1871 ˆ 1875, adhŽra au parti socialiste ouvrier en 1875, dŽputŽ au Reichstag de 1874 ˆ 1876, 1878 ˆ 1880 ; exclu du parti en tant qu'anarchiste, Žmigra aux ƒtats-Unis.

 

HAUDE : membre de la Ligue des communistes ; aprs la scission de 1850, devint l'Žmissaire de la fraction sectaire de Willich-Schapper en Allemagne.

 

HAUPT Hermann Wilhelm, nŽ vers 1831 garon d'Žpicerie, membre de la Ligue des communistes ; arrtŽ avant le procs de Cologne, dŽnona les activitŽs de ses camarades, et fut libŽrŽ par la police ; se rŽfugia au BrŽsil.

 

HECKER : fonctionnaire prussien de la justice ; procureur gŽnŽral ˆ Cologne en 1848.

 

HECKER Friedrich Franz Karl, 1811-1881 ; avocat ˆ Mannheim ; dŽmocrate petit-bourgeois, rŽpublicain radical ; en 1848, dŽputŽ du prŽparlement ; l'un des dirigeants du soulvement de Bade en avril 1848 ; Žmigra en Suisse, puis aux ƒtats-Unis o il participa, du c™tŽ nordiste, ˆ la guerre de SŽcession, comme colonel.

 

HEGEL Georg Wilhelm Friedrich, 1770-1831 : Žminent reprŽsentant de la philosophie classique allemande (idŽaliste objectif) qui culmina dans le systme hŽgŽlien, o, Ç pour la premire fois ‑ et c'est son grand mŽrite ‑ tout le monde naturel, historique et intellectuel est saisi comme un procs, c'est-ˆ-dire est conu, et prŽsentŽ comme Žtant en mouvement perpŽtuel, changement, transformation et dŽveloppement, et o est faite la tentative de mettre en Žvidence et de dŽmontrer la connexion interne de ce mouvement et de ce dŽveloppement È (Engels).

 

HEINE Heinrich, 1797-1856 : pote allemand, Žmigra ˆ Paris en 1830 ; adversaire de l'absolutisme et de la rŽaction fŽodale et clŽricale, fut un ardent patriote ; l'un des initiateurs de la littŽrature dŽmocratique allemande ; ami intime de la famille Marx.

 

HEINZEN Karl, 1809-1880 : publiciste, dŽmocrate radical petit-bourgeois ; s'opposa ˆ Marx-Engels avant la rŽvolution de 1848 ; participa quelque temps au soulvement de Bade et du Palatinat, puis Žmigra en Suisse, en Angleterre et, enfin, en automne 1850, aux ƒtats-Unis.

 

HEPNER Adolf, 1846-1923 : rŽdacteur et cofondateur du parti social-dŽmocrate ouvrier allemand (1869) ; collabora au Volksstaat (1869-1873) ; co-accusŽ au procs de haute trahison de Leipzig en 1872 ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye (1872) ; Žmigra aux ƒtats-Unis en 1882 ; revint en Allemagne en 1908 ; rejoignit les positions chauvines de la droite du parti social-dŽmocrate en 1914.

 

HERWEGH Georg, 1817-1875 : reprŽsentant Žminent de la poŽsie rŽvolutionnaire sur la libertŽ de la pŽriode antŽrieure ˆ 1848 ; entretint des relations cordiales avec Marx ; aprs la rŽvolution de FŽvrier, adhŽra ˆ la SociŽtŽ dŽmocratique allemande de Paris, o, malgrŽ l'opposition de Marx-Engels, il organisa une lŽgion formŽe d'ŽmigrŽs allemands qui s'effora de porter la rŽvolution en Allemagne et notamment en Bade ; elle fut compltement ŽcrasŽe au premier engagement ; Žmigra plus tard en Suisse ; pote du premier chant fŽdŽral du mouvement ouvrier allemand, qu'il rejoignit en 1863 ; membre de l'A.I.T., adhŽra plus tard au parti social-dŽmocrate ouvrier allemand.

 

HERZEN Alexandre Ivanovitch, 1812-1870 : dŽmocrate russe ; philosophe matŽrialiste, publiciste et Žcrivain ; vŽcut ˆ partir de 1852 en Angleterre, o il crŽa une imprimerie, dirigea une collection et Ždita la revue Kolokol.

 

HESS Moses, 1812-1875 : publiciste petit-bourgeois et philosophe ; cofondateur et rŽdacteur de La Gazette rhŽnane, l'un des reprŽsentants principaux du Ç vrai socialisme È ; membre de la Ligue des Justes, puis de la Ligue des communistes ; en opposition ouverte avec Marx-Engels sur le plan politique ˆ partir de 1846 ; lors de la scission de 1850, rejoignit la fraction sectaire Willich-Schapper ; fut pendant plusieurs annŽes partisan de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands fondŽe par Lassalle (1863-1866) ; participa aux congrs de

l'A.I.T. de Bruxelles (1868) et de B‰le (1869).

 

HINS Eugne, 1839-1923 : journaliste belge de tendance proudhonienne ; prit une part active au mouvement ouvrier belge dans les annŽes 1860 ; l'un des fondateurs des sections belges de l'A.I.T. ; dŽlŽguŽ aux congrs de Bruxelles (1868) et de B‰le (1869) ; dans la lutte qui opposa Marx ˆ Bakounine dans l'Internationale, prit parti pour ce dernier.

 

HIRSCH Carl, 1841-1900 : journaliste ; membre de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands qu'il quitta en 1868 ; participa ˆ la fondation de l'Association ouvrire dŽmocratique ˆ Berlin et plus tard au parti social-dŽmocrate ouvrier (1869) ; dŽfendit l'A.I.T. en Allemagne ; rŽdacteur au Demokratisches Wochenblatt en 1868 avec Liebknecht, puis au Volksstaat qu'il dirigea de dŽcembre 1870 ˆ mars 1871 ; rŽdacteur au Crimmitscher BŸrger- und Bauernfreund (1870-1871), le premier quotidien social-dŽmocrate en Allemagne ; aprs 1872, correspondant parisien de la presse social-dŽmocrate allemande ; Žditeur de Die Laterne (1878-1879) ˆ Bruxelles, Žmigra en 1879 ˆ Londres, o il se lia avec Marx et correspondit avec Engels ; retourna en Allemagne, pour diriger la Rheinische Zeitung ˆ partir de 1894 ; se retira ensuite de la vie politique.

 

H…CHBERG Karl (Dr Ludwig Richter), 1853-1885 : Žcrivain et Žditeur ; rŽformateur social ; adhŽra au parti social-dŽmocrate ouvrier en 1876 ; directeur de la Zukunft (1877-1878), du Jahrbuch fŸr Sozialwissenschaft und Sozialpolitik (1879-1881).

 

HOLTORP Emile ŽmigrŽ polonais ˆ Londres ; membre du Conseil central de l'A.I.T. (octobre 1864-1866) et secrŽtaire-correspondant pour la Pologne (1864-1865) ; participa ˆ la confŽrence de Londres de 1865 ; en 1866, adhŽra au ComitŽ rŽpublicain international fondŽ par Mazzini.

 

HOWELL George, 1833-1910 : maon, chartiste, puis militant syndicaliste ; secrŽtaire du Conseil londonien des syndicats de 1861 ˆ 1862 ; participa ˆ l'assemblŽe inaugurale du 28 septembre 1864 de l'A.I.T. ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T., d'octobre 1864 ˆ 1869 ; participa ˆ la confŽrence de Londres (1865) ; secrŽtaire de la Ligue pour la RŽforme et du comitŽ parlementaire des syndicats de 1871 ˆ 1875 ; se retira de l'Internationale au moment de la Commune, et devint l'un des dirigeants rŽformistes du mouvement anglais.

 

HYNDMAN Henry Mayers (prit le pseudonyme de John Broadhouse au cours des annŽes 1880), 1842-1921 : socialiste anglais de tendance rŽformiste ; fondateur en 1881, puis dirigeant de la Democratic Federation qui devint la Social Democratic Federation en 1884 ; diffusa le marxisme en Angleterre tout en plagiant et adultŽrant les textes de Marx qui se brouilla avec lui ; il suivit une ligne opportuniste et sectaire, et devint l'un des dirigeants du British Socialist Party avec lequel il rompit en 1916 en raison de ses conceptions social-chauvinistes.

 

 

IMANDT Peter : instituteur de Crefeld ; dŽmocrate et prŽsident de l'Union ouvrire de Crefeld, participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 tant ˆ Cologne qu'ˆ Trves ; Žmigra plus tard et adhŽra ˆ la Ligue des communistes ; liŽ avec Marx et Engels.

 

 

JACOBI Dr Abraham, nŽ en 1832 : mŽdecin berlinois ; membre de la Ligue des communistes ; accusŽ au procs de Cologne de 1852, fut acquittŽ et Žmigra aux ƒtats-Unis.

 

JACOBY Johann, 1805-1877 : mŽdecin de Kšnigsberg ; publiciste et homme politique ; dŽmocrate Žnergique ; en 1848, dŽputŽ du prŽparlement et l'un des dirigeants de l'aile gauche de l'AssemblŽe nationale prussienne ; plus tard, adversaire de la politique de Bismarck ; adhŽra en 1872 au parti social-dŽmocrate.

 

JOHANNARD Jules, 1843-1888 : lithographe, blanquiste ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1868-1869 et 1871-1872) ; secrŽtaire-correspondant pour l'Italie (1868-1869) ; en 1870, fonda une section de l'Internationale ˆ Saint-Denis ; inculpŽ dans le troisime procs de l'Internationale (1870) ; membre de la Commune, Žmigra ˆ Londres aprs la dŽfaite de la Commune ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye (1872).

 

JONES Ernest Charles ; 1819-1869 ; pote et publiciste anglais ; reprŽsentant rŽvolutionnaire du mouvement ouvrier anglais ; chartiste de l'aile gauche ; rŽdacteur du Northern Star, directeur des feuilles chartistes Notes to the People et The People's Papers, partisan de Marx jusqu'aux annŽes 1850, puis se rallia ˆ l'aile gauche du radicalisme bourgeois.

 

JOTTRAND Lucien-LŽopold 1804-1877 : avocat belge et publiciste ; dŽmocrate radical ; participa ˆ la rŽvolution de 1830 ; en 1847, prŽsident de l'Association dŽmocratique de Bruxelles ; rŽdacteur du DŽbat social.

 

JOUKOVSKY Nicolas, 1833-1895 : anarchiste russe ; Žmigra en Suisse (1862) ; secrŽtaire de la section genevoise appelŽe Alliance de la dŽmocratie socialiste, . dont il fut l'un des chefs ; en 1872 se retira de l'Internationale pour protester contre l'expulsion de Bakounine au congrs de La Haye.

 

JUNG Hermann, 1830-1901 : horloger ; ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier suisse et international ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 en Allemagne ; Žmigra ensuite ˆ Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. et secrŽtaire-correspondant pour la Suisse de novembre 1864 ˆ 1872 ; trŽsorier du Conseil gŽnŽral de 1871 ˆ 1872 ; vice-prŽsident de la confŽrence de Londres (1865), prŽsident des congrs de Genve (1866), de Bruxelles (1868) et de B‰le (1869) et de la confŽrence de Londres (1871) ; membre du Conseil fŽdŽral anglais ; il suivit la ligne de Marx jusqu'au congrs de La Haye ; se joignit plus tard aux dirigeants rŽformistes des syndicats.

 

JUNGE Adolph Friedrich : membre de la Ligue des Justes, puis des communistes ; Žmigra aux ƒtats-Unis au dŽbut de 1848.

 

 

KAUTSKY Karl, 1854-1938 : socialiste originaire d'Autriche, Žcrivain, rŽdacteur ; Žvolua vers le marxisme ˆ la fin des annŽes 1870 ; fut l'un des plus grands marxistes, considŽrŽ longtemps comme l'hŽritier spirituel de Marx-Engels (avec Bebel et Bernstein) ; de 1883 ˆ 1917, directeur de la Neue Zeit, l'organe thŽorique de la social-dŽmocratie allemande et internationale ; au cours des annŽes 1890, devint le thŽoricien du parti socia-dŽmocrate allemand et mme de l'Internationale, et contribua alors fortement ˆ la diffusion et ˆ la dŽfense du marxisme. Il lutta d'abord contre Bernstein et le rŽvisionnisme, mais vers 1910 devint le porte-parole du centre ; renia le marxisme au cours de la Premire Guerre mondiale, et sera hostile au bolchevisme aprs la rŽvolution d'Octobre.

 

KAVANAGH Samuel : originaire d'Irlande ; reprŽsentant du mouvement ouvrier amŽricain ; Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye (1872).

 

KAYSER Max, 1853-1888 : journaliste, social-dŽmocrate ; dŽputŽ au Reichstag ˆ partir de 1878, appartint ˆ l'aile droite de la fraction parlementaire social-dŽmocrate.

 

KELLEY-WISCHNEWETZKY Florence, 1859-1932 : socialiste amŽricaine, plus tard rŽformiste bourgeoise ; traduisit en anglais La Situation des classes laborieuses en Angleterre d'Engels avec lequel elle correspondit longtemps.

 

KINKEL Gottfried, 1815-1882 : pote et historien de l'art ; dŽmocrate petit-bourgeois ; participa au soulvement de Bade et du Palatinat en 1848-1849, condamnŽ ˆ la forteresse ˆ vie par un tribunal prussien ; s'Žvada en 1850 et Žmigra en Angleterre, o il devint l'un des chefs de l'Žmigration petite-bourgeoise ; Žditeur du Hermann (1859), combattit Marx et Engels ; dans les annŽes 1860, partisan de l'unitŽ allemande sous l'Žgide de la Prusse.

 

KISSELEV Pavel Dimitrevitch, comte, 1788-1872 : homme d'ƒtat et diplomate russe ; gouverneur des principautŽs de la Moldavie et de la Valachie (1829-1834) ; ˆ partir de 1835, membre permanent de tous les comitŽs secrets sur la question paysanne ; aprs 1837, ministre des Domaines ; partisan de rŽformes modŽrŽes.

 

KLAPKA Georges, 1820-1892 : gŽnŽral hongrois, commanda une armŽe hongroise durant la rŽvolution de 1848-1849 ; de juin ˆ septembre 1849, commandant de la forteresse de Komorn ; Žmigra en 1849 et entra en relation avec les milieux bonapartistes dans les annŽes 1850, retourna en Hongrie aprs l'amnistie de 1867.

 

KLINGS Karl : ouvrier, membre de la Ligue des communistes, plus tard de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands ; Žmigra aux ƒtats-Unis en 1865 et participa activement ˆ la vie de la section de l'A.I.T. de Chicago.

 

KLOSE G. : ŽmigrŽ allemand ˆ Londres ; membre de la Ligue des communistes ; figure parmi les accusŽs du procs de Cologne : fut acquittŽ.

 

KOMP Albrecht : ŽmigrŽ aux ƒtats-Unis ; ˆ partir de 1857, l'un des dirigeants du Communist Club de New York ; ami de Joseph Weydemeyer.

 

K…PPEN Karl Friedrich, 1808-1863 : publiciste et historien de tendance radicale ; Jeune-HŽgŽlien, fit la connaissance de Marx au Ç Club des docteurs È ˆ Berlin et resta liŽ d'ami­tiŽ avec lui ; collabora ˆ La Gazette rhŽnane ; participa activement au mouvement dŽmocratique durant la rŽvolution de 1848-1849 ; Žcrivit un ouvrage connu sur le bouddhisme.

 

KORFF Hermann : ancien officier prussien, chassŽ de l'armŽe ˆ cause de ses convictions dŽmocratiques ; directeur responsable de La Nouvelle Gazette rhŽnane ; de 1848 ˆ 1849 ; Žmigra plus tard aux ƒtats-Unis.

 

KOSSUTH Lajos (Louis), 1802-1894 : chef du mouvement de libŽration nationale de Hongrie ; ˆ la tte des forces bourgeoises dŽmocratiques durant la rŽvolution de 1848-1849 ; Žmigra aprs la dŽfaite et chercha ˆ s'assurer l'appui des milieux bonapartistes dans les annŽes 1850.

 

K…TTGEN Gustav Adolph, 1805-1882 peintre et pote rhŽnan ; participa dans les annŽes 1840 au mouvement ouvrier, proche du socialisme Ç vrai È ; participa ˆ l'activitŽ du comitŽ de correspondance communiste de Bruxelles ; prit part ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; membre de l'Union ouvrire de Brme ; Ždita en avril 1849 le journal Vereinigung-Zeitung fŸr sŠmtliche Arbeiter et y prit une position de dŽmocrate radical.

 

KRIEGE Hermann, 1820-1850 : journaliste allemand ; Ç vrai È socialiste ; ˆ partir de 1845, dirigea le groupe des Ç vrais È socialistes allemands de New York et y Ždita Der Volks-Tribun.

 

KUGELMANN Ludwig, 1828-1902 : mŽdecin, dŽmocrate ; ami intime de Marx et Engels ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; en correspondance suivie avec Marx de 1862 ˆ 1874 ; membre actif de l'A.I.T. ˆ Hanovre ; dŽlŽguŽ aux congrs de Lausanne (1867) et de La Haye (1872) ; contribua fortement ˆ la diffusion du Capital en Allemagne.

 

KWASNIEWSKI Gustav, 1833-1902 : instituteur et Žcrivain ; cofondateur et membre actif de l'Union ouvrire dŽmocratique de Berlin ; membre de la section berlinoise de l'A.I.T. et, ds 1869, du parti social-dŽmocrate ; participa activement ˆ la diffusion du Capital et des idŽes du communisme marxiste ; rŽdacteur du Crimmitschauer BŸrger-und Bauern-freund (1871-1875) ; se retira plus tard de l'activitŽ politique.

 

 

LAFARGUE Paul, 1842-1911 : mŽdecin, socialiste, propagandiste du marxisme en France ; disciple et compagnon de lutte de Marx-Engels ; membre du Conseil gŽnŽral de lÕA.I.T. et secrŽtaire-correspondant pour l'Espagne (1866-1869) ; participa activement ˆ la fondation de sections de l'A.I.T. en France (1869-1870) ainsi qu'en Espagne et au Portugal (1871-1872) ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye (1872) ; fonda, avec Jules Guesde, le Parti ouvrier franais ; dŽlŽguŽ ˆ presque tous les congrs du parti ouvrier franais et de la IIe Internationale ; compagnon de la fille de Marx, Laura.

 

LAFAYETTE Marie-Joseph-Paul, marquis de, 1757-1834 : homme d'ƒtat et gŽnŽral franais, combattit aux ƒtats-Unis pour la rŽvolution amŽricaine contre les Anglais ; l'un des chefs politiques de la grande bourgeoisie au cours de la rŽvolution franaise ; en 1830, prŽpara la voie pour le retour au tr™ne de Louis-Philippe.

 

LANDECK Bernard, nŽ en 1832 : joaillier franais ; dŽlŽguŽ de la Commune ˆ Marseille ; membre de l'Internationale et de la Section franaise de 1871 ˆ Londres qui entra en conflit avec le Conseil gŽnŽral de l'A.I.T.

 

LASSALLE Ferdinand, 1825-1864 : Žcrivain et dŽmocrate petit-bourgeois ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; correspondit activement avec Marx et Engels jusqu'en 1862 ; son mŽrite historique est d'avoir crŽŽ l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands en mai 1863, rŽalisant ainsi la volontŽ des ouvriers avancŽs de se sŽparer de la bourgeoisie libŽrale sur le plan de l'organisation. Cependant, il ne transmit pas ˆ la classe ouvrire de perspective rŽvolutionnaire. Il suscita, au contraire, l'illusion de la possibilitŽ d'une Ç transcroissance È pacifique au socialisme avec le concours de l'ƒtat des hobereaux prussiens. Cette idŽologie du Ç socialisme royal-prussien È conduisit Lassalle ˆ pactiser avec Bismarck et le militarisme prussien des grands propriŽtaires fonciers, prenant parti pour la rŽalisation de l'unitŽ de l'Allemagne par Ç le haut È sous l'hŽgŽmonie de l'ƒtat prussien.

 

LAUBE Heinrich, 1806-1884 : Žcrivain, reprŽsentant de la Jeune Allemagne ; de 1849 ˆ 1879, directeur de thŽ‰tre ˆ Vienne et ˆ Leipzig ; metteur en scne considŽrable de l'Žpoque.

 

LAURREL C. A. F. : membre actif du mouvement ouvrier amŽricain, de souche suŽdoise ; Žlu au Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. par le congrs de La Haye.

 

LAVROV Piotr, 1823-1900 : sociologue et publiciste russe ; l'un des idŽologues du populisme ; Žclectique en philosophie ; membre de l'A.I.T., participa ˆ la Commune de Paris ; rŽdacteur de la revue V pered ! (En avant !) de 1867 ˆ 1872, ainsi que du journal du mme nom, de 1875-1876 ; frŽquenta pendant toute une pŽriode la famille Marx.

 

LAW Harriet, 1832-1897 : dirigeante du mouvement dŽmocratique et athŽiste d'Angleterre ; membre du Conseil gŽnŽral de 1867 ˆ 1872 et de la section de Manchester de l'A.I.T.

 

LEDRU-ROLLIN Alexandre-Auguste, 1807-1874 homme politique et publiciste franais ; l'un des chefs de la dŽmocratie petite-bourgeoise ; rŽdacteur du journal socialiste dŽmocrate La RŽforme ; en 1848, ministre de l'IntŽrieur du gouvernement provisoire et membre de la Commission exŽcutive ; dŽputŽ de l'AssemblŽe constituante et lŽgislative dans laquelle il dirigea le parti de la Montagne ; aprs la manifestation du 13 juin 1849, Žmigra en Angleterre o il vŽcut jusqu'en 1870 ; dŽputŽ de l'AssemblŽe nationale, il dŽmissionna pour protester contre la conclusion de la paix avec l'Allemagne.

 

LEFRAN‚AIS Gustave, 1826-1901 : instituteur, proudhonien de gauche ; participa ˆ la rŽvolution de 1848 ; adhŽra ˆ l'A.I.T. vers la fin des annŽes 1860 ; membre de la Commune, dont il Žcrivit une histoire ; Žmigra en Suisse o il se joignit aux anarchistes.

 

LEHMANN A. : mŽdecin allemand.

 

LELEWEL Joachim, 1786-1861 : historien et rŽvolutionnaire polonais ; chef de l'aile dŽmocratique bourgeoise lors du soulvement de 1830-1831 ; puis chef de l'Žmigration dŽmocratique polonaise ; il fonda en 1837 l'association des ŽmigrŽs polonais qui rejoignit en 1846 la SociŽtŽ dŽmocratique polonaise.

 

LE LUBEZ Victor-Pierre, nŽ vers 1834 : ŽmigrŽ franais ˆ Londres, liŽ aux ŽlŽments bourgeois-rŽpublicains et radicaux en France et en Angleterre ; participa ˆ l'assemblŽe inaugurale du 28 septembre 1864 de l'A.I.T. ; membre du Conseil central de 1864 ˆ 1866, et secrŽtaire-correspondant pour la France ; participa ˆ la confŽrence de Londres de 1865 ; fut exclu du Conseil central par le congrs de Genve de 1866, en raison de ses intrigues et de ses dŽnigrements.

 

LEROUX Pierre, 1797-1871 : publiciste et socialiste utopique, partisan de Saint-Simon ; en 1848, dŽputŽ de l'AssemblŽe constituante et en 1849 de l'AssemblŽe lŽgislative (Montagne).

 

LESSNER Friedrich, 1825-1910 : tailleur, ami et compagnon de lutte de Marx-Engels ; membre de la Ligue des Justes et de la Ligue des communistes ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; condamnŽ ˆ trois ans de forteresse au procs de Cologne de 1852 ; Žmigra en Angleterre en 1856 ; membre de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de 1864 ˆ 1872 ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres de 1865 ; lutta activement pour rŽaliser la politique de Marx-Engels ; participa ˆ tous les congrs de l'A.I.T. ; membre du Conseil fŽdŽral britannique, et l'un des fondateurs du British Independent Labour Party.

 

LEVEN : dŽmocrate de Rheindorf.

 

LEVIéLE E. : reprŽsentant du mouvement ouvrier amŽricain, de souche franaise ; fut Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye de 1872.

 

LEVY Gustav : socialiste de RhŽnanie ; l'un des agitateurs les plus actifs de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands, en 1856, Žmissaire des ouvriers de DŸsseldorf chez Marx ˆ Londres.

 

LEWIS Leon : journaliste amŽricain ; Žlu en 1865 au Conseil central de l'A.I.T., dont il fut le secrŽtaire-correspondant pour l'AmŽrique.

 

LICHNOWSKI Felix Maria, prince de, 1814-1848 : grand propriŽtaire de SilŽsie ; officier prussien rŽactionnaire ; dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de Francfort (aile droite) en 1848 ; tuŽ lors du soulvement de septembre ˆ Francfort. Cf. Schnapphahnski.

 

LIEBKNECHT Nathalie, 1835-1909 : seconde femme de Wilhelm Liebknecht.

 

LIEBKNECHT Wilhelm (Library), 1826-1900 : publiciste, l'un des chefs les plus Žminents du mouvement ouvrier allemand et international ; ami et compagnon de lutte de Marx-Engels, bien que trs critiquŽ ˆ l'occasion par ceux-ci ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; Žmigra en Suisse, puis en Angleterre, o il adhŽra ˆ la Ligue des communistes ; retourna en Allemagne en 1862 ; en liaison avec Marx-Engels, membre actif de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands ; membre de l'A.I.T. ; propagandiste et agitateur du communisme scientifique ; fondateur et dirigeant du Parti populaire de Saxe, en 1866 ; participa en 1869 ˆ la fondation du Parti social-dŽmocrate ouvrier ; directeur responsable du Demokratisches Wochenblatt, du Volksstaat et du VorwŠrts ; adversaire acharnŽ du militarisme prussien, lutta pour l'unitŽ allemande par la voie dŽmocratique et rŽvolutionnaire ; dŽputŽ du Reichstag de l'Allemagne du Nord (1867-1870) et du Reichstag allemand (1874-1900), vota avec Bebel, contre les crŽdits de guerre en 1870 et fut poursuivi par les autoritŽs prussiennes pour son dŽfaitisme rŽvolutionnaire ; prit une position d'hostilitŽ ouverte ˆ la politique d'annexion lors de la guerre franco-prussienne, et soutint activement la Commune de Paris ; de 1879 ˆ 1892, fut plusieurs fois condamnŽ par les tribunaux prussiens ; dŽlŽguŽ aux diffŽrents congrs de l'Internationale socialiste ouvrire ; en politique et dans le parti allemand, eut une attitude trop souvent conciliatrice.

 

LIMOUSIN Charles-M. : typographe, puis journaliste ; secrŽtaire de rŽdaction de la revue L'Association ; rŽdacteur de la Tribune ouvrire ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres de l'A.I.T. (1865) ; en 1870, membre du Conseil fŽdŽral de Paris ; participa au mouvement coopŽratif ; Žditeur d'une sŽrie de revues.

 

LINCOLN H.-J. : directeur du Daily News.

 

LISSAGARAY Prosper-Olivier, 1838-1901 journaliste et historien ; s'illustra sous l'Empire par son duel avec Cassagnac ; participa ˆ la Commune, rejoignit le groupe dŽmocratique bourgeois des nŽo-jacobins ; Žmigra en Angleterre aprs la Commune, et Žcrivit l'Histoire de la Commune de 1871. Aprs l'amnistie, fonda la Bataille auquel collaborrent les possibilistes.

 

LOCHNER Georg, nŽ vers 1834 : ŽbŽniste ; ŽlŽment actif du mouvement ouvrier allemand et international ; membre de la Ligue des communistes et de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T., de novembre 1864 ˆ 1867 et de 1871 ˆ 1872 ; ami et compagnon de lutte de Marx-Engels.

 

LONGUET Charles, 1839-1903 : journaliste de tendance proudhonienne ; Žtudiant, il fonda la Rive Gauche, organe de l'opposition ; contraint de s'enfuir en Belgique ; adhŽra ˆ l'Internationale ; membre du Conseil gŽnŽral de 1866 ˆ 1867 et de 1871 ˆ 1872 ; secrŽtaire-correspondant pour la Belgique en 1866 ; dŽlŽguŽ aux congrs de Lausanne (1866), de Bruxelles (1868), de la confŽrence de Londres (1871) et du congrs de La Haye (1872) ; aprs le 4 septembre, il commanda un bataillon de la Garde nationale ; membre de la Commune, Žmigra en Angleterre ; en 1872, Žpousa la fille a”nŽe de Marx, Jenny ; aprs son retour en France, devint l'un des principaux collaborateurs de La Justice de Clemenceau ; se joignit aux possibilistes ; conseiller municipal de Paris dans les annŽes 1880 et 1890.

 

LORENZO Anselmo, 1841-1915 : ŽlŽment actif du mouvement ouvrier espagnol ; organisateur des sections de l'Internationale en Espagne ; membre du Conseil fŽdŽral espagnol de 1870 ˆ 1872 ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871) de l'A.I.T. o il prit position contre les bakouninistes.

 

Louis XVI, 1754-1793 : roi de France.

 

LUCRAFT Benjamin, 1809-1897 : ŽbŽniste, dirigeant syndical rŽformiste ; participa ˆ l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. ; membre du Conseil gŽnŽral de 1864 ˆ 1871 ; dŽlŽguŽ au congrs de Bruxelles (1868), de B‰le (1869) ;. membre du comitŽ exŽcutif de la Reform League et de la Labour Representation League ; prit position contre la Commune de Paris en 1871, ainsi que contre l'Adresse de l'Internationale sur la Guerre civile en France ; quitta l'Internationale, devint ensuite libŽral.

 

 

MACDONALD Alexander, 1821-1881 : chef rŽformiste des syndicats anglais ; secrŽtaire du syndicat national des mineurs ; Žlu au Parlement en 1874, pratiqua la politique du parti libŽral.

 

MACDONNEL J. Patrick, 1847-1906 chef ouvrier irlandais, socialiste et Fenian ; membre du Conseil gŽnŽral et secrŽtaire-correspondant pour l'Irlande (1871-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au congrs de La Haye (1872) ; Žmigra en 1872 aux ƒtats-Unis o il prit une part active au mouvement ouvrier amŽricain.

 

MAHON John Lincoln, 1865-1933 : mŽcanicien ; ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier anglais ; membre du comitŽ exŽcutif de la Social Democratic Federation (1884) ; ˆ partir de dŽcembre 1884, membre de la Socialist League, dont il devient le secrŽtaire en 1885 ; l'un des organisateurs de la North of England Socialist Federation (1887) ; auteur de l'ouvrage A Labour Programm (1888).

 

MALON Beno”t, 1841-1893 : teinturier, publiciste ; socialiste petit-bourgeois, l'un des chefs des sections parisiennes de l'A.I.T. ; dŽlŽguŽ au congrs de Genve (1866) ; membre du comitŽ central de la Garde nationale et de la Commune de Paris, membre des Services publics ; dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de 1871, dŽmissionna de son mandat ; aprs la chute de la Commune, Žmigra en Italie, puis en Suisse o il se joignit aux bakouninistes ; plus tard, l'un des dirigeants et idŽologues des possibilistes ; aprs son retour en France, il adhŽra au parti ouvrier, s'allia un moment avec Brousse, puis devint Ç socialiste indŽpendant È ; crŽa la Revue socialiste.

 

MALTHUS Thomas Robert, 1766-1834 : pasteur anglais, Žconomiste, considŽrŽ comme l'idŽologue de l'aristocratie foncire embourgeoisŽe ; apologiste du systme capitaliste, dŽveloppa la thŽorie de la population qui justifie la misre des travailleurs par une loi naturelle.

 

MARAT Jean-Paul, 1743-1793 publiciste franais ; l'un des dirigeants les plus importants du Club des Jacobins au cours de la rŽvolution franaise ; directeur du journal L'Ami du peuple.

 

MARCHAND Louis : bakouniniste franais ; envoyŽ ˆ Bordeaux par la Commune de Paris ; aprs la chute de la Commune, Žmigra en Suisse, o il devint le secrŽtaire de l'Association des ŽmigrŽs et collabora au journal La RŽvolution sociale ; fut exclu de l'A.I.T. ˆ la demande de la section de Bordeaux.

 

MARIE DE SAINT-GEORGES, Alexandre-Thomas, 1795-1870 : avocat et homme politique, rŽpublicain bourgeois ; en 1848, ministre des Travaux publics dans le gouvernement provisoire ; membre de la commission exŽcutive, prŽsident de l'AssemblŽe nationale constituante et ministre de la Justice dans le gouvernement Cavaignac.

 

MARRAST Armand, 1801-1852 : homme politique et publiciste ; l'un des chefs des rŽpublicains bourgeois ; rŽdacteur en chef du journal Le National ; en 1848, membre du gouvernement provisoire et maire de Paris ; prŽsident de l'AssemblŽe nationale constituante.

 

MARSELAU Nicolˆ Alonso : anarchiste espagnol, l'un des dirigeants de l'organisation espagnole de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste ; directeur du journal La Razon de SŽville (1871-1872) ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye de 1872 ; exclu de l'A.I.T. par dŽcision du Conseil gŽnŽral du 30 mai 1873.

 

MARTIN Constant : rŽvolutionnaire de tendance blanquiste ; participa ˆ la Commune de Paris ; secrŽtaire du C.C. du XXe arrondissement durant le sige de Paris ; aprs la chute de la Commune, Žmigra ˆ Londres ; Žlu au Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1871-1872), dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871).

 

MARX-AVELING Eleanor (Tussy), 1855-1898 : fille cadette de Karl et de Jenny Marx ; trs active dans le mouvement ouvrier anglais et international ; journaliste et Žcrivain, publia des Ïuvres de Marx aprs la mort de celui-ci ; membre de la Social Democratic Federation (1884) ; en 1889, organisa des manifestations de masse des ouvriers non qualifiŽs, ainsi que les syndicats des gaziers et des dockers de Londres.

 

MARX Jenny, nŽe von Westphalen, 1814-1881 : Žpousa Marx en 1843 dont elle fut la compagne de vie et de lutte.

 

MARX Jenny, 1844-1883 : fille a”nŽe de Marx, journaliste ; joua un r™le important dans la lutte du peuple irlandais pour son indŽpendance ; compagne de Charles Longuet ˆ partir de 1872.

 

MARX Karl, 1818-1883.

 

MARX Laura, 1845-1911 : seconde fille de Karl et Jenny Marx ; trs active dans le mouvement ouvrier franais, compagne de Paul Lafargue ˆ partir de 1868.

 

MAURICE ZŽvy : membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1866-1872) ; secrŽtaire-correspondant pour la Hongrie (1870-1871).

 

MAYER Hermann, 1821-1875 : nŽgociant, socialiste, reprŽsentant du mouvement ouvrier allemand et amŽricain ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 en Allemagne, puis Žmigra aux ƒtats-Unis en 1852, et se mit ˆ la pointe de la lutte pour la libŽration des noirs dans l'ƒtat d'Alabama ; participa ˆ la crŽation des sections de l'A.I.T. de Saint-Louis ; trs liŽ avec Weydemeyer.

 

MAYER Karl, 1819-1889 : dŽmocrate petit-bourgeois ; membre de l'AssemblŽe nationale (1848-1849) ; Žmigra en Suisse ; dans les annŽes 1860, rŽdacteur du Beobachter de Stuttgart.

 

MAZZINI Giuseppe, 1805-1872 : rŽvolutionnaire dŽmocrate bourgeois ; l'un des chefs du mouvement de libŽration nationale italien ; en 1849, chef du gouvernement provisoire de la RŽpublique romaine ; fonda en 1850 le comitŽ central de la DŽmocratie europŽenne ˆ Londres ; s'effora en 1864 de faire passer l'A.I.T. sous son influence.

 

MEHRING Franz, 1846-1919 : ancien officier, historien et publiciste ; aprs avoir ŽtŽ dŽmocrate radical, adhŽra au mouvement marxiste vers 1885, et devint l'un des dirigeants du mouvement ouvrier allemand ; auteur de plusieurs ouvrages d'histoire de l'Allemagne et de la social-dŽmocratie allemande, ainsi que d'une biographie de Marx ; collabora ˆ la Neue Zeit ; fut l'un des dirigeants et des thŽoriciens, avec Rosa Luxemburg et K. Liebknecht, de l'aile gauche de la social-dŽmocratie ; aprs 1914, dŽfendit une politique de classe rŽvolutionnaire et mena la lutte contre la politique de l'union sacrŽe de la socialdŽmocratie allemande ; adhŽra au mouvement spartakiste en 1918.

 

MEISSNER Otto Karl, 1819-1902 : Žditeur de Hambourg, publia Le Capital et plusieurs autres ouvrages de Marx-Engels.

 

MESA Y LEOMPART JosŽ, 1840-1904 : typographe, socialiste espagnol ; fut l'un des premiers propagateurs du marxisme en Espagne ; participa ˆ la fondation des sections de l'A.I.T. en Espagne ; membre du Conseil fŽdŽral espagnol (1871-1872), ainsi que de la Nouvelle FŽdŽration de Madrid (1872-1873), rŽdacteur de La Emancipaci—n (1871-1873) ; lutta activement contre l'anarchisme ; en 1879, participa ˆ la fondation du Parti socialiste ouvrier d'Espagne ; traduisit plusieurs ouvrages de Marx-Engels en espagnol.

 

MEYEN Edward, 1812-1870 : publiciste, jeune-hŽgŽlien, dŽmocrate petit-bourgeois ; Žmigra en Angleterre, aprs la rŽvolution de 1848-1849 ; devint plus tard national-libŽral.

 

MEYER Siegfried, nŽ vers 1840-1872 : ingŽnieur des mines ; socialiste de tendance marxiste ; membre de la commune berlinoise de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands, fit partie de l'opposition prolŽtarienne et entra en correspondance avec Marx ; participa ˆ la fondation de la section berlinoise de l'A.I.T. ; publia le Manifeste communiste ˆ ses frais en 1866 ; Žmigra en 1866 aux ƒtats-Unis ; adhŽra au Club des communistes allemands de New York et fut l'un des organisateurs des sections de l'A.I.T. aux ƒtats-Unis.

 

MILNER George : tailleur, de nationalitŽ irlandaise ; partagea les conceptions du chartiste O'Brien, membre du comitŽ exŽcutif de la Land and Labour League et du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1868-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871), membre du Conseil fŽdŽral britannique ˆ partir de l'automne 1872 ; prit position contre l'aile rŽformiste de ce Conseil.

 

MIQUEL Johannes, 1828-1901 : avocat, participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; membre de la Ligue des communistes jusqu'en 1852, passa ensuite du c™tŽ de la bourgeoisie ; participa ˆ la fondation du parti national en 1859 ; maire d'OsnabrŸck (1865-1870, 1876-1880), l'un des dirigeants les plus influents du parti national-libŽral, membre de la Dite prussienne, du Reichstag de l'Allemagne du Nord et de l'Allemagne ; secrŽtaire de Bismarck, fit parvenir des informations confidentielles ˆ Marx, notamment ˆ propos des nŽgociations Favre-Bismarck.

 

MOLL Joseph, 1812-1849 : horloger originaire de Cologne ; l'un des chefs de la Ligue des Justes et de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres ; membre du Conseil central de la Ligue des communistes ; de juillet ˆ septembre 1848, prŽsident de l'Union ouvrire de Cologne ; membre du comitŽ de district rhŽnan des dŽmocrates et du comitŽ de sžretŽ de Cologne ; en 1849 participa au soulvement de Bade et du Palatinat ;, fut tuŽ lors de l'engagement de Murg.

 

MORA Francisco, 1842-1924 : cordonnier, ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier espagnol et international ; l'un des organisateurs des sections de l'A.I.T. en Espagne et au Portugal ; membre du comitŽ fŽdŽral espagnol (1870-1872), rŽdacteur du journal La Emancipaci—n (1871-1873) et de la Nouvelle fŽdŽration de Madrid (1872-1873) ; lutta activement contre les influences anarchistes, et resta en correspondance suivie avec Marx-Engels ; en 1879, organisa le parti ouvrier socialiste d'Espagne.

 

MORAGO Gonz‡les Tom‡s : anarchiste espagnol, graveur ; l'un des fondateurs de l'Alliance en Espagne, dirigea l'Alliance secrte de la dŽmocratie socialiste et du Conseil fŽdŽral espagnol de l'A.I.T. (1870-1871) ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye (1872), fut expulsŽ de l'Internationale par dŽcision du Conseil gŽnŽral le 10 mai 1873.

 

MORLEY Samuel, 1809-1886 : fabricant et homme politique anglais, libŽral ; dans les annŽes 1860, membre de l'ExŽcutif de la Reform League ; membre du Parlement (1865, 1868-1885) ; directeur du Bee-Hive ˆ partir de 1869 ; reprŽsentant typique de la bourgeoisie radicale anglaise qui s'effora d'influencer dans le sens bourgeois le mouvement ouvrier.

 

MOST Johann Joseph, 1846-1906 : relieur, rŽdacteur, social-dŽmocrate, puis anarchiste ; adhŽra en 1871 au parti ouvrier social-dŽmocrate ; dŽputŽ au Reichstag (1874-1878) ; rŽdacteur de la Berliner Freie Presse (1876-1878) ; aprs son expulsion de Berlin, Žmigra ˆ Londres en 1878 ; Žditeur et journaliste ˆ la Freiheit ˆ partir de 1879 ; exclu pour anarchisme du Parti ouvrier social-dŽmocrate (1880) ; Žmigra en 1882 aux ƒtats-Unis, o il continua ˆ propager l'anarchie.

 

MOTTERSHEAD Thomas, nŽ vers 1825-1884 : tisserand, membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1869-1872) ; secrŽtaire-correspondant pour le Danemark (1871-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au congrs de La Haye (1872) ; aprs le congrs de La Haye soutint l'aile rŽformiste contre la ligne de Marx au Conseil gŽnŽral et au Conseil fŽdŽral ; fut exclu de l'A.I.T. par dŽcision du 30 mai 1873 du Conseil gŽnŽral.

 

M†HLBERCER Arthur, 1847-1907 : mŽdecin, publiciste petit-bourgeois de tendance proudhonienne ; auteur d'une sŽrie d'articles publiŽs anonymement sur La Question du logement, dont Engels fit une vive critique.

 

MULLER : membre de l'Union ouvrire ˆ Wšrringen prs de Cologne, 1848.

 

M†NZER (M†NTZER) Thomas, nŽ vers 1490-1525 : rŽvolutionnaire, chef et idŽologue du camp paysan-plŽbŽien durant la RŽforme et la guerre des paysans ‑ que Marx appelle Ç la rŽvolution philosophique È de l'Allemagne, ˆ la diffŽrence de la rŽvolution Žconomique en Angleterre et de la rŽvolution politique en France. Il propagea l'idŽe, prŽsentŽe sous forme mystique, d'un communisme Žgalitaire ; cette Ç figure grandiose È de la guerre des paysans fut ˆ la tte de la lutte pour le renversement du pouvoir des princes et de la noblesse, et prit la tte Ç du mouvement de la classe qui est plus ou moins la devancire du prolŽtariat moderne È (Engels).

 

 

NADEJDE Ion (Jean), 1854-1928 : social-dŽmocrate roumain, professeur ˆ l'universitŽ de Jassy ; rŽdacteur en chef de la Revista Sociala ; traduisit L'Origine de la famille d'Engels ; passa ˆ l'opportunisme dans les annŽes 1890 ; adhŽra au Parti national-libŽral en 1899, et devint un adversaire du mouvement ouvrier.

 

NAPOLƒON Ier, Bonaparte, 1769-1821 : empereur des Franais (1804-1814 et 1815).

 

NAPOLƒON III, Louis Bonaparte, 1808-1873 : neveu de NapolŽon Ier ; prŽsident de la Seconde RŽpublique (1848-1851) ; empereur des Franais (1852-1870).

 

NETCHAIEV Serge, 1847-1882 : conspirateur et rŽvolutionnaire russe ; participa au mouvement Žtudiant ˆ Saint-PŽtersbourg, de 1868 ˆ 1869 ; lors de son sŽjour en Suisse, collabora Žtroitement avec Bakounine ; crŽa en 1869 une sociŽtŽ secrte appelŽe RŽtribution du Peuple, fut extradŽ de Suisse par les autoritŽs fŽdŽrales pour tre livrŽ au gouvernement russe, mourut en prison.

 

NIEUWENHUIS Ferdinand Domela, 1846-1919 : reprŽsentant du mouvement ouvrier hollandais, fut d'abord pasteur ; participa ˆ la fondation de la Ligue social-dŽmocrate et plus tard du Parti ouvrier social-dŽmocrate de Hollande ; Žlu au Parlement (1888-1891) ; participa aux congrs de l'Internationale ouvrire socialiste (1889, 1891 et 1893), vira ˆ l'anarchisme aprs avoir dŽfendu des positions ultra-gauchistes.

 

NOBILING Karl Eduard, 1848-1878 anarchiste ; le 2 juin 1878, fut l'auteur de l'attentat contre Guillaume 1er qui servit de prŽtexte ˆ Bismarck pour promulguer la loi anti-socialiste.

 

NOTHJUNG Peter, 1821-1866 : tailleur, membre de la Commune de Cologne, de la Ligue des communistes et du comitŽ de l'Union ouvrire de Cologne ; l'un des accusŽs du procs des communistes de 1852, fut condamnŽ ˆ six ans de forteresse ; plŽnipotentiaire de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands de Breslau (1863-1866).

 

 

O'BRIEN James (BRONTERRE), 1802-1864 : publiciste, l'un des dirigeants du mouvement chartiste anglais ; dans les annŽes 1830, rŽdacteur du journal The Poor Man's Guardian ; auteur de projets de rŽforme sociale ; en 1849, fonda la National Reform League.

 

O'BRIEN Michael : Fenian irlandais, exŽcutŽ en 1867 pour sa participation ˆ la libŽration des chefs fenians Kelly et Deasy.

 

O'CONNOR Feargus Edward, 1794-1855 : l'un des dirigeants de l'aile gauche du chartisme ; fondateur et Žditeur de The Northern Star, devint rŽformiste aprs 1848.

 

ODGER George, 1820-1877 : cordonnier, dirigeant syndicaliste anglais ; participa en 1862 ˆ la fondation du Conseil des syndicats de Londres, dont il fut secrŽtaire de 1862 ˆ 1872 ; membre de la British National League for the Independence of Poland, de la Land and Labour League et de la Labour Representatiou League ; participa ˆ l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. du 28 septembre 1864 ˆ St.Martin's Hall ; membre du Conseil gŽnŽral (1864-1871) et prŽsident du Conseil gŽnŽral (1864-1867) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865) et du congrs de Genve (1866) ; membre du comitŽ exŽcutif de la Reform League : durant la bataille pour la rŽforme Žlectorale, mena une politique de compromis ; en 1871 prit position contre la Commune de Paris, ainsi que l'Adresse sur la Guerre civile en France, et quitta le Conseil gŽnŽral ; entreprit par la suite une campagne de diffamation contre la direction de l'A.I.T. et les membres de la Commune.

 

O'SHEA Henry : libŽral irlandais, dŽfendit la cause des Fenians emprisonnŽs en 1869.

 

OUTINE Nicolas Isaacovitch, 1845-1883 : rŽvolutionnaire russe ; participa au mouvement Žtudiant ; membre actif de l'organisation populiste Zemlia i Volia ; Žmigra en 1863 en Angleterre, puis en Suisse ; l'un des organisateurs de la section russe de l'A.I.T. ; collabora au journal Narodno•e Dielo (1868-1870), ˆ L'ƒgalitŽ (1870-1871) ; combattit Bakounine et ses partisans ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres de l'A.I.T., et se retira quelques annŽes plus tard du mouvement rŽvolutionnaire.

 

OWEN Robert, 1771-1858 : socialiste utopique anglais, promoteur du syndicalisme, membre de la Labour Representation League, directeur du Potteries Examiner.

 

 

PARNELL Charles Stewart, 1846-1891 : homme politique et homme d'ƒtat irlandais ; nationaliste bourgeois ; Žlu au Parlement en 1875 ; aprs 1877, ˆ la tte des partisans de l'autonomie administrative de l'Irlande (Home Rule) ; participa ˆ la fondation en 1879 de la Irish Land League qu'il dirigea de 1880 ˆ 1881.

 

PARNELL James : tisserand, membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1869-1870).

 

PENSE Edward R., 1857-1955 : socialiste anglais, participa ˆ la fondation de la Fabian Society dont il fut le secrŽtaire (1884-1912) ; participa ˆ la fondation du Labour Party.

 

PERRET Henri : graveur, l'un des dirigeants de l'A.I.T. en Suisse ; membre de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste (1868 et 1869) ; secrŽtaire du comitŽ fŽdŽral romand (1868-1873) ; collabora ˆ L'ƒgalitŽ ; dŽlŽguŽ ˆ tous les congrs de l'A.I.T. ; rompit en 1869 avec les bakouninistes ; au congrs de La Haye adopta une politique de conciliation.

 

PERRON Charles-Eugne, 1837-1919 : ŽlŽment actif du mouvement ouvrier suisse, peintre en Žmail, puis cartographe ; de tendance bakouniniste, participa comme dŽlŽguŽ aux congrs de Lausanne (1867) et de Bruxelles (1868) de l'A.I.T. ; membre du bureau central de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste ; directeur de La SolidaritŽ, l'un des journaux de la FŽdŽration jurassienne ; cessa, aprs 1873, d'tre actif au sein du mouvement ouvrier.

 

PF€ENDER Karl, nŽ vers 1818-1876 : peintre miniaturiste, membre de la Ligue des Justes et de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres, membre du Conseil central de la Ligue des communistes et du Conseil central de l'A.I.T. (1864-1867 et 1870-1872) ; ami et compagnon de lutte de Marx-Engels.

 

PHILIPS Lion, mort en 1866 : nŽgociant hollandais, oncle du c™tŽ maternel de Karl Marx.

 

PICARD Albert : juriste belge, avocat ˆ la cour d'Appel de Bruxelles, secrŽtaire de l'Association dŽmocratique.

 

PIEPER Wilhelm, nŽ vers 1826 : philologue et journaliste ; membre de la Ligue des communistes ; vŽcut en Žmigration ˆ Londres, trs proche de Marx-Engels au cours des annŽes 1850.

 

PINDAR Edouard : ŽmigrŽ russe, vŽcut au milieu du XIXe sicle en Angleterre ; ami proche de Marx-Engels.

 

PINDY Jean-Louis, 1840-1917 : menuisier, de tendance proudhonienne ; dŽlŽguŽ aux congrs de Bruxelles (1868) et de B‰le (1869) ; organisa une section de l'Internationale ˆ Brest, en septembre 1869 ; membre du Conseil fŽdŽral de Paris ; accusŽ au troisime procs de l'Internationale ˆ Paris (1870), condamnŽ ˆ l'emprisonnement ; membre de la Commune, Žmigra ensuite en Suisse et se joignit aux bakouninistes.

 

PLEKHANOV Georghi Valentinovitch, 1856-1918 : Žminent reprŽsentant du mouvement ouvrier russe et international ; principal propagateur du marxisme en Russie, s'attacha ˆ son aspect philosophique avec plus ou moins de bonheur ; Žmigra en 1880 en Suisse ; d'abord populiste, devint ensuite marxiste ; en 1883, fonda le groupe LibŽration du travail, de tendance nettement marxiste ; dŽlŽguŽ au congrs de l'Internationale ouvrire socialiste en 1889, etc. ; lutta durant les annŽes 1880 contre le mouvement populiste et contre l'opportunisme, puis le rŽvisionnisme dans l'Internationale ; mais rejoignit plus tard les mencheviks et devint social-chauvin durant la guerre de 1914-1918.

 

POTTER George, 1832-1893 : charpentier, l'un des dirigeants des syndicats anglais ; membre du Conseil des syndicats de Londres et de la FŽdŽration syndicale des ouvriers du b‰timent ; Ždita le Bee-Hive, et suivit une politique de compromis avec la bourgeoisie libŽrale.

 

POTTIER Eugne, 1816-1887 : chansonnier, auteur des paroles de L'Internationale ; membre de la Commune, Žmigra ensuite en Angleterre, puis aux ƒtats-Unis ; rentra en France aprs l'amnistie.

 

PROUDHON Pierre-Joseph, 1809-1865 : publiciste, sociologue et Žconomiste ; auteur de Qu'est-ce que la propriŽtŽ ? (1840) ; idŽologue de la petite bourgeoisie, son systme socialiste Žtant orientŽ vers le retour ˆ la production individuelle, artisanale et ˆ la coopŽration ; l'un des fondateurs de l'anarchisme ; en 1848, dŽputŽ de l'AssemblŽe nationale constituante, o il intervint courageusement ; tout en rendant hommage ˆ ses mŽrites occasionnels, Marx a fait une critique sŽvre des doctrines Žconomiques de Proudhon.

 

PYAT FŽlix, 1810-1889 : journaliste, dramaturge et homme politique de tendance petite-bourgeoise dŽmocratique ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 dans le groupe de La Montagne ; dut se rŽfugier en Suisse aprs la manifestation du 13 juin 1849 ; puis il Žmigra en Belgique et en Angleterre ; adversaire d'une organisation autonome de la classe ouvrire, mena des annŽes durant une campagne de diffamation contre

l'A.I.T. et Marx, en utilisant la section franaise de Londres ; revint en France en 1869, y fonda Le Combat, puis Le Vengeur ; dŽputŽ de l'AssemblŽe nationale (1871), participa ˆ la Commune, puis il Žmigra en Angleterre ; revenu en France aprs lÕamnistie, il fut Žlu dŽputŽ des Bouches-du-Rh™ne, et Ždita le journal La Commune de septembre ˆ novembre 1880.

 

 

QUARCK Max, 1860-1930 : (Freiwald ThŸringer) : avocat et publiciste ; social-dŽmocrate de droite ; social-chauvin au cours de la Premire Guerre mondiale.

 

QUELCH Harry, 1858-1913 : Žminent reprŽsentant du mouvement ouvrier anglais, ; l'un des dirigeants des nouveaux syndicats regroupant les ouvriers sans qualification ainsi que de l'aile gauche socialiste ; directeur de La Justice et de la Twentieth Century Press ; lutta contre l'opportunisme et la politique libŽrale dans le mouvement ouvrier anglais, et dŽfendit les courants de gauche dans les partis de la IIe Internationale ; dŽlŽguŽ aux congrs de l'Internationale socialiste ouvrire.

 

 

RACKOW Heinrich, mort en 1916 : libraire, membre de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands, chargŽ de l'expŽdition du Neue Social-demokrat ; expulsŽ de Berlin en 1878, Žmigra ˆ Londres ; membre de lÕAssociation communiste pour la formation des ouvriers allemands ˆ Londres.

 

RAMM Hermann : social-dŽmocrate ; collabora au Volksstaat en 1875 et ; plus tard, au VorwŠrts.

 

RANVIER Gabriel, 1828-1879 peintre en dŽcors, rŽvolutionnaire de tendance blanquiste ; participa ˆ la Commune, fut membre de la commission de la guerre et du comitŽ de SžretŽ publique ; Žmigra en Angleterre aprs la chute de la Commune ; membre du Conseil gŽnŽral de lÕA.I.T. (1871-1872), dŽlŽguŽ au congrs de La Haye ; quitta l'Internationale pour protester contre le transfert du Conseil gŽnŽral ˆ New York.

 

RAVEAUX Franz, 1810-1851 : marchand de tabac ˆ Cologne, dŽmocrate petit-bourgeois ; en 1848 membre du prŽparlement et l'un des chefs du centre gauche ˆ l'AssemblŽe nationale de Francfort ; ambassadeur de l'Empire en Suisse ; en 1849 membre de la rŽgence provisoire de l'Empire et du gouvernement provisoire de Bade ; Žmigra aprs l'Žcrasement du soulvement de Bade et du Palatinat.

 

REICHHELM : dŽmocrate de Cologne ; membre du comitŽ de sŽcuritŽ de Cologne en 1848.

 

REIFF Wilhelm Joseph, nŽ vers 1824 : membre de la Ligue des communistes et de l'Union ouvrire de Cologne, puis secrŽtaire de l'Association pour la formation des ouvriers ; exclu de la Ligue des communistes en 1850 ; figura parmi les accusŽs du procs de Cologne de 1852, condamnŽ ˆ cinq ans de forteresse.

 

REMY Theodor : dŽmocrate allemand et socialiste ; fit partie des francs-tireurs de Garibaldi en Italie (1860) ; membre du comitŽ central de l'A.I.T. (1868-1870), subit durant une pŽriode l'influence de Bakounine.

 

RICARDO David, 1772-1823 Žconomiste anglais ; son Ïuvre reprŽsente le sommet de l'Žconomie politique bourgeoise classique.

 

RICHARD Albert, 1846-1925 : journaliste, l'un des chefs de la section lyonnaise de l'A.I.T. ; membre de l'Alliance secrte de la dŽmocratie socialiste ; participa au soulvement de Lyon en 1870 ; aprs la chute de la Commune, dŽfendit des positions bonapartistes ; dans les annŽes 1880, se joignit aux allemanistes, un courant opportuniste du mouvement ouvrier franais.

 

RICHTER Karl, 1804-1869 : professeur de thŽologie ˆ Pelpin (Prusse orientale) ; en 1848, dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale prussienne (aile gauche).

 

RILEY William Harrison, nŽ en 1835 : journaliste, rŽpublicain, socialiste, rŽdacteur et Žditeur du journal The International Herald ; membre du Conseil fŽdŽral de l'A.I.T. (1872-1873), il y prit position contre l'aile rŽformiste.

 

ROACH John : reprŽsentant du mouvement ouvrier anglais ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1871-1872) ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye et secrŽtaire correspondant du Conseil fŽdŽral britannique, au sein duquel il appuyait les rŽformistes ; il s'opposa aux dŽcisions du congrs de La Haye, et fut exclu de l'A.I.T. par dŽcision du Conseil gŽnŽral, le 30 mai 1873.

 

ROBESPIERRE Maximilien-Marie-Isodore DE, 1758-1794 : chef des Jacobins et du gouvernement rŽvolutionnaire de 1793 ˆ 1794.

 

ROBIN Paul nŽ en 1837 : instituteur, partisan de Bakounine ; ˆ partir de 1869, l'un des chefs de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste ; membre du Conseil gŽnŽral (1870-1871) ; dŽlŽguŽ au congrs de B‰le (1869) et ˆ la confŽrence de Londres (1871) ; expulsŽ de l'A.I.T. en octobre 1871.

 

ROCHAT Charles, nŽ en 1844 : ŽlŽment trs actif du mouvement ouvrier franais ; membre du Conseil fŽdŽral parisien de l'A.I.T. ; participa ˆ la Commune de Paris ; membre du Conseil gŽnŽral et secrŽtaire-correspondant pour la Hollande (1871-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres de 1871.

 

ROCHEFORT Victor-Henri, marquis de Rochefort-Luay, 1830-1913 : homme politique, Žcrivain et polŽmiste cŽlbre ; rŽpublicain de gauche, fonda sous l'Empire La Lanterne (1868-1869), puis La Marseillaise (1869-1870), ˆ laquelle collabora la fille de Marx, Jenny ; membre du gouvernement de la DŽfense nationale, dŽmissionna aprs les Žmeutes du 31 octobre qui prŽparrent la Commune ; journaliste sous la Commune, condamnŽ ˆ la dŽportation, parvient ˆ s'Žvader ; aprs l'amnistie, fonda L'Intransigeant, soutint d'abord les socialistes, puis le boulangisme, ce qui lui valut un nouvel exil.

 

RODBERTUS (-JACESTZOW), Johann Karl, 1805-1875 : grand propriŽtaire foncier prussien, Žconomiste et idŽologue des hobereaux embourgeoisŽs ; de 1848 ˆ 1849, chef du centre gauche ˆ lÕAssemblŽe nationale prussienne ; thŽoricien du Ç socialisme d'ƒtat È des hobereaux prussiens (repris par Bismarck).

 

ROESGEN Charles, employŽ de la firme Ermen & Engels de Manchester.

 

ROGIER Charles-Latour, 1800-1885 homme d'ƒtat belge, libŽral modŽrŽ ; prŽsident du Conseil et ministre de lÕIntŽrieur (1847-1852).

 

RONGE Johannes, 1813-1887 : prtre, fondateur et dirigeant du catholicisme allemand, courant qui voulait adapter le catholicisme aux besoins de la bourgeoisie allemande ; dŽmocrate petit-bourgeois, prit part ˆ la rŽvolution de 1848-1849, puis Žmigra en Angleterre.

 

R…SER Peter Gerhard, 1814-1865 : cigarier ˆ Cologne ; en 1848-1849, vice-prŽsident de l'Union ouvrire de Cologne ; l'un des accusŽs du procs des communistes de Cologne en 1852, fut condamnŽ ˆ six ans de forteresse ; passa plus tard au lassallŽanisme.

 

RUGE Arnold, 1802-1880 : publiciste radical, jeune hŽgŽlien, dŽmocrate petit-bourgeois ; en 1844, Ždita, avec Marx, les Annales franco-allemandes ; en 1848, dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de Francfort (aile gauche) ; l'un des chefs de l'Žmigration petite-bourgeoise ˆ Londres dans les annŽes 1850 ; devint national-libŽral aprs 1866.

 

 

SAEDT Otto Joseph Arnold, 1816-1886 : fonctionnaire prussien de la Justice ; procureur gŽnŽral ˆ Cologne en 1848, puis au procs des communistes de 1852.

 

SAINT-CLAIR E. P. : reprŽsentant du mouvement ouvrier amŽricain, de souche irlandaise ; fut Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye en 1872.

 

SAINT-SIMON Claude-Henri de Rouvray, comte de, 1760-1825 socialiste utopiste franais ; s'enrichit en spŽculant sur les biens nationaux, mais se ruina vers 1800 ; il dŽveloppa alors son systme qu'il Žlabore depuis la Lettre d'un habitant de Genve (1802) jusqu'au CatŽchisme des Industriels (1823-1824).

 

SAUVA Arsne : tailleur, socialiste de l'Žcole de Cabet, dirigea les colonies icariennes aux ƒtats-Unis ; participa ˆ la Commune de Paris, puis Žmigra aux ƒtats-Unis ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye, soutint la minoritŽ anarchiste ; prit une part active au mouvement socialiste des ƒtats-Unis dans les annŽes 1870.

 

SCHAPPER Karl, 1812-1870 : l'un des dirigeants de la Ligue des Justes et de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres ; membre du Conseil central de la Ligue des communistes ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; lors de la scission de la Ligue en 1850, prit avec Willich la tte de la fraction hostile ˆ Marx ; en 1856, se rapprocha de Marx ; en 1865, membre du Conseil central de l'A.I.T. et dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres.

 

SCHERZER Andreas, 1807-1879 : tailleur, membre de la commune parisienne de la Ligue des communistes ; aprs la scission de 1850, rejoignit la fraction Willich-Schapper ; fit partie des accusŽs du procs de 1852 relatif au prŽtendu complot franco-allemand ; Žmigra ensuite en Angleterre ; l'un des chefs de l'Association pour la formation des ouvriers allemands de Londres ; directeur de la Neue Zeit et collaborateur de l'hebdomadaire Das Volk.

 

SCHILLY Victor, 1810-1875 : avocat, dŽmocrate ; participa ˆ lÕinsurrection de Bade et du Palatinat en 1849, puis Žmigra en France ; membre de l'A.I.T.

 

SCHL…FFEL Friedrich Wilhelm, 1800-1870 : fabricant silŽsien, dŽmocrate ; dŽputŽ en 1848 de l'AssemblŽe nationale de Francfort (aile gauche) ; participa en 1849 au soulvement de Bade et du Palatinat, puis Žmigra en Suisse et aux ƒtats-Unis.

 

SCHL†TER Hermann, mort en 1919 : ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier amŽricain et international ; dans les annŽes 1880, directeur de la maison d'Ždition social-dŽmocrate ˆ Zurich, puis l'un des organisateurs des archives de la social-dŽmocratie allemande ; expulsŽ de Suisse en 1888, Žmigra aux ƒtats-Unis, o il prit une part active au mouvement ouvrier des ƒtats-Unis ; auteur d'ouvrages sur l'histoire du mouvement ouvrier amŽricain et anglais ; correspondit longtemps avec Engels.

 

SCHMIDT Conrad, 1863-1932 : Žconomiste et philosophe, correspondant dÕEngels ; rŽdacteur du VorwŠrts, fit partie du groupe opportuniste de gauche des Ç Jeunes È ; rŽdigea en 1890 la Berliner Volkstribun ; rejoignit plus tard la tendance rŽvisionniste et fut rŽdacteur des Sozialistiche Monatshefte.

 

SCHMITZ Th. : secrŽtaire privŽ ˆ Cologne, tŽmoin ˆ dŽcharge au procs des communistes de Cologne en 1852.

 

SCHNAPPHANSKI cf. LICHNOWSKI Felix Maria : personnage caricatural de la satire de Heinrich Heine, Atta Troll, ou de l'ouvrage de Georg Weerth, Leben und Taten des berŸhmten Ritters Schnapphahnski.

 

SCHNEIDER II, Karl : avocat de Cologne ; dŽmocrate petit-bourgeois ; en 1848, prŽsident de la SociŽtŽ dŽmocratique de Cologne et membre du ComitŽ de district des dŽmocrates et du comitŽ de sŽcuritŽ de Cologne ; en 1849, dŽfenseur de Marx-Engels aux procs contre La Nouvelle Gazette rhŽnane ; en 1852, dŽfenseur au procs des communistes de Cologne en 1852 ; cessa plus tard toute activitŽ politique.

 

SCHRAMM Conrad, nŽ vers 1822-1858 : membre de la Ligue des communistes, participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849. ƒditeur de la Kieler Demokratisches Wochenblatt, Žmigra ˆ Londres aprs 1849 ; directeur responsable de La Nouvelle Gazette rhŽnane. Revue Žconomique et politique ; membre de l'Association pour la formation des ouvriers communistes de Londres ; resta avec Marx-Engels, lors de la scission de la Ligue des communistes ; ami et compagnon de lutte de Marx-Engels.

 

SCHRAMM Karl August : social-dŽmocrate de tendance rŽformiste ; rŽdacteur du Jahrbuch fŸr Sozialwissenschaft und Sozialpolitik, quitta le parti dans les annŽes 1880.

 

SCHULTE : dŽmocrate de Hitdorf prs de Cologne.

 

SCHULTZE-DELITZSCH Franz Hermann : Žconomiste et homme politique petit-bourgeois ; partisan de l'unitŽ allemande sous l'hŽgŽmonie de la Prusse ; cofondateur du parti national ; dans les annŽes 1860, l'un des chefs du Parti du progrs ; il tenta de dŽvier les ouvriers du combat rŽvolutionnaire en pr™nant l'organisation de coopŽratives.

 

SCHURZ Karl, 1829-1906 : dŽmocrate petit-bourgeois, participa au soulvement de Bade et du Palatinat en 1849 ; libŽra Kinkel de prison en 1850 ; Žmigra en Suisse, puis aux ƒtats-Unis en 1852 ; participa ˆ la guerre civile aux c™tŽs des Nordistes ; plus tard ambassadeur des ƒtats-Unis en Espagne, puis sŽnateur et ministre de l'IntŽrieur.

 

SCHWEITZER Johann Baptist von, 1834-1875 avocat, puis journaliste et Žcrivain ; copropriŽtaire et directeur du Social-demokrat (1864-1867), et ˆ partir de 1868 propriŽtaire unique ; se rallia vers 1862 au lassallŽanisme ; en 1863 membre, de 1867-1871 prŽsident de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands ; il soutint de plus en plus ouvertement la politique de Bismarck d'unification de l'Allemagne sous l'hŽgŽmonie de la Prusse ; freina la jonction du mouvement ouvrier allemand avec l'Internationale et la rŽalisation de l'unitŽ du mouvement ouvrier allemand sur la base du communisme scientifique ; aprs avoir ŽtŽ dŽmasquŽ comme agent de Bismarck, fut exclu en 1872 de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands.

 

SCHWITZGUEBEL AdhŽmar, 1844-1895 : graveur, disciple suisse de Bakounine ; membre de l'A.I.T. ; l'un des chefs de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste et de la Section jurassienne ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye ; fut exclu de l'A.I.T. en 1873 par dŽcision du Conseil gŽnŽral.

 

SECKENDORFF August Heinrich Eduard Friedrich, Freiherr von, 1807-1885 : juriste prussien, fonctionnaire de la justice ; de 1849 ˆ 1851, dŽputŽ de la seconde Chambre (centre) ; chargŽ de l'accusation au procs des communistes de Cologne.

 

SEIFFERT Rudolph, 1826-1886 : social-dŽmocrate, membre de la rŽdaction du Volksstaat, l'un des organisateurs de l'Association des travailleurs du bois.

 

SEILER Sebastian, nŽ vers 1810-1890 : publiciste ; au dŽbut des annŽes 1840, disciple de Weitling en Suisse ; rejoignit Marx et Engels en 1846 et devint membre du comitŽ de correspondance communiste ; membre de la Ligue des communistes ; de 1848 ˆ 1849, stŽnographe ˆ l'AssemblŽe nationale franaise ; Žmigra en 1856 aux ƒtats-Unis, ou il fut journaliste et instituteur ; participa activement au mouvement socialiste amŽricain.

 

SERRAILLIER Auguste, nŽ en 1840 : ouvrier formier en chaussures, compagnon de lutte de Marx-Engels, membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1869-1872) ; secrŽtaire-correspondant pour la Belgique (1870) et pour la France (1871-1872) ; fut envoyŽ en septembre 1870, aprs la chute de l'Empire, ˆ Paris, comme Žmissaire du Conseil gŽnŽral ; participa ˆ la Commune de Paris et ˆ l'activitŽ de la commission du Travail et de l'ƒchange ; condamnŽ ˆ mort par contumace ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au congrs de La Haye (1872) ; membre du Conseil fŽdŽral britannique (1873-1874).

 

SHAW Robert, nŽ vers 1869 : peintre, propagandiste des idŽes de l'A.I.T. dans les syndicats anglais ; participa ˆ la fondation de l'A.I.T., membre du Conseil gŽnŽral (1864-1869), dont il fut le trŽsorier (1867-1869),correspondant pour l'AmŽrique.

 

SHIPTON George, 1839-1911 : fondateur et secrŽtaire de la fŽdŽration syndicale des peintres en b‰timent et des dŽcorateurs ; secrŽtaire du Conseil des syndicats londoniens (1872-1896) ; directeur du Labour Standard.

 

SIEBEL Karl, 1836-1868 : pote rhŽnan, contribua beaucoup ˆ la propagation des Ïuvres de Marx-Engels, notamment du premier volume du Capital ; parent ŽloignŽ d'Engels.

 

SINGER Paul, 1844-1911 : reprŽsentant marquant de la social-dŽmocratie allemande ; commena par soutenir financirement le parti durant les annŽes 1870, puis y adhŽra au dŽbut de la loi antisocialiste ; expulsŽ de Berlin en 1886 ; membre de l'exŽcutif ˆ partir de 1887, prŽsida le parti, avec Bebel, ˆ partir de 1890 ; dŽputŽ au Reichstag (1884-1911), lutta contre le rŽvisionnisme et l'opportunisme.

 

SONNEMANN LŽopold, 1831-1909 : Žditeur de journaux et homme politique, dŽmocrate petit-bourgeois ; fonda en 1856 la Frankfurter Handels-Zeitung, participa ˆ la fondation du Parti national (1859) ; membre du comitŽ permanent de la fŽdŽration des sociŽtŽs ouvrires allemandes et du Parti populaire ; s'employa sans succs ˆ tenir les ouvriers sous l'influence de la bourgeoisie ; prit position contre l'unification de lÕAllemagne sous l'hŽgŽmonie prussienne, dŽputŽ au Reichstag (1871-1876, 1878-1884).

 

SORGE Friedrich Adolf, 1828-1906 : communiste allemand, compagnon de lutte de Marx-Engels, participa au soulvement de Bade et du Palatinat en 1849 ; ŽmigrŽ aux ƒtats-Unis, il y joua un grand r™le dans le mouvement ouvrier, organisant notamment les sections de l'A.I.T. ; membre du Club des communistes allemands de Cologne ; participa ˆ la fondation de la section n¡ 1 de New York et environs ; aprs la dissolution de celle-ci, participa ˆ la fondation de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands de New York (1869) qui entra ˆ la National Labor Union comme Labor Union n¡ 5 de New York ; participa ˆ la fondation du comitŽ central nord-amŽricain de l'A.I.T. (1870) ; dŽlŽguŽ au congrs de La Haye ; Žlu secrŽtaire gŽnŽral du Conseil gŽnŽral aprs son transfert ˆ New York ; entretint une correspondance suivie avec Marx-Engels, dont il fut l'ami fidle.

 

SPEYER Carl, nŽ en 1845 : ŽbŽniste ; secrŽtaire de l'Association pour la formation des ouvriers allemands durant les annŽes 1860 ; membre de l'A.I.T. ; Žmigra aux ƒtats-Unis en 1870, et correspondit rŽgulirement avec Marx-Engels ; ˆ partir de 1872, membre du Conseil gŽnŽral transfŽrŽ ˆ New York.

 

SPLINGARD Roach : dŽlŽguŽ belge au congrs de l'A.I.T. de La Haye, fit partie de la commission d'enqute sur l'activitŽ de l'Alliance de la dŽmocratie socialiste ; anarchiste, fut exclu de l'A.I.T. par dŽcision du Conseil gŽnŽral du 30 mai 1873.

 

STEFFEN Wilhelm : ancien officier prussien, tŽmoin ˆ dŽcharge au procs des communistes de Cologne en 1852 ; Žmigra en 1853 en Angleterre, puis aux ƒtats-Unis ; proche de Marx-Engels au cours des annŽes 1850.

 

STEIN Julius, 1813-1883 : instituteur ˆ Breslau, publiciste dŽmocrate ; en 1848, dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale prussienne (aile gauche), prŽsident du Club dŽmocratique de Berlin, plus tard rŽdacteur en chef de la Breslauer Zeitung.

 

STEPNEY Cowell William Frederick, 1820-1872 : membre de la Reform League et du Conseil gŽnŽral de

l'A.I.T. (1866-1872) dont il fut le trŽsorier (1868-1870) ; dŽlŽguŽ aux congrs de Bruxelles (1868), de B‰le (1869) et ˆ la confŽrence de Londres (1871), membre du Conseil fŽdŽral britannique (1872).

 

STIEBER Wilhelm, 1818-1882 : officier de police ˆ partir de

1851 ; dirigea la police politique prussienne (1852-1860) ; organisa les faux qui servirent de pices ˆ charge contre les communistes du procs de Cologne de 1852, comme principal accusateur ; en 1866, durant la guerre austro-prussienne, et en 1870-1871, durant la guerre franco-prussienne, il fut chef de la police militaire ainsi que du service d'espionnage et de contre-espionnage.

 

STUMPF Paul, nŽ vers 1827-1913 : ouvrier mŽcanicien, puis

marchand, ami de Marx-Engels ; en 1847, membre de l'Association des travailleurs allemands de Bruxelles et de la Ligue des communistes ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 en Allemagne, fonda et dirigea la section de Mayence de l'Union ouvrire ; dŽlŽguŽ au congrs de Lausanne de 1867 ; membre du parti social-dŽmocrate ouvrier ds 1869.

 

SYLVIS William, 1828-1869 : ouvrier fondeur ; en 1859, participa ˆ la fondation de l'Union internationale des fondeurs de fer, dont il devint le prŽsident (1863-1869) ; participa ˆ la guerre civile amŽricaine (1861-1865) au c™tŽ des Nordistes ; en 1866, participa ˆ la fondation de la National Labor Union aux ƒtats-Unis, dont il fut le prŽsident (1868-1869) ; intervint pour l'affiliation ˆ l'A.I.T.

 

 

TCHERNYCHEVSKI Nicola• Gavrilovitch, 1828-1889 : dŽmocrate rŽvolutionnaire : romancier et critique russe, dont le roman Que faire ?, Žcrit en prison, fut longtemps l'ouvrage de base de la jeunesse rŽvolutionnaire russe. DŽportŽ en SibŽrie pour ses idŽes libŽrales puis mis en rŽsidence surveillŽe ; reprŽsentant Žminent de la littŽrature et de la philosophie rŽvolutionnaire russe.

 

TEDESCO Victor, 1821-1897 : avocat belge, dŽmocrate rŽvolutionnaire et socialiste ; participa en 1847 ˆ la fondation de l'Association dŽmocratique ˆ Bruxelles ; liŽ Žtroitement ˆ Marx-Engels ; condamnŽ ˆ mort lors du procs de Cologne, appelŽ Risquons-Tout, fut Ç graciŽ È et sa peine commuŽe en trente ans de prison ; libŽrŽ en 1854.

 

TELLERING (MULLER-TELLERING) Eduard von, nŽ vers 1808 juriste et publiciste, dŽmocrate petit-bourgeois ; en 1848-1849, collabora ˆ La Nouvelle Gazette rhŽnane, puis Žmigra en Angleterre, o il attaqua Marx-Engels dans la presse ; Žmigra en 1852 aux ƒtats-Unis.

 

THEISZ Albert-FrŽdŽric-FŽlix, 1839-1880 : graveur, membre de l'Internationale, inculpŽ dans le troisime procs de l'Internationale (1870) ; de tendance proudhonienne ; membre de la Commune, condamnŽ ˆ mort, se rŽfugia ˆ Londres ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T., dont il fut le trŽsorier (1871) ; revenu en France aprs l'amnistie, adhŽra ˆ l'Alliance dŽmocratique rŽpublicaine avec Longuet.

 

THIERS Adolphe, 1797-1877 : historien et homme d'ƒtat franais ; orlŽaniste ; ministre de l'IntŽrieur (1832-1834), prŽsident du Conseil (1836-1840) ; prŽsident de la RŽpublique (1871-1873) ; bourreau de la Commune de Paris.

 

THOMPSON Thomas Perronet, 1783-1869 : homme politique anglais et Žconomiste vulgaire ; partisan du libre-Žchange.

 

TOLAIN Henri-Louis, 1828-1897 : graveur, proudhonien de droite ; membre de l'A.I.T. ds le dŽbut ; il assista ˆ l'AssemblŽe inaugurale du 28 septembre ˆ St Martin's Hall ; l'un des chefs de la section parisienne de l'Internationale ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865) et aux congrs de Genve (1866), de Lausanne (1867), de Bruxelles (1868) et de B‰le (1869) ; dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de 1871, o il siŽgea durant la Commune, passant directement aux Versaillais ; fut exclu pour cette raison de l'Internationale en 1871.

 

T…LCKE Karl Wilhelm, 1817-1893 avocat ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; lassallŽen, adhŽra en 1864 ˆ l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands, dont il fut prŽsident (1865-1866) et membre du comitŽ exŽcutif (1865-1874) ; collaborateur direct de J. B. von Schweitzer, dont il appuya la politique anti-ouvrire.

 

TOMAS Francisco, nŽ vers 1850-1903 : maon, membre du Conseil fŽdŽral espagnol de l'A.I.T. (1872-1873), l'un des chefs de l'organisation anarchiste en Espagne ; fut exclu de l'A.I.T. par dŽcision du Conseil gŽnŽral, le 30 mai 1873.

 

TOWNSHEND William : ouvrier anglais, membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1869-1872) ; participa au mouvement socialiste anglais dans les annŽes 1880.

 

TRIER Gerson, nŽ en 1851 : instituteur danois ; l'un des chefs de la minoritŽ rŽvolutionnaire du parti social-dŽmocrate du Danemark ; lutta contre la politique rŽformiste de l'aile opportuniste du parti ; traduisit plusieurs ouvrages d'Engels en danois.

 

TRIDON Edme-Marie-Gustave, 1841-1871 : homme politique et publiciste ; de tendance blanquiste, dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de 1871 ; membre de la Commune, Žmigra aprs sa chute en Belgique.

 

TRISTAN Flora, 1803-1844 : figure Žminente d'une phase progressive du mouvement ouvrier franais ; dŽfendit les droits de la femme et de l'ouvrire ; quittant la grande bourgeoisie, partagea la vie et le travail des ouvrires, et proposa l'unification de la classe ouvrire sur la base d'un parti regroupant les travailleurs et dŽfendant leurs droits face ˆ toutes les autres classes de la nation ; mourut au cours d'un tour de France pour son agitation.

 

 

VAILLANT ƒdouard, 1840-1915 : mŽdecin, ingŽnieur, docteur s sciences ; blanquiste ; membre de l'Internationale, dŽlŽguŽ au congrs de Lausanne (1867), ˆ la confŽrence de Londres (1871) et au congrs de La Haye (1872) ; membre de la Commune, condamnŽ ˆ mort ; rŽfugiŽ ˆ Londres, il se rapprocha d'abord de Marx-Engels, puis rompit avec l'Internationale aprs le congrs de La Haye, pour protester contre le transfert du Conseil gŽnŽral ˆ New York et la mise en veilleuse de l'Internationale ; il s'intŽressa nŽanmoins aux idŽes de Marx-Engels ; rentrŽ aprs l'amnistie ˆ Paris, il fonda le ComitŽ rŽvolutionnaire central ; vice-prŽsident du congrs de l'Internationale ouvrire socialiste (1889) ; conseiller municipal de Paris en 1884, puis dŽputŽ ˆ partir de 1893 ; se rapprocha de Guesde au moment de l'entrŽe de Millerand au gouvernement Waldeck-Rousseau (1899) ; participa ˆ la fondation du parti socialiste en France (1901), subit fortement l'influence de Jaurs, mais tomba dans le social-chauvinisme en 1914.

 

VARLIN Louis-Eugne, 1839-1871 : relieur, proudhonien de gauche, l'un des dirigeants franais les plus marquants de l'Žpoque de la Ire Internationale ; organisa les sections de l'A.I.T. en France ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865), aux congrs de Genve (1866) et de B‰le (1869) ; rŽalisa en 1869 l'union des associations syndicales, jetant les bases d'une solidaritŽ ouvrire ; membre de la Garde nationale il est Žlu membre de la Commune par les VIe, XIIe et XVIIe arrondissements ; membre de la commission des Finances ; fit preuve de grandes qualitŽs d'organisation et d'un grand courage au combat ; fusillŽ par les Versaillais, le 28-5-1871.

 

VERMERSCH Eugne, 1845-1878 journaliste, petit-bourgeois Ždita durant la Commune le journal Le Pre Duchesne, aprs la chute de la Commune Žmigra en Angleterre o il publia le journal Qui Vive !, dans lequel il attaqua, entre autres, le Conseil gŽnŽral de l'A.I.T.

 

VESINIER Pierre, 1826-1902 : publiciste petit-bourgeois ; l'un des organisateurs de la branche franaise de Londres ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865), fut exclu, pour diffamation, du Conseil central en 1866, et de l'A.I.T. en 1867 ; Žlu, le 16 avril, membre de la Commune pour le 1er arrondissement membre de la Commission des Services publics, nommŽ ˆ la direction du Journal officiel ; condamnŽ ˆ mort par contumace, se rŽfugia ˆ Londres ; secrŽtaire de la Section franaise de 1871 ; membre du Conseil fŽdŽraliste universel, poursuivit ses attaques contre le Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. et Marx-Engels.

 

VICTOR-EMMANUEL II, 1820-1878 : duc de Savoie, roi de Sardaigne (1849-1861) ; roi d'Italie (1861-1878).

 

VIERECK Louis, 1851-1921 : Žditeur, juriste et journaliste ; social-dŽmocrate dŽputŽ au Reichstag (1884-1887) ; l'un des dirigeants les plus en vue de l'aile droite de la fraction parlementaire de la social-dŽmocratie allemande ; fut dŽchargŽ de toutes ses fonctions par dŽcision du congrs de Saint-Gallien de 1887 ; se dŽtourna ensuite de la social-dŽmocratie et Žmigra aux ƒtats-Unis en 1890.

 

VILMOT (de son vrai nom : VILMART Raymond) : rŽvolutionnaire franais, participa ˆ la Commune ; dŽlŽguŽ des sections de Bordeaux au congrs de La Haye (1872) ; Žmigra en 1873 ˆ Buenos Aires, o il propagea les principes de l'Internationale.

 

VOGEL VON FALCKENSTEIN Eduard, 1797-1885 : gŽnŽral prussien ; dŽputŽ du parti conservateur au parlement de l'Allemagne du Nord (1867-1871) ; durant la guerre franco-prussienne gouverneur gŽnŽral des c™tes allemandes, fut ˆ lÕorigine de l'arrestation du comitŽ de Brunswick du parti social-dŽmocrate allemand.

 

VOGT August, nŽ vers 1830-1833 : cordonnier, partisan de Marx-Engels ; membre de la Ligue des communistes, participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849 ; membre de la commune berlinoise de l'Association gŽnŽrale des ouvriers allemands il y dirigea l'opposition prolŽtarienne ; membre de la section berlinoise de l'A.I.T. ; Žmigra aux ƒtats-Unis en 1867, membre du Club des communistes allemands de New York ; participa ˆ la fondation des sections de l'A.I.T. aux ƒtats-Unis, secrŽtaire-correspondant pour l'AmŽrique.

 

VOGT Karl, 1817-1895 : naturaliste, matŽrialiste vulgaire, dŽmocrate petit-bourgeois ; membre de l'AssemblŽe nationale de Francfort (aile gauche) ; en juin 1849, l'un des cinq rŽgents d'Empire ; en 1849, Žmigra en Suisse o il prit un poste de professeur ˆ Genve ; devint un agent stipendiŽ de NapolŽon III durant les annŽes 1850 ; l'un des ennemis les plus acharnŽs du mouvement rŽvolutionnaire et communiste.

 

VOLLMAR Georg Heinrich von, 1850-1922 ancien officier bavarois ; social-dŽmocrate, rŽdacteur du Dresdner Volksbote (1877) et du Sozial-demokrat (1879-1880), dŽputŽ au Reichstag (1881-1887 et 1890-1918) et de la Dite bavaroise (1893-1918) ; ˆ partir des annŽes 1890, l'un des porte-parole les plus influents de l'opportunisme dans la social-dŽmocratie allemande ; social-chauvin durant la Premire Guerre mondiale.

 

 

WACHTER Karl : conseiller rŽfŽrendaire ˆ Cologne ; dŽmocrate petit-bourgeois ; en 1848, commandant de la Garde civile et membre du comitŽ de sŽcuritŽ de Cologne.

 

WALLAU Karl, 1823-1877 : typographe ˆ la Deutsche BrŸsseler Zeitung ; en 1848, prŽsident de l'Association de formation des ouvriers de Mayence ; plus tard bourgmestre de Mayence.

 

WALRAFF : dŽmocrate de Frechen, prs de Cologne.

 

WALTON Alfred A., nŽ en 1816 : architecte ; membre de la Reform League, prŽsident de la National Reform League ; membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1867-1870), dŽlŽguŽ au congrs de Lausanne (1867).

 

WARD Osborne reprŽsentant du mouvement ouvrier amŽricain ; membre de la section de l'A.I.T., de Brooklyn : influencŽ par les rŽformateurs bourgeois, fut Žlu au Conseil gŽnŽral par le congrs de La Haye (1872).

 

WEBB Sidney James, baron Passfield, 1859-1947 : homme politique, fondateur de la Fabian Society ; en commun avec sa femme, BŽatrice, Žcrivit divers ouvrages d'Žconomie bourgeoise et de rŽformes sociales, afin de dŽmontrer que la question ouvrire pouvait tre rŽsolue dans les conditions du capitalisme.

 

WEBER : juriste prussien ; en 1860, avocat de Marx dans son procs contre la National-Zeitung de Berlin.

 

WEBER Georg : mŽdecin de Cologne ; collabora au VorwŠrts (1844) ; secrŽtaire pour l'Allemagne du Nord du ComitŽ de correspondance communiste ; Marx lui rendit visite le 5-7-1871 aprs vingt-cinq ans de sŽparation.

 

WEERTH Georg, 1822-1856 : nŽgociant, pote et publiciste ; en 1843, Žmigra en Angleterre ; fit connaissance d'Engels en 1843 et restera toujours son ami, dŽfendant dans ses Žcrits les idŽes du socialisme ; fit partie du conseil directeur de l'Association dŽmocratique de Bruxelles en 1847 ; aprs un voyage ˆ Bruxelles o il fit la connaissance de Marx, auquel il resta toujours liŽ, il adhŽra ˆ la Ligue des communistes ; en 1848-1849, rŽdigea le feuilleton de La Nouvelle Gazette rhŽnane ; s'installa en ŽtŽ 1849 ˆ Paris, o il se lia avec Heine ; devint voyageur de commerce en 1850, mourut le 30 juillet 1856 ˆ La Havane.

 

WEITLING Wilhelm 1808-1871 : compagnon tailleur de Magdebourg ; en 1835, membre de la Ligue des Proscrits ˆ Paris ; ˆ partir de 1837, dirigeant et thŽoricien de la Ligue des Justes ; le plus important reprŽsentant du communisme ouvrier utopique ; de 1840 ˆ 1843 dŽveloppa une activitŽ rŽvolutionnaire en Suisse ; aprs 1844, sa thŽorie ne correspondit plus aux besoins du mouvement ouvrier ; chercha ˆ relancer ses idŽes ˆ Londres en 1845 avec les chefs de la Ligue des Justes, et au dŽbut 1846 avec le comitŽ de correspondance communiste de Bruxelles ; se rendit, de 1846 ˆ 1848, aux ƒtats-Unis ; dŽveloppa durant la rŽvolution de 1848 ˆ 1849 des idŽes anarchistes ˆ Hambourg et ˆ Berlin ; fin 1849, reprit son activitŽ dans le mouvement ouvrier amŽricain, mais tomba dans le sectarisme teintŽ plus ou moins de religiositŽ ; ˆ la fin de sa vie, se rapprocha de l'Internationale.

 

WERMUTH : directeur de la police ˆ Hanovre ; tŽmoin ˆ charge au procs des communistes de Cologne (1852) ; rŽdigea, avec Stieber, les Conjurations communistes du XIXe sicle.

 

WEST William : radical bourgeois amŽricain ; membre du comitŽ central de la FŽdŽration nord-amŽricaine de l'A.I.T. ; secrŽtaire de la section 12 de New York, qui fut exclue de l'Internationale par le congrs de La Haye (1872).

 

WESTON John : charpentier, entrepreneur, disciple d'Owen ; participa ˆ l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. le 28 septembre 1864 ; membre actif du Conseil gŽnŽral (1864-1872) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865) ; membre du comitŽ exŽcutif de la Reform League, l'un des dirigeants de la Land and Labour League ; membre du Conseil fŽdŽral britannique.

 

WEYDEMEYER Joseph, 1818-1866 : ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier allemand et amŽricain ; vers 1845, influencŽ par le socialisme Ç vrai È, passa ensuite, gr‰ce ˆ Marx-Engels, sur les positions du communisme scientifique ; de 1848 ˆ 1851, chef du district de Francfort de la Ligue des communistes ; participa ˆ la rŽvolution de 1848-1849, l'un des rŽdacteurs responsables de la Neue Deutsche Zeitung (1849-1850) ; Žmigra en 1851 aux ƒtats-Unis, fit la guerre civile aux c™tŽs des Nordistes comme colonel ; fut l'un des premiers propagateurs du marxisme aux ƒtats-Unis ; il Žtait lui-mme extraordinairement familier avec la thŽorie marxiste ; resta toujours l'ami et le compagnon de lutte de Marx-Engels.

 

WEYLL BartholomŽe : juriste de Cologne ; en 1848, membre de la SociŽtŽ dŽmocratique et du ComitŽ de sŽcuritŽ de Cologne ; participa au second congrs des dŽmocrates ˆ Berlin.

 

WHEELER George : ŽlŽment marquant du mouvement ouvrier anglais ; participa ˆ l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. ; membre du Conseil gŽnŽral (1864-1867), dont il fut le trŽsorier (1864-1865, 1865-1868) ; participa ˆ la confŽrence de Londres (1865), membre du comitŽ exŽcutif de la Reform League.

 

WIEDE Franz : journaliste, directeur et rŽdacteur de la revue Die Neue Gesellschaft ˆ Zurich ; collaborateur de la Zukunft.

 

WILLIAMS Charles Owen : stucateur ; syndicaliste anglais, membre du Conseil gŽnŽral de l'A.I.T. (1868-1869).

 

WILLICH August, 1810-1878 : lieutenant prussien, quitta l'armŽe ˆ cause de ses convictions politiques ; membre de la Ligue des communistes ; en 1849, chef d'un corps-franc durant le soulvement de Bade et du Palatinat ; prit la tte, avec Schapper, de la fraction scissionniste de la Ligue des communistes en 1850 ; en 1853, Žmigra aux ƒtats-Unis ; devint gŽnŽral des Nordistes durant la guerre civile (1861-1865).

 

WILSON John Havelock, 1858-1929 : syndicaliste, organisateur et secrŽtaire du syndicat des marins et des mŽcaniciens ˆ partir de 1887 ; dŽputŽ aprs 1892, dŽfendit une politique de collaboration avec la bourgeoisie, social-chauvin durant la Premire Guerre mondiale.

 

WISCHNEWETZSKY Florence : cf. Kelley-Wischnewetzsky.

 

WOLF(F) Ferdinand, 1812-1895 : journaliste, membre de la Ligue des communistes ; de 1848 ˆ 1849, l'un des rŽdacteurs de La Nouvelle Gazette rhŽnane ; Žmigra ensuite ˆ Paris, puis ˆ Londres ; prit parti pour Marx-Engels lors de la scission de 1850 ; se retira plus tard de la vie politique.

 

WOLFF Luigi : major italien, partisan de Mazzini ; membre de l'Associazione di Mutuo Progresso, une organisation d'ouvriers italiens ˆ Londres ; participa ˆ l'assemblŽe inaugurale de l'A.I.T. en 1864, et fut Žlu au Conseil central de l'A. I. T (1864-1865) ; dŽlŽguŽ ˆ la confŽrence de Londres (1865) ; en 1871, dŽmasquŽ comme agent de la police bonapartiste.

 

WOLFF Wilhelm (Lupus), 1809-1864 : instituteur, fils d'un petit paysan silŽsien libre ; ds 1831 politiquement actif dans les associations radicales d'Žtudiants ; emprisonnŽ de 1834 ˆ 1836 dans les ge™les prussiennes en raison de cette activitŽ ; Žmigra ˆ Bruxelles au printemps 1846, et devint l'un des premiers compagnons de lutte et familier de Marx-Engels ; anima en 1846 le comitŽ de correspondance communiste de Bruxelles ; membre de la Ligue des Justes, participa ˆ la fondation de la Ligue des communistes, et fit partie du Conseil central ˆ partir de mars 1848 ; de 1848 ˆ 1849, l'un des rŽdacteurs les plus marquants de La Nouvelle Gazette rhŽnane ; dŽputŽ ˆ l'AssemblŽe nationale de Francfort (extrme-gauche) ; Žmigra en juillet 1849 en Suisse, et en 1851 en Angleterre ; resta jusqu'ˆ la fin de sa vie en contact le plus Žtroit avec Marx-Engels, dont il partagea aussi bien les conceptions que les activitŽs. Marx lui a dŽdiŽ Le Capital.

 

WOODHULL Victoria, 1838-1927 : journaliste et militante fŽministe ; elle dirigea la section 12 de l'A.I.T. de New York qui fut suspendue par dŽcision du congrs de La Haye.

 

ZASSOULITCH VŽra Ivanovna, 1851-1919 rŽvolutionnaire russe, membre actif du mouvement populiste, puis du mouvement social-dŽmocrate russe ; participa ˆ la fondation du groupe LibŽration du Travail ; en exil ˆ Genve ; rŽdactrice de l'Iskra ; traduisit diffŽrents ouvrages de Marx en russe ; se joignit aux mencheviks.

 

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Nous nÕavons pas reproduit ici lÕindex analytique des idŽes que lÕon retrouve ˆ la fin du tome IV, allant des pages 145 ˆ 172. JMT.

 

Fin du texte

 



[1]    Cette longue citation montre combien il est vain d'essayer de retracer de manire complte et dŽfinitive l'activitŽ de parti de Marx-Engels. Cette dernire partie, qui embrasse une pŽriode et un champ d'action immenses, mŽriterait Žvidemment des dŽveloppements autrement plus amples que ceux que nous pouvons leur donner ici. Quoi qu'il en soit, notre but premier est de fournir une vision d'ensemble. Cette partie surtout montre ce qui distingue un recueil de l'exposŽ dŽtaillŽ.

            Dans la partie suivante de ce recueil, nous trouvons les textes qui, ˆ partir de l'analyse Žconomique et historique du terrain sur lequel Žvoluent les diffŽrents partis d'Europe et d'AmŽrique, dŽfinissent la tactique ˆ adopter par les partis des pays dŽveloppŽs aussi bien qu'arriŽrŽs dans la stratŽgie internationale du prolŽtariat international avec la perspective du but gŽnŽral du socialisme.

            Ces textes frappent en ce qu'ils dŽmontrent combien Marx-Engels relient indissolublement parti et conditions matŽrielles de la sociŽtŽ concrte, en tournant le dos ˆ toute conception absolue, hŽgŽlienne, du parti, qui sŽpare les conditions matŽrielles des conditions subjectives de l'Žmancipation du prolŽtariat, en faisant du parti une chose en soi, dŽterminŽe par elle-mme, par en haut, comme dans le stalinisme par exemple.

[2]    Cf. Engels ˆ Ion Nadejde, 4 janvier 1888.

            Pour la formation du parti dans un pays, le premier pas ‑ essentiel ‑ est l'adoption du programme thŽorique de base qui relie les forces organisŽes nouvelles avec les rŽvolutionnaires du monde entier, ainsi qu'avec la lutte historique du prolŽtariat de tous les pays, en coordonnant les efforts de tous vers un mme but, dans un plan stratŽgique commun, par-delˆ les conditions temporelles et locales contingentes.

            Le programme thŽorique n'est rien sans sa coordination rigoureuse avec l'action pratique de chaque section rŽvolutionnaire des diffŽrents pays. Comme l'explique Engels, c'est une certaine maturation des conditions Žconomiques et sociales qui permet aussi une telle coordination programmatique de l'action politique. Le facteur volontaire d'organisation des forces rŽvolutionnaires implique toujours une base matŽrielle qui dŽtermine les possibilitŽs d'action. D'o l'importance de l'analyse scientifique du cadre Žconomique et social de la pratique rŽvolutionnaire.

[3]    Aprs la Ire Internationale, Engels ne parle pas de partis organisŽs par nations ou groupŽs en une Internationale, mais tout simplement du parti europŽen.

[4]    Dans le brouillon, le passage suivant est barrŽ :  Ç [...] de la Russie, de l'Autriche et de la Prusse sous la souverainetŽ du tsarisme russe et ˆ son profit particulier. Cette alliance continue de subsister, mme aux temps des conflits, qui ne sont que des chamailleries de famille. Elle subsistera mme aux cas o une guerre surviendrait entre les alliŽs, car cette guerre aurait pour but de mettre de nouveau au pas la Prusse ou l'obstinŽe Autriche. Cette alliance Žtant formŽe, il en dŽcoule l'hŽgŽmonie de la Russie sur les deux autres puissances, du simple fait de la prŽpondŽrance militaire russe. Or, cette position a ŽtŽ considŽrablement renforcŽe depuis que, dans sa dŽmence, Bismarck s'est emparŽ de l'Alsace-Lorraine, poussant ainsi la France dans les bras de la Russie donc au service du tsar, ds que la Prusse osera bouger. Qui plus est, la Russie ne peut tre attaquŽe qu'ˆ partir de la Pologne, c'est dire qu'elle est pratiquement inexpugnable pour ses deux autres partenaires, ˆ moins que ceux-ci ne se risquent dans une guerre qui leur crŽera des difficultŽs ˆ eux-mmes. Pour toutes ces raisons, la Russie est, aujourd'hui comme en 1815, le noyau de la Sainte-Alliance, la grande rŽserve de la rŽaction europŽenne. È

[5]    Dans le brouillon, la phrase se poursuivait : Ç [.. ] et notre parti ouvrier marchera ˆ pas de gŽant vers la rŽvolution. È

[6]    Le rglement organique de 1831 dŽtermina l'ordre devant rŽgner dans les PrincipautŽs danubiennes, aprs leur occupation par les troupes russes lors de la guerre russo-turque de 1828-1829. Le pouvoir lŽgislatif revint ˆ une chambre Žlue par les propriŽtaires fonciers, et l'exŽcutif ˆ des reprŽsentants nommŽs ˆ vie par les propriŽtaires fonciers, le clergŽ et les notables des villes. L'ensemble du systme Žtait fondŽ sur le servage des paysans. Ceux-ci se soulevrent aussit™t. Les boyards firent appel aux troupes russes et turques en 1848 : la Russie et la Turquie s'assurrent, par le traitŽ de Balta-Liman du 1er mai 1849, le droit d'intervenir directement dans les PrincipautŽs danubiennes durant sept ans pour en Žliminer toute menace rŽvolutionnaire.

            Le traitŽ de Bucarest (28 mai 1812) attribua la Bessarabie ˆ la Russie. Une partie de la Bessarabie fut donnŽe ˆ la Turquie, aprs la guerre de CrimŽe, et en 1878 cette partie retourna ˆ la Russie, lors du traitŽ de Berlin.

[7]    Cette phrase manque dans le brouillon.

[8]    Engels ˆ VŽra Zassoulitch, 23 avril 1885.

            Il s'agit manifestement de l'organisation marxiste russe Osvobojedenie Tronda, crŽŽe ˆ Genve en septembre 1883 par un groupe d'ŽmigrŽs russes, anciens populistes rŽvolutionnaires. Ce groupe, dirigŽ essentiellement par PlŽkhanov et Zassoulitch, rompit dŽfinitivement avec le populisme et se fixa pour tache la diffusion du marxisme en vue de rŽsoudre les questions essentielles pour les travailleurs en Russie. Cette organisation reprŽsenta, en effet, un premier pas dans la rŽvolution russe future.

[9]    Des membres du groupe Narodnia Volia (VolontŽ populaire) entreprirent ce jour-lˆ un attentat contre le tsar Alexandre II.

[10]   Dans le brouillon, Engels avait complŽtŽ cette phrase comme suit : Ç Je ne dis pas en Russie, car en province, loin du centre gouvernemental, on ne saurait exŽcuter un tel coup de main. È

[11]   Dans les Vorlesungen Ÿber die Geschichte der Philosophie, Hegel fait la remarque suivante en liaison avec son interprŽtation de l' Ç ironie socratique È : Ç Toute dialectique fait ressortir ce qui doit ressortir, comme devant ressortir, laisse se dŽvelopper toute seule la destruction interne : ironie gŽnŽrale du monde. È

[12]   Dans le brouillon, Engels avait ajoutŽ : Ç Peut-tre en sera-t-il ainsi pour nous tous. È

[13]   La situation ayant mžri considŽrablement de 1885 ˆ 1917, on ne saurait sans forcer la pensŽe d'Engels en dŽduire que l'action du parti bolchevique de LŽnine devait nŽcessairement tre de type blanquiste. Cf. ˆ ce propos L. TROTSKY, Terrorisme et Communisme, 10/18 p. 35-45, sur Ç Le rapport des forces È.

[14]   Dans le brouillon, Engels avait ajoutŽ : Ç [...] par une clique de nobles ou de spŽculateurs en Bourse, qu'ils soient les bienvenus jusqu'ˆ [...] È

[15]   Dans la prŽface du Manifeste (Ždition russe de 1882), Marx-Engels relient la rŽvolution russe ˆ la rŽvolution prolŽtarienne des pays dŽveloppŽs d'Europe : Ç Si la rŽvolution russe donne le signal d'une rŽvolution prolŽtarienne en occident, et que toutes deux se compltent, l'actuelle propriŽtŽ collective de Russie pourra servir de point de dŽpart pour une Žvolution communiste. È

            Ils relient ainsi la rŽvolution (double : antifŽodale puis socialiste) des pays non dŽveloppŽs du point de vue capitaliste ˆ la rŽvolution directement socialiste des pays dŽveloppŽs, en une stratŽgie unique, internationale, du prolŽtariat mondial.

            Le Congrs de Bakou de la IIIe Internationale reprit fidlement ce schŽma classique de la stratŽgie de lutte marxiste : cf. Manifestes, thses et rŽsolutions des quatre premiers congrs mondiaux de l'Internationale communiste, 1919‑1923, textes complets, Bibliothque communiste, rŽimpression en fac-similŽ, Maspero, 1969. Ce recueil renferme, en outre, toutes les thses sur la nature, les t‰ches et le r™le du parti dans la perspective strictement marxiste pour l'Žpoque moderne. Il complte en ce sens le prŽsent recueil de Marx-Engels.

[16]   Cf. Engels ˆ Karl Kautsky. Londres, 7-15 fŽvrier 1882.

[17]   Engels se rŽfre ˆ l'ouvrage paru anonymement et intitulŽ Berlin und St-Petersburg ‑ Preussische BeitrŠge zur Geschichte der Russisch-Deutschen Beziehungen, Leipzig, 1880, dont la seconde annexe Žtait consacrŽe au soulvement polonais de 1863-1864.

[18]   Brouillon de la lettre du 18 dŽcembre 1889 envoyŽe par Engels ˆ Gerson Trier.

            Engels fait allusion ˆ la dŽcision du comitŽ directeur du parti danois d'exclure la fraction rŽvolutionnaire. Celle-ci crŽa sa propre organisation, sans rŽussir cependant ˆ s'imposer durablement. La fraction rŽvolutionnaire, sous la direction de Gerson Trier et de Nicolas Petersens, avait engagŽ la lutte contre l'aile rŽformiste du Parti ouvrier social-dŽmocrate du Danemark, fondŽ en 1876. Les rŽvolutionnaires se grouprent autour du journal Arbejderen et luttrent contre le rŽformisme et pour la formation d'un vŽritable parti de classe prolŽtarien.

[19]   Dans cet article, Engels Žtablit la distinction entre tactique directe, frontale, ˆ suivre par le parti dans les pays de capitalisme dŽveloppŽ, et tactique indirecte, d'alliances possible avec les partis bourgeois ou petits-bourgeois encore progressistes dans les pays non encore dŽveloppŽs.

[20]   Engels se rŽfre au Parti du progrs bourgeois de tendance libŽrale de gauche, fondŽ en 1861, en vue d'unifier l'Allemagne sous direction prussienne. Son aile droite se constitua en 1866, aprs la victoire de la Prusse sur l'Autriche, en Parti national-libŽral qui soutint dŽsormais Bismarck sur toutes les questions importantes. L'autre aile petite-bourgeoise dŽfendit essentiellement les intŽrts de la bourgeoisie marchande, des petites entreprises et de la petite bourgeoisie urbaine : elle fut battue sur tous les points dŽcisifs. Aprs 1871, par crainte des social-dŽmocrates, elle tempŽra son opposition au rŽgime de Bismarck et finit par fusionner avec l'aile gauche du Parti national-libŽral en 1884 pour former le Parti des libres-penseurs allemands.

[21]   Venstre (Gauche) : parti dŽmocrate petit-bourgeois au Danemark, fondŽ en 1870.

[22]   Allusion au conflit d'ordre constitutionnel, surgi au Danemark en 1875 entre la Gauche petite-bourgeoise, qui dŽtenait la majoritŽ au Parlement, et le Parti national-libŽral qui Žtait au gouvernement. En reprŽsailles, la Gauche refusa de voter le budget, de sorte que le gouvernement usa de mŽthodes de moins en moins dŽmocratiques et parlementaires pour se procurer les moyens budgŽtaires. La situation sociale se tendit de plus en plus, et les paysans se rŽvoltrent. Ne jurant que par les mŽthodes des parlementaires, la Gauche fut doublement stŽrile, les paysans furent durement rŽprimŽs, et le gouvernement fit ce qui lui plaisait.

[23]   Allusion au courant du chartisme favorable ˆ l'utilisation de moyens rŽvolutionnaires de lutte violente, en opposition aux partisans du courant qui revendiquait les moyens pacifiques, appelŽs Ç moyens de violence morale È. Les dirigeants les plus marquants de l'aile rŽvolutionnaire furent Feargus O'Connor, George Harney, Ernest Jones.

[24]   Engels fait allusion aux conflits survenus dans le comitŽ exŽcutif du Parti ouvrier socialiste d'AmŽrique du Nord en septembre 1889. Le parti se divisa et chaque fraction tint son propre congrs, lÕun ˆ Chicago fin septembre et l'autre le 12 octobre.

[25]   Cf. Engels ˆ Hermann SchlŸter, Londres, 30 mars 1892.

[26]   Cf. Engels ˆ Florence Kelley-Wischnewetzsky, 3 juin 1886.

            Dans les extraits suivants, Engels parle du danger petit-bourgeois, mais ˆ propos du mouvement ouvrier amŽricain. Ici encore, c'est la possibilitŽ matŽrielle de devenir ou de redevenir petit-bourgeois, producteur et trafiquant ˆ son propre compte, qui empche la formation d'un parti de classe, donc d'un prolŽtariat conscient, organisŽ, rŽvolutionnaire. Les circonstances sont foncirement opposŽes ˆ celles de l'Allemagne, mais l'obstacle, l'adversaire ˆ vaincre, est le mme : les rapports petits-bourgeois existant matŽriellement et intellectuellement. La corruption ultŽrieure du mouvement ouvrier consistera ˆ maintenir vivace cet esprit bornŽ sur la base dŽsormais capitaliste : participation aux miettes du festin colonialiste ou aux surprofits impŽrialistes, notamment aux pŽriodes de prospŽritŽ du cycle industriel gŽnŽral.

[27]   Cf. Engels ˆ Eduard Bernstein, 22 mai 1886.

[28]   Au printemps 1886, les ouvriers amŽricains avaient lancŽ un grand mouvement en vue d'obtenir la journŽe de travail de huit heures. Le point culminant en fut la grve gŽnŽrale de plusieurs jours, commencŽe le 1er mai, dŽclenchŽe par 350 000 ouvriers des quatre coins du pays. Environ 200 000 obtinrent une rŽduction de la journŽe de travail. Ë Chicago, la police tira sur les manifestants le 3 mai, en utilisant comme prŽtexte le fait qu'une bombe avait ŽtŽ lancŽe dans un groupe de policiers. Plusieurs centaines d'ouvriers furent arrtŽs, la plupart des dirigeants ouvriers de Chicago. Tra”nŽs devant les tribunaux, ils furent condamnŽs ˆ des peines sŽvres, et quatre d'entre eux furent exŽcutŽs en novembre 1887. En souvenir de ces ŽvŽnements de Chicago, le congrs de l'Internationale socialiste dŽcida en 1889 de faire du 1er Mai la fte du Travail dans tous les pays.

[29]   Dans la dialectique entre mouvement Žconomique ‑ syndicats, coopŽratives, gestion ouvrire ‑ et mouvement politique, Engels recherche ici le point d'Žquilibre le plus favorable ˆ l'Žvolution de la conscience rŽvolutionnaire du prolŽtariat. Il ne s'agit pas de nier l'un ou l'autre facteur ‑ Žconomique ou politique ‑mais de les relier solidement l'un ˆ l'autre, afin qu'aucun d'eux ne se fige et mobilise l'activitŽ ouvrire dans un sens unique : Ç Si les syndicats sont indispensables dans la guerre d'escarmouches du travail et du capital, ils sont encore plus importants comme force organisŽe pour supprimer et remplacer le systme du travail salariŽ. È (Cf. MARX-ENGELS, Le Syndicalisme, Maspero, t. I, p. 69.)

[30]   Cf. Engels ˆ F. A. Sorge, 10 novembre 1894.

            Le pays le plus avancŽ dŽsignant aux autres leur Žvolution ultŽrieure, le marxisme a prŽvu la faiblesse successive du mouvement amŽricain qui suivit l'Žvolution anglaise, lorsque les ƒtats-Unis, au dŽbut de ce sicle, ravirent ˆ l'Angleterre la suprŽmatie sur le marchŽ mondial et dans la production capitaliste en gŽnŽral.

            LÕanalyse des conditions du mouvement anglais par Marx-Engels a donc un intŽrt non seulement pour les pays les plus avancŽs et la position de l'aristocratie ouvrire blanche, mais encore pour les pŽriodes modernes de recul du mouvement communiste et de triomphe de la contre-rŽvolution.

            Aprs avoir montrŽ que l'instinct rŽvolutionnaire des masses est liŽ aux changements survenus dans la base matŽrielle de la production, notamment de la grande industrie, Engels esquisse ensuite la dŽmarche par laquelle on passe de ce stade ŽlŽmentaire de la conscience de classe ˆ un stade supŽrieur de son organisation, en mme temps qu'il dŽnonce tous les piges et obstacles sur cette voie.

[31]   Le Socialist Labor Party of North America fut crŽŽ en 1876 au Congrs d'unification de Philadelphie par la conjonction des ŽlŽments marxistes de la Ire Internationale sous la direction de Sorge et de Weydemeyer, et des lassallŽens du Labor Party de l'Illinois et du Social Democratic Party. Le programme en fut, en gros, celui de la Ire Internationale, mais tout de suite les dissensions commencrent avec les lassallŽens qui contr™lrent le parti ds 1877, en condamnant le travail syndical et en orientant les ouvriers exclusivement vers la participation aux Žlections. Ce parti Žtait composŽ essentiellement d'ŽmigrŽs allemands qui avaient peu de contact avec les masses, d'o leur particularisme.

[32]   Cf. Engels ˆ Karl Kautsky, 3 janvier 1895.

[33]   Cf. Engels ˆ John Lincoln Mahon, 23 janvier 1887.

            John Lincoln Mahon ainsi que diffŽrents dirigeants de la Socialist League fondrent en avril 1887 la North of England Socialist Federation dans le prolongement de la grande grve des mineurs de janvier ˆ mai 1887. Le plan de Mahon consistait ˆ unifier de telles organisations socialistes locales sur la base d'une plate-forme commune, ˆ l'occasion d'un congrs. Mahon voulait prŽparer ce congrs par une large agitation socialiste, que lui-mme dirigerait en ƒcosse et Donald dans le nord de l'Angleterre. Il demandait ˆ Engels d'apporter son appui actif ˆ ce projet.

[34]   Comme Engels le suggre pour l'AmŽrique, le moyen le plus efficace pour gagner le prolŽtariat au socialisme, c'est de relier son mouvement et ses revendications Žconomiques au mouvement et aux mots d'ordre politiques, en l'occurrence en gagnant les syndicats ˆ la lutte pour l'abolition du salariat, c'est-ˆ-dire lÕŽlimination du mercantilisme et des rapports sociaux capital-salariat.

[35]   Cf. Engels ˆ John Lincoln Mahon, 26 juillet 1887.

            Le 21 juillet, Mahon avait Žcrit ˆ Engels qu'il refusait de collaborer dŽsormais avec Edward Aveling, n'ayant plus confiance en lui. Mais il ne dit mot sur les motifs de son attitude.

[36]   Cf. Engels ˆ Kautsky , le 4 septembre 1892.

            Les Žlections lŽgislatives anglaises de l'ŽtŽ 1892 s'achevrent par la victoire des LibŽraux. Trois candidats ouvriers furent Žlus : James Keir Hardie, John Burns et John Havelock Wilson.

[37]   Edward Aveling et sa compagne, Eleanor Marx, avaient Žcrit un article sur Les Elections en Grande-Bretagne. Kautsky en avait ŽliminŽ tous les passages attaquant le sectarisme et l'opportunisme de la FŽdŽration social-dŽmocrate et de la SociŽtŽ fabienne. Dans sa lettre du 8 aožt 1892 a Engels, Kautsky prŽtendit que l'article Žtait arrivŽ en son absence et qu'il avait dž, au dernier moment, raccourcir l'article pour le faire entrer dans la revue.

[38]   Dans sa lettre ˆ Bebel du 14- aožt 1892, Engels Žcrivait ˆ ce propos : Ç Les passages ci-inclus de l'article des Aveling dans la Neue Zeit ont ŽtŽ refusŽs par Kautsky. Celui-ci m'Žcrit qu'il a dž le faire pour des raisons techniques. Cela est possible, mais il partage sans doute aussi le respect bizarre de Bernstein pour les Fabians et l'intŽrt de Bax (qui est ˆ Zurich) pour la FŽdŽration social-dŽmocrate. En tout cas, les passages tÕintŽresseront : ils forment un ŽlŽment indispensable ˆ une vision d'ensemble. È

[39]   Effectivement, dans les pays dŽveloppŽs, le capitalisme d'ƒtat (ce que les faux socialistes appellent le Ç socialisme d'ƒtat È) se manifeste de nos jours en grande partie au travers de la fiscalitŽ qui rgle, au moyen des taxes, avantageuses en un sens et prohibitives en un autre, l'exportation par exemple et, partant, une grande partie de la production, sans parler de la production intŽrieure, en grevant la consommation, par exemple, ou en favorisant telle branche ou telles entreprises (grandes, moyennes ou petites voire l'industrie ou l'agriculture).

[40]   Dans la sŽrie d'articles sur La Doctrine sociale de l'anarchisme de Bernstein, le troisime Žtait intitulŽ Ç Proudhon et le mutualisme È (cf. Neue Zeit, 1831-1892, È Nos 45-47).

[41]   Cf. Engels ˆ A. Bebel, 24 janvier 1893.

            Engels fait allusion au Parti travailliste indŽpendant (Independent Labour Party), fondŽ en janvier 1893 ˆ la ConfŽrence de Bradford par la conjonction de divers courants venu des anciens et nouveaux syndicats, de la SociŽtŽ fabienne et de la FŽdŽration social-dŽmocrate.

[42]   Engels fait allusion ˆ la chute du cabinet Gladstone provoquŽe par le vote commun des parlementaires irlandais, sous la direction de Charles Stewart Parnell, et des conservateurs. Les libŽraux sentirent que leur sort dŽpendait ds lors des parlementaires irlandais. Lorsque Gladstone revint au pouvoir en 1886, il fit adopter deux lois en faveur de l'Irlande : le Home Rule Bill et la loi sur lÕagriculture irlandaise. Les deux nouveaux projets de loi de Gladstone en 1893 sur le Home Rule Bill ne furent jamais adoptŽs.

[43]   Henry Hyde Champion, journaliste, membre de la FŽdŽration social-dŽmocrate, dirigeant de l'Association Žlectorale travailliste des syndicats de Londres et directeur du Labour Elector, entretint durant toute une pŽriode des contacts secrets avec les Conservateurs.

[44]   Cf. Engels ˆ A. Bebel, 9 fŽvrier 1893.

[45]   Les radicaux-libŽraux formaient un courant au sein du parti libŽral et reprŽsentaient essentiellement la bourgeoisie industrielle. Par le truchement des radicaux qui ne formrent jamais un groupe organisŽ au Parlement, le parti libŽral rŽussit ˆ influencer les syndicats.

[46]   Cf. Engels ˆ F. A. Sorge, 10 novembre 1894.

[47]   Les Conservateurs obtinrent la majoritŽ en 1895, mais les candidats du Parti travailliste indŽpendant, parmi lesquels Reir Hardie, ne furent pas Žlus.

[48]   Cf. Engels ˆ Johann Philipp Becker, Londres, 10 fŽvrier 1882.

[49]   Engels fait allusion ˆ G. Shipton. Cf. infra, la correspondance d'Engels avec ce dernier.

[50]   Cf. Engels ˆ F. A. Sorge, 8 juin 1889.

            La position d'Engels ˆ propos de la crŽation de la nouvelle Internationale ne s'explique qu'en fonction de la conception matŽrialiste gŽnŽrale, qui n'a rien ˆ voir avec le fanatisme de la Ç condition subjective È, ni de la condition absolue (que Staline lui-mme a d'ailleurs reniŽe, en dissolvant la IIIe Internationale) sous la pression des rŽalitŽs matŽrielles (en Žchange du prt et bail de son alliŽ amŽricain au cours de la dernire guerre impŽrialiste).

[51]   Engels ˆ F. A. Sorge, 7 octobre 1893.

            Engels analyse dans ces passages le processus de formation de la conscience de classe et du parti, ˆ partir des couches profondes du prolŽtariat. Il vaut de noter que, mme en Allemagne o le parti Žtait le mieux organisŽ du monde ˆ cette Žpoque, les masses Žtaient en avance sur l'organisation, ou plus exactement l'organisation n'Žtait pas ˆ la hauteur de ses t‰ches.

            Le processus de formation du parti n'est donc pas rectiligne, en fonction directe des masses prolŽtariennes. En Allemagne, de 1919 ˆ 1930, on a encore constatŽ que les masses ont manifestŽ une combativitŽ et un esprit rŽvolutionnaire exceptionnels, en retournant sans cesse au combat, taudis que la direction du parti et notamment de l'Internationale accumulait erreur sur erreur, et manquait finalement ˆ sa mission.

            De fait, les masses manifestent le plus directement les contradictions de l'appareil Žconomique et politique gŽnŽral du capitalisme, et donc les bouleversements et crises de celui-ci.

            Nous abordons avec ces textes l'une des questions fondamentales du marxisme, la question agraire. Elle se relie ici ˆ la question de la petite bourgeoisie, c'est-ˆ-dire aux rapports du parti prolŽtarien avec les partis petits-bourgeois et paysans, ˆ l'influence de l'idŽologie petite-bourgeoise au sein de la `classe ouvrire (la corruption ne pouvant s'effectuer par l'idŽologie proprement bourgeoise).

            Le lien entre question agraire et influences petites-bourgeoises ne s'effectue pas au travers d'un simple processus idŽologique, mais par l'existence de conditions matŽrielles qui peuvent tre trs diverses, peu dŽveloppŽes, prŽcapitalistes dans un cas, dŽveloppŽes et archi-capitalistes ans un autre (comme on l'a vu dans le cas de l'AmŽrique). En ce qui concerne la critique d'Engels du programme agraire des partis franais et allemands, Cf. ENGELS, La Question paysanne en France et en Allemagne (1894), Žd. sociales, 1956.

[52]   Cf. Engels ˆ Karl Kautsky, 1er juin 1893.

[53]   Cf. Engels ˆ Paul Sumpf, 3 janvier 1895.

[54]   Engels fait allusion au conflit au sein de la social-dŽmocratie allemande ˆ propos de la question agraire : en 1869-1870, les reprŽsentants du Parti populaire tentrent d'obtenir que le parti d'Eisenach rejette la rŽsolution du Congrs de B‰le de Internationale sur la nationalisation de la terre. Le Congrs de Stuttgart (1870) repoussa catŽgoriquement cette tentative.

[55]   Lettre d'Engels ˆ Wilhelm Liebknecht, 24 octobre 1894. La lettre ˆ Bebel, ˆ laquelle Engels fait allusion, a ŽtŽ perdue comme tant d'autres.

[56]   Dans une rŽunion dans la seconde circonscription berlinoise, le 14 novembre 1894, August Bebel critiqua dans une longue intervention, la position opportuniste prise par Georg von Vollmar et d'autres social-dŽmocrates bavarois, lors du congrs du parti tenu ˆ Francfort. Vollmar y avait dŽfendu la pŽrennitŽ de la petite propriŽtŽ paysanne et proposŽ des mesures pour sa sauvegarde gr‰ce ˆ une collaboration entre l'ƒtat existant et la social-dŽmocratie. La majoritŽ du congrs se laissa surprendre dans cette question prŽtendument technique. Le discours de Bebel fut publiŽ dans VorwŠrts du 16 octobre 1894 et la Critica sociale du 1er dŽcembre 1894.

[57]   Engels explique ici, de manire trs simple et lumineuse, la nŽcessitŽ, mais aussi la relativitŽ parfaite, de la nŽgation de certains faits survenant ˆ l'intŽrieur du parti.

[58]   Lors du second congrs de la social-dŽmocratie bavaroise du 30 septembre 1894 ˆ Munich, l'ordre du jour porta sur l'activitŽ des parlementaires social-dŽmocrates ˆ la Dite bavaroise et l'agitation parmi les paysans (les petites parcelles prŽdominent dans les rŽgions de montagne). Vollmar rŽussit ˆ rallier une majoritŽ ˆ ses idŽes. Le congrs approuva la ratification du budget d'ƒtat par la fraction parlementaire social-dŽmocrate. Il entŽrina une rŽsolution en vue de crŽer une organisation plus stricte des social-dŽmocrates bavarois sous la direction centrale de leurs reprŽsentants ˆ la Dite (c'est-ˆ-dire de parlementaires dŽsignŽs par un systme dŽmocratique-bourgeois et par des Žlecteurs et citoyens qui ne sont pas du parti !). Vollmar tentait par ce moyen de se crŽer un bastion pour sa politique opportuniste.

[59]   Sobriquet de Karl Grillenberger.

[60]   Au Congrs de Francfort, Vollmar avait soulignŽ la spŽcificitŽ des Ç conditions bavaroises È et Ç la manire d'tre bavaroise È en s'opposant aux camarades du Ç nord de l'Allemagne È et en ironisant sur Ç l'esprit caporaliste de la Vieille-Prusse È, etc.

[61]   Dans l'article du 23 novembre 1894 la rŽdaction du VorwŠrts Žcrivait qu'elle Žtait en Ç opposition diamŽtrale È avec l'intervention de Bebel dans la deuxime circonscription de Berlin. Le 24 la rŽdaction revint pratiquement sur sa dŽclaration, en Žcrivant qu'elle n'en voulait qu'ˆ Ç la position pessimiste de Bebel sur tout le dŽroulement des dŽbats et le bas niveau intellectuel du Congrs È (sic), mais que Liebknecht Žtait Ç du mme avis que Bebel depuis un quart de sicle È sur la question agraire, et qu'ils avaient mme rŽdigŽ et signŽ en commun la rŽsolution sur la tactique ˆ adopter par les reprŽsentants parlementaires.

[62]   Engels ne fait absolument aucun cas de ce que l'on appellera plus tard le monolithisme de l'organisation. Le programme thŽorique est essentiel et passe en premier quoi qu'en pensent 999 prŽtendus marxistes sur 1 000 pour qui la thŽorie n'est qu'une affaire contingente, sans force d'obligation. Pourtant, c'est lui, et non l'organisation formelle du parti, qui a raison ‑ et sans hŽsitation aucune pour Marx-Engels ‑ lorsqu'il y a conflit entre les deux. La seule question qui se pose, c'est la gravitŽ du conflit : lˆ encore c'est la thŽorie (le programme) qui dŽcide, en dernier ressort, s'il s'agit de la violation d'un principe ou non.

[63]   Texte Žtabli d'aprs une copie dactylographiŽe.

[64]   Cf. Engels ˆ F. A. Sorge, 4 dŽcembre 1894.

            Le discours de Bebel avait soulevŽ, comme Engels l'avait prŽvu, une violente polŽmique qui agita le parti et le fit se pencher sur la question agraire. Grillenberger et Vollmar rŽpondirent par plusieurs articles dans la presse centrale aussi bien que locale. Bebel rŽpondit, ˆ son tour, par une sŽrie de quatre articles qui parurent du 28 novembre au 1er dŽcembre 1894 dans le VorwŠrts.

[65]   Allusion d'Engels au second congrs de la social-dŽmocratie bavaroise, tenu ˆ Munich le 30 septembre 1894, o Vollmar et Grillenberger rŽussirent ˆ faire passer leurs vues.

[66]   Cf. Engels ˆ F. A. Sorge, 12 dŽcembre 1894.

[67]   Lors du prŽtendu Ç cours nouveau È du gouvernement Caprivi, successeur de Bismarck, Vollmar en profita pour suggŽrer une tactique de collaboration avec le gouvernement, sur le plan intŽrieur et extŽrieur, notamment en cas de guerre avec la Russie. Ses propositions tendaient, plus ou moins ouvertement, au rŽformisme qui s'Žtala au grand jour aprs la mort d'Engels. Ë ce moment, cependant, Vollmar n'eut que l'approbation de la presse bourgeoise, le parti le critiqua sŽvrement, et le Congrs d'Erfurt condamna ses positions.

[68]   Engels fait allusion ˆ la polŽmique du VorwŠrts contre l'article de Vollmar publiŽ dans la Revue bleue parisienne de juin 1892 o il avait affirmŽ que le Congrs d'Erfurt s'Žtait rapprochŽ sur un certain nombre de points du socialisme d'ƒtat proclamŽ par Bismarck et Guillaume II. Le VorwŠrts rŽfuta les arguments de Vollmar dans ses articles des 6, 12, 21 et 22 juillet 1892.

[69]   Engels fait allusion ˆ son article sur La Question paysanne en France et en Allemagne (cf. ƒd. sociales, Paris, 1956), qu'il rŽdigea pour rŽfuter l'opportunisme de Vollmar sur la question agraire lors du Congrs de Francfort. Vollmar avait utilisŽ ˆ ses fins les faiblesses du programme franais du Congrs de Nantes en prŽtendant que celui-ci avait reu l'approbation expresse dÕEngels.

[70]   La seconde lettre a ŽtŽ perdue.

[71]   Dans son discours, Liebknecht avait ŽvoquŽ le projet gouvernemental relatif aux modifications et adjonctions aux textes sur la rŽpression des dŽlits de presse. Ce projet prŽvoyait une peine de forteresse pour les incitations ˆ la sŽdition, mme lorsqu'elles n'Žtaient pas suivies d'effet. Le 11 mai 1895 le projet fut dŽfinitivement repoussŽ. En ce qui concerne l'insulte ˆ l'Empereur : dans la sŽance du Reichstag du 6 dŽcembre 1894, les membres de la fraction social-dŽmocrate Žtaient restŽs assis lorsque le prŽsident von Levetzow porta un vivat ˆ l'Empereur. Le 11 dŽcembre, le Chancelier zu Hohenlohe demanda que l'on engage‰t des poursuites contre Wilhelm Liebknecht. Cette proposition fut repoussŽe par 168 voix contre 58, le 15 dŽcembre.

[72]   Cf. Engels ˆ W. Liebknecht, 31 juillet 1877.

            Les textes ci-aprs traitent du rapport du parti avec la presse. Nous ne prŽtendons pas en exposer la thŽorie, ni mme en donner une vision complte, puisque nous ne rassemblons ici que quelques passages.

            Il appara”t ici que, face au parti formel, Marx-Engels n'entendent pas soumettre le contenu de leur thŽorie ou de leur programme ˆ la ratification de la masse ou des chefs du parti. Ë leurs yeux, la thŽorie et le programme dŽcoulent de tout le mouvement de la sociŽtŽ vers le communisme, et ce n'est donc pas la majoritŽ qui, dŽmocratiquement, les Žtablit ou les modifie ‑ pas plus d'ailleurs que la direction du parti, voire les congrs. En se fondant, par exemple, sur l'expŽrience malheureuse de la fusion avec les lassallŽens, Engels dŽmontrera au contraire que tout compromis dans le programme fondamental aboutit ˆ des crises et ˆ des maladies dans le parti. En outre, il s'en prendra aux initiatives irrŽflŽchies et prŽcipitŽes qui rompent la continuitŽ de programme et, d'action dans l'organisation et les masses prolŽtariennes.

            Engels s'efforce naturellement de sauvegarder la presse de caractre Ç scientifique È, c'est-ˆ-dire thŽorique et programmatique, qui est l'expression du parti historique.

[73]   Engels fait allusion aux dŽbats dŽgradants du Congrs de Gotha (1877) sur la question de savoir s'il fallait ou non que le parti continue la publication de l'Anti-DŸhring de Marx-Engels. Cf. aussi note 76. [Voir la 3e note plus loin. JMT.]

[74]   Cf. Marx ˆ Wilhelm Blos, 10 octobre 1877.

            W. Blos avait Žcrit ˆ Marx : Ç Je m'Žtonne que nos amis londoniens se fassent relativement peu entendre dans la presse, Žtant donnŽ qu'ils trouveraient d'ores et dŽjˆ chez les ouvriers allemands plus de sympathie que jamais, et que, gr‰ce ˆ notre agitation (sic), ils sont plus populaires qu'ils ne le savent sans doute. È

[75]   Allusion ˆ la Ligue des communistes.

[76]   Au Congrs de Gotha (27-29 mai 1877), certains dŽlŽguŽs cherchrent ˆ empcher la poursuite de la publication de l'Anti-DŸhring de Marx-Engels dans la presse du parti. Des dŽbats sordides s'ensuivirent sur les mŽrites particuliers de Marx-Engels : la Ç dette de reconnaissance du parti ˆ leur Žgard È, Ç le plus important travail scientifique produit au sein du parti È ,etc.

[77]   Cf. Marx ˆ Engels, 18 juillet 1877.

[78]   Dans ses lettres du 9 juillet 1877 rŽdigŽes en termes analogues, Franz Wiede avait demandŽ ˆ Marx et ˆ Engels de bien vouloir collaborer ˆ la revue Die Neue Gesellschuft, qui parut ˆ partir d'octobre ˆ Zurich. Ë ce propos, Marx dŽfinit l'idŽal ‑ irrŽalisable ‑ d'une revue Ç impartiale È, de caractre scientifique, et critique la tentative pratique de crŽation d'une telle revue, la Neue Gesellschaft.

[79]   Cf. Engels ˆ Marx, 19 juillet 1877.

[80]   Cf. la critique de ce courant dans la seconde partie de L'IdŽologie allemande.

[81]   Cf. Engels ˆ Marx, 21 juillet 1877.

            August Geib fit adopter le projet suivant au Congrs de Gotha de 1877 : Ç Le parti publiera une revue scientifique de format appropriŽ et paraissant deux fois par mois ˆ Berlin ˆ partir du 1er octobre. È La Zukunft, financŽe par Hšchberg, vit ainsi le jour comme organe thŽorique officiel du parti. Aux yeux de Marx, Ç ce premier rŽsultat de l'achat par un bourgeois de sa place dans le parti n'est pas heureux, comme c'Žtait prŽvisible È (ˆ Bracke, 23-10-1877).

[82]   Cf. Engels ˆ K. Kautsky, 25 juin 1892. Engels fait allusion aux tractations menŽes par Kautsky avec l'Žditeur Dietz, en vue de la publication, en ouvrage sŽparŽ, des articles de F. A. Sorge dans la Neue Zeit sur le mouvement ouvrier amŽricain. L'Žditeur proposait que l'auteur Žlargisse quelque peu son texte afin de gagner un public plus vaste. L'affaire n'aboutit pas.

[83]   Cf. Engels ˆ A. Bebel, 19 novembre 1892.

            Ce congrs s'Žtait tenu du 14 au 21 novembre 1892 ˆ Berlin. La discussion porta sur les rapports de la centrale du parti et de la fraction parlementaire, sur la fte du Travail, le Congrs international de Zurich de 1893 l'utilisation du boycott et l'attitude vis-ˆ-vis du socialisme d'ƒtat. Le congrs repoussa, en outre, lÕidŽe d'un congrs international des syndicats, convoquŽ par l'aile ultra-conservatrice des syndicats anglais de Glasgow (Cf. MARX-ENGELS Le Syndicalisme, Maspero, vol. I, . 201-211), et dŽcida de participer au Congrs de Zurich de 1893. Enfin, il consacra une bonne place dans ses dŽbats ˆ la lutte contre le militarisme et la course aux armements. Les parlementaires social-dŽmocrates reurent lÕordre de voter contre les crŽdits militaires.

[84]   Au cours des dŽbats du Congrs de Berlin, certains dŽlŽguŽs critiqurent le VorwŠrts. Le mŽcontentement suscitŽ par ce journal se manifesta ˆ propos d'une discussion sur le montant du traitement peru par Liebknecht, en tant que rŽdacteur en chef. Manifestement, Engels dŽfend un salaire dŽcent vis-ˆ-vis de ceux qui pr™nent un salaire minimum (de propagande pour le parti et de dŽmagogie vis-ˆ-vis des ouvriers et des foules). Cette thse est la plus rationnelle dans les limites du systme capitaliste, mais elle n'en demeure pas moins dŽlicate.

[85]   Aprs avoir dŽfendu un salaire dŽcent pour ceux qui travaillaient ‑ dur sort ‑ pour le parti, Engels affirme que c'est une affaire personnelle que d'accepter un tel emploi, et que lui-mme et Marx ne l'eussent pas acceptŽ. Au reste, du point de vue thŽorique, Žtant donnŽ que Marx-Engels ont eu historiquement pour t‰che de critiquer les dŽviations du ou des partis formels (par exemple, le programme de Gotha et d'Erfurt) au nom du socialisme scientifique ou du parti historique, ils ne pouvaient Žvidemment occuper un poste de fonctionnaire rŽmunŽrŽ de ces partis : leur position de dŽfenseur du programme historique en ežt Žvidemment souffert. Les difficultŽs surviennent, comme l'indique Engels, lorsque l'organisation du parti dŽvie sur certains points, et que se pose le problme de la dŽfense du programme historique, soit d'une certaine opposition ou travail de fraction au sein du parti.

[86]   En allemand, Engels utilise systŽmatiquement le terme Jebildete pour Gebildete, afin de donner un sens pŽjoratif ˆ ce terme.

[87]   Le 22 novembre 1892, Bebel rŽpondit ˆ Engels : Ç On t'a informŽ de manire tout ˆ fait erronŽe ˆ propos de l'Žtatisation de la presse que tu Žvoques. Tous les journaux sans exception sont indŽpendants, mme ceux qui touchent de l'argent de notre parti. Nous n'avons jamais insistŽ pour nous mler dans leur direction, mme lˆ o c'ežt ŽtŽ nŽcessaire dans l'intŽrt du parti. È

[88]   Cf. Engels ˆ Laura Lafargue, 17 janvier 1886.

[89]   Cf. Engels ˆ A. Bebel, 8 mars 1892.

[90]   Engels fait sans doute allusion aux passages du pamphlet de F. MEHRING, Capital et Presse Un Žpilogue au cas Lindau (1891), dans lesquels il explique les raisons de son tournant de 1876 qui s'Žtait rŽvŽlŽ au grand jour en, 1879, ˆ l'occasion du remaniement de son ouvrage sur La Social-dŽmocratie Son histoire et sa doctrine. En effet, il expliquait de faon h‰tive les raisons pour lesquelles il avait abandonnŽ sa position premire d'hostilitŽ ˆ la social-dŽmocratie. NŽanmoins, sa polŽmique contre les calomnies bourgeoises y est remarquable.

[91]   Cf. Engels ˆ Victor Adler, 19 fŽvrier 1892.

[92]   Cette lettre, comme tant d'autres, a ŽtŽ ŽgarŽe.

[93]   Cf. Engels ˆ A. Bebel, 3 dŽcembre 1892.

[94]   La Neue Zeit, revue thŽorique d'un excellent niveau, souvent prŽcieuse aujourd'hui encore du point de vue de la thŽorie ou de l'histoire du mouvement ouvrier international, voire des analyses sociales en gŽnŽral.

            Le tirage de la Neue Zeit dŽclinant quelque peu, l'Žditeur J. H. W. Dietz proposa de lui donner un caractre plus populaire, en y ajoutant une partie artistique et une revue des ŽvŽnements politiques bref en rognant sur la partie thŽorique.

            Pour ne heurter personne, d'o le ton modŽrŽ de sa lettre, Engels dŽfendra le caractre thŽorique et scientifique de la revue, et par lˆ son intŽrt durable.

[95]   Engels ˆ Kart Kautsky, 27 aožt 1881.

[96]   Cf. Engels ˆ George Shipton, 10 aožt 1881.

      Comme il ressort de ces lettres au secrŽtaire du syndicat des peintres et directeur du Labour Standard, Marx-Engels entretenaient une correspondance avec la presse syndicale sur la base d'un appui effectif du parti ou de l'Internationale aux syndicats. Ils y diffusaient le programme du parti, et cessaient de le faire lorsque ce n'Žtait plus possible, sans claquer les portes dŽfinitivement. En tout cas, c'est toujours en socialistes qu'ils intervenaient.

[97]   Le congrs annuel des syndicats devait avoir lieu du 12 au 17 septembre 1881, et George Shipton voulait Žviter de heurter les ŽlŽments modŽrŽs des syndicats, ce qui explique qu'il ait ŽlevŽ des objections ˆ certains articles de Kautsky ou d'Engels. Shipton comme Engels avaient donc intŽrt ˆ ce que leurs relations soient claires et, comme cela arrive toujours, c'est l'ŽlŽment le plus radical qui prend l'initiative d'une telle clarification, les modŽrŽs ayant prŽcisŽment pour politique de temporiser, de faire des compromis et de ne jamais trancher. Engels y avait cependant un intŽrt immŽdiat : Shipton passait pour ce qu'il Žtait, et ne pouvait plus se targuer de sa collaboration comme argument contre les ŽlŽments plus radicaux que lui, ŽlŽments qui partageaient prŽcisŽment les positions de Marx-Engels.

[98]   Le 6 aožt 1881, le Labour Standard publia un article de Johann Georg Eccarius, sans mention d'auteur : Ç A German Opinion of English Trade Unionism È. L'auteur y cŽlŽbrait les syndicats de Hirsch et Duncker qui se proposaient d'influencer les ouvriers en un sens bourgeois et oeuvraient contre la liaison entre mouvement syndical et organisation rŽvolutionnaire de caractre politique.

[99]   Cf. Engels ˆ Laura Lafargue, 7 mai 1889.

            Engels Žtablit ici la prŽvision du cours historique futur ˆ partir de l'analyse politique, Žconomique et sociale du monde capitaliste, dŽterminant ainsi le cadre de l'action des partis prolŽtariens. C'est en ne se trompant pas dans son diagnostic que le parti remplit son r™le de direction rŽvolutionnaire de la lutte de classe.

            L'histoire a amplement confirmŽ l'analyse d'Engels et dŽmontrŽ que, mme au cours de la phase la plus pacifique du capitalisme, il n'Žtait pas possible de parler de passage pacifique au socialisme. Pr™ner celui-ci aujourd'hui, dans un monde en proie ˆ toutes les convulsions et ˆ toutes les violences, c'est nier purement et simplement le marxisme.

[100]       Dans sa lettre ˆ Paul Lafargue du 25 mars 1889, Engels explicite ce point : Ç La France ne pourra faire de rŽvolution pendant cette guerre sans jeter sa seule alliŽe, la Russie, dans les bras de Bismarck [la Commune ayant montrŽ qu'en cas de rŽvolution les belligŽrants capitalistes s'unissaient contre le prolŽtariat] et se voir ŽcrasŽe par une coalition. È

[101]       Aprs avoir consacrŽ leurs efforts aux t‰ches d'organisation interne de la classe ouvrire, Marx-Engels reviennent, dans cette dernire partie, aux t‰ches pratiques qui attendent l'Internationale socialiste au sein de la sociŽtŽ capitaliste existante qu'il s'agit de rŽvolutionner. Dans ce but, ils Žtudient les forces en prŽsence et en heurt dans la sociŽtŽ rŽelle, afin de dŽterminer quel sera l'alignement des forces, le centre de gravitŽ, ainsi que le point o le parti de classe pourra placer le levier pour renverser le systme d'oppression rŽel.

            En d'autres termes, Marx-Engels examinent quelle est la Ç politique extŽrieure de la classe ouvrire È, dont ils ont fait ˆ l'Internationale un devoir politique de dŽfinir les contours nets et tranchants dans l'Adresse inaugurale de l'A.I.T. de 1864. Si le parti de classe est l'organe dirigeant de la transformation socialiste du monde actuel, il lui faut conna”tre non seulement le champ des forces rŽelles, mais encore leur Žvolution dans le mouvement historique. C'est dire que le parti doit savoir tirer de l'Žtude des forces en mouvement la prŽvision de la nature et du cours du conflit entre le monde capitaliste et le communisme.

            Le centre de gravitŽ du monde ˆ la fin du sicle dernier Žtant la France et l'Allemagne cela nous ramne ˆ notre propre histoire. Ce sont tout naturellement les perspectives de rŽvolution ou de guerre impŽrialiste entre ces deux pays qui ont alors dŽterminŽ fondamentalement la Ç politique extŽrieure du prolŽtariat socialiste È. Les analyses et l'action du parti marxiste Ç catastrophique È ‑ en opposition au rŽformisme gradualiste qui triomphera finalement dans le mouvement ouvrier, mais non dans les faits, ceux-ci dŽmentant, avec la boucherie impŽrialiste de 1914, toutes les visions idylliques et pacifiques de passage au socialisme ‑ portent donc sur les faits saillants et cruciaux de l'histoire universelle : les heurts gigantesques entre classes OU ƒtats, qui dŽterminent ensuite pour une ou deux gŽnŽrations l'Žvolution de la sociŽtŽ tout entire dans un sens ou dans un autre, selon que prolŽtariat ou bourgeoisie l'emportera.

            Certes, c'est l'adversaire qui a fini par triompher, mais la vision de Marx-Engels a ŽtŽ confirmŽe par toute l'Žvolution historique, et les faits ont dŽmontrŽ que le succs n'est possible qu'ˆ partir de leur conception et de leurs mŽthodes rŽvolutionnaires.

[102]       En se fondant sur son schŽma des stades politiques progressifs en vue de la conqute du pouvoir, Engels analyse le rŽsultat des Žlections franaises du 4 octobre 1885 dans sa lettre du 12 octobre 1885 ˆ Lafargue. Celui-ci la jugea si importante pour le parti franais qu'il la fit publier prŽcipitamment dans Le Socialiste du 17 octobre 1885 (p. 2, col. 2). En analysant les rŽsultats sur une base objective, Engels les avait, en effet, trouvŽs plus encourageants que les socialistes franais qui Žtaient dŽus pour d'autres raisons, plus immŽdiates : le rŽsultat tangible des Žlections. La supŽrioritŽ de la mŽthode marxiste appara”t ici encore, puisqu'elle situe les faits dans l'optique de classe, et les apprŽcie en fonction de l'ensemble du cours, non parlementariste, mais politique et rŽvolutionnaire, ce que l'on peut appeler la stratŽgie d'ensemble.

            Engels n'est donc pas autrement troublŽ par le fait que les monarchistes avaient eu la majoritŽ des suffrages lors du premier tour des Žlections parlementaires, l'essentiel Žtant atteint : la dŽfaite des rŽpublicains bourgeois, des opportunistes.

            Au premier tour des Žlections, les ŽlŽments monarchistes ‑bonapartistes et royalistes rŽactionnaires ‑ recueillirent 3 500 000 voix (contre 1 789 000 en 1881) et eurent 177 Žlus, tandis que les rŽpublicains n'en comptrent que 129.

[103]       Sans doute Engels se rŽjouissait-il de voir les trois tendances monarchistes se regrouper par la force des choses, en un seul parti bourgeois de droite. On notera qu'il leur appliquerait le terme de secte lorsque, ˆ contre-courant de l'Žvolution normale, ils se divisaient artificiellement.

[104]       Les rŽsultats du second tour ont nettement confirmŽ le jugement d'Engels. Le 18 octobre, les candidats rŽpublicains furent Žlus ˆ une majoritŽ Žcrasante. La Chambre des dŽputŽs se composa de 372 rŽpublicains et de 202 monarchistes.

[105]       Cette lettre d'Engels a ŽtŽ publiŽe par Le Socialiste, 31 octobre 1885, p. 2, col. 3.

[106]       Ce mot a sans doute ŽtŽ mal dŽchiffrŽ. Il s'agit probablement de Ç clarifier È.

[107]       Cette lettre d'Engels ˆ Lafargue fut reprise et prŽsentŽe sous forme d'article sous le titre ci-dessus dans Le Socialiste, organe du parti ouvrier, le 6 novembre 1886.

            De manire fondamentale, Engels y dŽcrit le rapport des forces impŽrialistes dans le monde qui s'acheminait vers la Premire Guerre mondiale. II se fonde sur toute lÕanalyse historique, politique et diplomatique des puissances officielles, dŽveloppŽe tout au long de sa vie par Marx et constituant une vŽritable thŽorie de lÕimpŽrialisme si l'on sait la rattacher aux chapitres du Capital sur l'accumulation primitive. De fait, le parti Ïuvre au sein d'un champ de forces bien dŽterminŽes, nullement neutres si l'on a en vue la t‰che fondamentale de la conqute du pouvoir. Cet article fut repris ˆ la fois en AmŽrique dans Der Sozialist et le Sozial-demokrat ainsi que dans la Revista Sociala roumaine en dŽcembre 1886.

[108]       Ce premier paragraphe se trouve seulement dans la lettre d'Engels ˆ Lafargue.

[109]       Le traitŽ de San Stefano mit fin ˆ la guerre russo-turque de 1877-78 et donna de tels avantages ˆ la Russie dans les Balkans que l'Angleterre et l'Autriche-Hongrie protestrent, appuyŽes secrtement par l'Allemagne. Une pression diplomatique et des menaces militaires forcrent la Russie ˆ rŽviser ce traitŽ au Congrs de Berlin (13 juin au 13 juillet 1878) ˆ son dŽtriment. Par exemple, le territoire attribuŽ ˆ la Bulgarie autonome fut rŽduit de plus de la moitiŽ. La province mŽridionale devint la province autonome de RumŽlie orientale qui demeura sous l'influence de la Turquie. Le territoire du MontŽnŽgro fut aussi considŽrablement rŽduit. Cependant la partie de la Bessarabie enlevŽe ˆ la Russie en 1856 et reprise par elle ˆ San Stefano lui resta ; de mme, l'annexion de la Bosnie et de la Herzegovine par l'Autriche-Hongrie fut sanctionnŽe par la paix de Berlin. La veille du Congrs, l'Angleterre s'Žtait emparŽe de Chypre. Engels a donc connu, dans ses grandes lignes, le dernier alignement des forces impŽrialistes avant la premire grande guerre mondiale.

[110]       Dans sa lettre ˆ Lafargue, Engels avait Žcrit Ç pas moins que les Russes È ˆ la place de Ç ainsi que les Russes È.

[111]       Dans la lettre d'Engels, il y a Ç chauvine È ˆ la place de Ç patriotique È

[112]       En parlant de la politique orientale, Engels fournit en mme temps son apprŽciation sur la politique franaise qu'il dŽveloppera notamment dans son article intitulŽ Le Socialisme en Allemagne, cf. infra.

[113]       Au cours de la guerre italienne de 1859, Engels avait dŽjˆ expliquŽ de quelle manire la Russie trempait dans les affaires de la pŽninsule appenine, cf. ˆ ce propos les articles d'Engels sur Le P™ et le Rhin et La Savoie,Nice et le Rhin, in MARX-ENGELS, ƒcrits militaires, pp. 332-429 ; ˆ propos de la Russie, cf. 427-428 (o Engels trace un historique de l'action russe en Italie).

[114]       Dans sa lettre ˆ Lafargue, Engels avait Žcrit : Ç Les Bulgares du Nord et du Sud È au lieu des Ç Bulgares et RoumŽliotes È.

[115]       Dans sa lettre ˆ Lafargue, Engels avait ŽtŽ plus prŽcis. Au lieu de Ç mais pour lui È, il avait Žcrit Ç ˆ lui et pour lui È.

[116]       Engels, plus bref, achve la phrase par ces mots : Ç Celui-ci cde, ou bien ‑ rŽvolution par les slavophiles. È

[117]       Ç Pas mal È ne se trouve que dans le texte de lettre d'Engels ˆ Lafargue.

[118]       Ç Mme È a ŽtŽ remplacŽ par Ç davantage È È dans le texte imprimŽ.

[119]       Dans le texte imprimŽ, Lafargue a remplacŽ Ç anarchie È par Ç RŽpublique È.

[120]       Cette phrase manque dans la lettre d'Engels, mais elle correspond ˆ sa pensŽe, et on la trouve dŽveloppŽe, par exemple, dans MARX-ENGELS, ƒcrits militaires, p. 611 (F. Engels, Ce qui attend l'Europe, 15 janvier 1888).

[121]       Dans sa lettre, Engels poursuivait : Ç Alors il y aura quelque changement de systme. È

[122]       Ë la place de cette phrase, Engels avait Žcrit : Ç Pour les autres, ce sera une nouvelle tentation d'attaquer l'Allemagne qu'on croira moins forte au moment d'un changement de politique intŽrieure. È

[123]       Tout le monde a pratiquement oubliŽ depuis l'horrible carnage impŽrialiste de 1939-1945 que le prolŽtariat ne doit pas simplement lutter contre la guerre ˆ cause de son horreur et des souffrances qu'elle inflige ˆ lÕhumanitŽ, sous peine de se condamner ˆ l'impuissance.

            Le Ç gŽnŽral È Engels ne cesse, en effet, de souligner, tout au long de ses Žtudes militaires, le caractre de classe nŽcessaire des guerres et de la violence. La prŽsente lettre en est encore un exemple frappant : toute guerre moderne, mme si elle est conduite entre ƒtats constituŽs des classes dominantes, a un caractre de classe contre le prolŽtariat. La classe ouvrire, force dŽcisive de la production et de la vie modernes, est toujours au centre des questions cruciales de paix ou de guerre. Mais pour le voir, il faut se placer d'un point de vue de classe. LŽnine l'a fait magistralement en 1914 en, dŽclarant le conflit en cours impŽrialiste, c'est-ˆ-dire dirigŽ en premier contre la classe ouvrire internationale qui tend au socialisme.

[124]       Cf. Engels ˆ Paul Lafargue, 27 juin 1893.

            Dans les textes suivants, Engels prend l'initiative, au nom du parti historique, de dŽterminer la position de la classe ouvrire franaise et allemande dans le conflit qui s'annonce. Il intervient ainsi directement pour inflŽchir les tendances nationales au sein du mouvement existant, et en France, par exemple, le chauvinisme traditionnel.

            Le 17 juin 1893, le comitŽ national du parti ouvrier franais lana un appel intitulŽ Ç le Conseil national du Parti ouvrier aux travailleurs de France È afin de rŽpondre ˆ une campagne des boulangistes et des anarchistes accusant les socialistes d'avoir une action antipatriotique.

            C'est avec une grande modŽration qu'Engels critique ici ses camarades de parti franais, emportŽs dans la polŽmique au point de crier Ç Vive la France ! È et retombant dans leur vieille maladie : le chauvinisme. (Cf. La Commune de Paris, 10/18, p. 77 : en pleine guerre, Marx a d'autres mots pour qualifier ces aberrations chauvines, car alors il ne s'agit plus de paroles et de polŽmiques, mais de prises de position pratiques Ç Il y a, d'autre part, ces imbŽciles de Paris ! Ils m'envoient, en grande quantitŽ, leur Manifeste ridiculement chauvin, qui a suscitŽ ici, parmi les ouvriers anglais, la risŽe et l'indignation, que j'ai eu toutes les peines du monde ˆ ne pas laisser se manifester en public. È)

[125]       Les nations existant, la position d'un internationaliste est d'tre Franais en Allemagne et internationaliste en France, autrement dit de nier sa propre nation lˆ o il la trouve devant lui. En termes lŽninistes, l'internationaliste lutte d'abord contre sa propre bourgeoisie.

[126]       Dans le Manifeste, Marx-Engels rglent cette question une fois pour toutes : Ç On a, en outre, reprochŽ aux communistes de vouloir supprimer la PATRIE, la NATIONALITƒ. Les ouvriers n'ont pas de PATRIE. On ne peut pas leur enlever ce qu'ils n'ont pas. È On remarquera que, dans la premire phrase, il est question de patrie ET de nationalitŽ, et dans la seconde on ne pas de patrie : on ne eut donc leur enlever ce qu'ils n'ont pas. Ils combattent la nationalitŽ qui est un FAIT, car les ouvriers sont franais, italiens, etc., et ce, non seulement de par la race et la langue (encore qu'il y aurait bien des choses ˆ dire sur ces deux facteurs), mais surtout par l'appartenance physique ˆ l'un des territoires o gouverne tel ƒtat national de la bourgeoisie. Ce fait physique n'est pas sans avoir de grands effets sur la lutte de classe et mme sur la lutte internationale : la nation n'est-elle pas le ring o la bourgeoisie se heurte aux autres nations bourgeoises, et o le prolŽtariat affronte sa bourgeoisie puis le capital international ? Mais tout cela ne lui donne pas de patrie. Cf. Facteurs de race et de nation dans la thŽorie marxiste, in : Fil du Temps, n¼ 5, p. 113 et s.supprime que la patrie. Ce n'est sans doute pas par hasard. Les ouvriers n'ont

[127]       D'aprs ces critres, LŽnine jugeait du poids et du r™le de la Russie dans le processus de la rŽvolution mondiale : Ç On aurait Žgalement tort de perdre de vue qu'aprs la victoire de la rŽvolution prolŽtarienne, si mme elle n'a lieu que dans un seul des pays avancŽs, il se produira, selon toute probabilitŽ, un brusque changement, ˆ savoir : la Russie redeviendra, bient™t aprs, un pays, non plus exemplaire, mais retardataire (au point de vue Ç soviŽtique È et socialiste). È Cf. LŽnine,Îuvres, 31, p 15.

            La Russie soviŽtique tenait compte, par exemple, de la diffŽrence sociale entre un ouvrier et un paysan, la voix du premier valant dix fois plus que celle du second dans les consultations dŽmocratiques. De mme, l'Internationale communiste attribuait un poids spŽcifique ˆ chaque parti communiste des diffŽrents pays. Par exemple, les partis communistes d'Allemagne, de France et de Russie disposaient chacun de cinq voix au Premier Congrs de l'Internationale, contre trois au Parti communiste de Suisse, de Finlande ou de Hongrie. Dans un certain contexte, ces diffŽrences sont Ç justes È, car on ne peut faire abstraction de la force rŽelle de chaque mouvement particulier. Cependant, ces diffŽrences doivent s'attŽnuer, puis s'effacer au fur et ˆ mesure que l'Internationale se transforme en un parti mondial unique. Enfin, ces diffŽrences quantitatives ne peuvent jouer lorsqu'il s'agit de discuter de questions Ç qualitatives È, de programme ou de principe.

[128]       Ici encore, Engels fait la partie belle ˆ ses interlocuteurs franais, car il Žtait peu vraisemblable que la France jou‰t ce r™le d'impulsion de la rŽvolution internationale : il ežt effectivement fallu une conjonction de faits assez extraordinaires pour cela. En fait, c'est ˆ la Russie que Marx-Engels attriburent ce r™le ds 1871 : cf. par exemple, la prŽface russe du Manifeste communiste.

[129]       Dans Le R™le de la violence et de l'Žconomie dans l'instauration de l'Empire allemand moderne, Engels Žcrivait : Ç Il ne fallut pas cinq semaines pour que s'Žcroul‰t tout l'Ždifice de l'empire de NapolŽon III, si longtemps admirŽ par les philistins d'Europe. La rŽvolution du 4 septembre ne fit qu'en balayer les dŽbris, et Bismarck, qui Žtait en guerre pour fonder lÕempire de la Petite-Allemagne, se trouva un beau matin fondateur de la RŽpublique franaise. È

[130]       La thŽorie marxiste part de la rŽalitŽ, puis elle revient ˆ la rŽalitŽ dans son action. Elle est donc toujours insŽparable des conditions matŽrielles. Sa mŽthode se distingue foncirement de celle des anarchistes, qui agissent en vue de rŽaliser des principes abstraits, Ç Žternels È, de morale, de justice, d'ŽgalitŽ etc. Les mŽthodes rŽvolutionnaires du marxisme sont insŽparables des conditions dŽterminŽes de la sociŽtŽ de classe existante : dŽveloppement de l'industrie qui conditionne le nombre et la qualitŽ des prolŽtaires, crise de production qui suscite la crise rŽvolutionnaire, rapports Žconomiques qui dŽterminent les forces et les antagonismes en prŽsence. Sans cela, la thŽorie ne serait pas reliable aux donnŽes objectives de la rŽalitŽ.

            Marx nous donne un exemple de cette liaison matŽrielle entre thŽorie et pratique historique concrte dans le passage suivant ˆ propos de l'effet de l'unification nationale (obtenue par l'Allemagne en 1871) sur le mouvement ouvrier : Ç Si les Prussiens sont victorieux, la centralisation du pouvoir d'ƒtat sera utile ˆ la centralisation de la classe ouvrire allemande (jusque-lˆ coincŽe dans les 36 ƒtats et divisŽe en autant de petits morceaux). La prŽpondŽrance allemande transfŽrera, en outre, le centre de gravitŽ du mouvement ouvrier europŽen de France en Allemagne, et l'on n'a qu'ˆ comparer le mouvement de 1866 jusqu'ˆ nos jours dans les deux pays, pour voir que, du point de vue de la thŽorie et de l'organisation, la classe ouvrire allemande l'emporte sur la franaise. Son poids accru sur le thŽ‰tre mondial signifiera aussi que notre thŽorie l'aura emportŽ sur celle de Proudhon, etc. È Il faut ne rien avoir compris au socialisme scientifique, appelŽ Ç marxisme È, pour substituer ˆ la thŽorie de classe du prolŽtariat la thŽorie individuelle de ‑Marx, et transformer la lutte sociale en lutte d'idŽes de deux personnes pour dire, comme le fait par exemple DollŽans, en commentaire ˆ ce passage de la lettre de Marx ˆ Engels du 20 juillet 1870 : Ç Sa victoire dŽfinitive sur Proudhon, voilˆ ce qui importe aux yeux d'un idŽologue dominateur È !!!

[131]       Cet article d'Engels a ŽtŽ publiŽ aussi bien en allemand (dans la Neue Zeit, I, 1891-1892, n¼19) qu'en franais (dans l'Almanach du Parti ouvrier pour 1892, imprimŽ ˆ Lille).

            Il constitue un avertissement contre le danger d'une guerre que la bourgeoisie internationale menace de dŽclencher pour rŽsoudre ses propres contradictions et pour prŽvenir la conqute du pouvoir par le prolŽtariat, notamment en Allemagne. Il ne semble pas que l'article d'Engels ait reu l'Žcho qu'il mŽritait dans le parti franais, puisqu'il parut ˆ Lille dans l'Almanach du parti. Pourtant, Engels avait prŽparŽ le terrain et les idŽes dans la mesure de ses moyens auprs de ses partisans les plus fidles, Bebel, Lafargue, la compagne de ce dernier, Laura Marx. ƒtant donnŽ l'ambiance de l'Žpoque, il dut mesurer ses mots pour ne choquer aucune susceptibilitŽ, et il convient de lire ce texte en tenant compte de la prudence dÕEngels. Au reste, dans l'Avertissement donnŽ en tte de l'article publiŽ dans la Neue Zeit, Engels dit lui-mme :

            Ç Il va sans dire ‑ mais je le rŽpte tout de mme expressŽment une fois encore ‑ que dans cet article je ne parle qu'en mon nom propre, et nullement au nom du parti allemand. Seuls les autoritŽs, les dŽlŽguŽs et hommes de confiance Žlus de ce parti ont ce droit. Et eu outre, toute ma position acquise sur le plan international par cinquante annŽes de travail m'interdit de me prŽsenter comme reprŽsentant de tel ou tel parti socialiste national en opposition ˆ un autre parti, mme si elle ne m'interdit pas de me souvenir que je suis allemand et que je suis fier de la position que les ouvriers allemands ont su conquŽrir avant tous les autres. È

            Ce n'est pas par hasard si Engels retrace l'histoire du mouvement ouvrier allemand depuis ses dŽbuts : la question de la guerre devait remettre en jeu l'existence du mouvement ouvrier tout entier. En outre, dans son Žvaluation de la politique face ˆ la guerre, l'existence d'un puissant parti ouvrier n'est pas sans peser trs lourd dans la balance.

[132]       Dans le texte allemand, au lieu de Ç remuŽ le prolŽtariat allemand È il y a Ç le prolŽtariat allemand a fait de manire autonome È.

[133]       Dans le texte allemand, Engels ne parle pas du parti de Bebel et de Liebknecht, mais plus simplement du nouveau parti d'Eisenach.

[134]       Dans le texte allemand, Engels n'attribue pas le titre de socialistes ˆ ces deux fractions, il dit plus simplement Ç deux courants È.

[135]       Dans le texte allemand, au lieu de Ç dŽputŽs bourgeois, Ç partis de l'ordre È.

[136]       Il s'agit de Bebel et Liebknecht.

[137]       Au lieu de Ç dŽputŽs bourgeois È, le texte allemand dit Ç dŽputŽs des partis de l'Ordre È.

[138]       Dans le texte allemand, Engels Žcrit : Ç dans les districts agraires les plus rŽactionnaires È.

[139]       Engels se base sur la progression des voix social-dŽmocrates aux Žlections pour dŽduire que si l'Allemagne suit un cours pacifique, la social-dŽmocratie arrivera au pouvoir. On notera que les chiffres qu'il indique ne donnent jamais la majoritŽ Žlectorale aux social-dŽmocrates. Ce n'est donc pas par la voie pacifique que les social-dŽmocrates arriveraient au pouvoir. Ce raisonnement n'est pas Žtranger ˆ Engels qui n'Žtalait jamais les chiffres sans les Žvaluer exactement.

[140]       En somme, Engels propose d'utiliser ˆ plein la pŽriode de dŽveloppement pacifique qui joue en faveur des forces socialistes, et de laisser jusque-lˆ l'initiative de la violence au camp bourgeois. En tout cas, ce n'est pas de manire parlementaire, mais rŽvolutionnaire qu'Engels envisage la conqute du pouvoir.

[141]       Dans le texte allemand, Engels introduit ˆ cet endroit une prŽcision intŽressante : Ç tant que durera sa force supŽrieure È. Comme on le voit, le marxisme ramne toujours les questions fondamentales ‑ celle du pouvoir, par exemple ‑ aux rapports des forces physiques, rŽelles, et non aux jeux parlementaires. Le cours historique, avec la guerre mondiale, le confirmera aussi.

[142]       Cf. La Seconde adresse du Conseil gŽnŽral sur la Guerre franco-allemande prŽparŽe par Marx, in La Guerre civile en France, 1871, ƒditions sociales, 1953, p. 287.

[143]       Dans le texte allemand. au lieu de Ç en vue des risques ˆ courir È, on lit Ç face ˆ de telles perspectives È.

[144]       Dans le texte allemand. ce dernier membre de phrase est remplacŽ par : Ç de remplir le r™le qui lui incombe dans le dŽveloppement historique europŽen È.

[145]       Cette phrase. comme l'ensemble du texte, exclut expressŽment la solution renŽgate de l'Union sacrŽe qui consiste ˆ faire front avec sa propre bourgeoisie et qui, triomphant ˆ la Premire comme ˆ la Seconde Guerre mondiale, a ruinŽ le mouvement prolŽtarien rŽvolutionnaire pour des dŽcennies.

[146]       La suite de l'article en allemand d'Engels, parue plus tard, est intŽressante, du fait que l'ŽventualitŽ d'une guerre dans le rapport de forces de 1892 devait tre ŽcartŽe. En effet, il y eut provisoirement un rapprochement russe avec l'Allemagne et le conflit qui Žclata en 1914 fut ‑ comme LŽnine et quelques rares socialistes de gauche l'affirmrent aussit™t ‑ une guerre impŽrialiste dans tous les pays.

[147]       En juillet 1891 la flotte franaise avait ŽtŽ reue triomphalement ˆ Cronstadt pour marquer le rapprochement survenu entre la Russie tsariste et la France. Au mme moment, les diplomates nŽgocirent un traitŽ franco-russe, qui fut signŽ en aožt 1892 et prŽvit des consultations communes en politique internationale ainsi qu'une action militaire commune en cas d'attaque de l'un des deux partenaires. Ce traitŽ prŽpara l'alliance franco-russe de 1893.